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  • Day 95

    Puerto Natales

    April 9, 2020 in Chile ⋅ ⛅ 11 °C

    Cela fait bientôt un mois que nous sommes arrivés à Puerto Natales ; il n'était pas prévu de rester aussi longtemps. Le jour où nous avons débarqué, nous avions trouvé une jolie petite ville, très touristique et animée. Les rues se croisant à angle droit forment un treillis coloré, les maisons étant peintes de couleurs vives. On trouve nombre de restaurants et d'agences de voyages, beaucoup d'hôtels, d'auberges de jeunesse, des cafés ambulants, des vendeurs de completos (hot dogs). Ici, tout tourne autour du Parc National et du tourisme, principale source de revenus de la région. Dans les rues, on croisait beaucoup d'Européens, gros sacs sur le dos, se préparant pour le trek ou célébrant leur retour dans les bars. Nous, on fantasmait déjà sur le restaurant où nous irions en sortant de dix jours de marche...

    [Et puis, le parc a fermé.]

    En quittant le parc Torres del Paine, nous sentons une certaine tension, les gens forcent un peu pour monter dans le bus, les informations sont rares et contradictoires. A l'arrivée à Puerto Natales, nous passons un contrôle sanitaire, vérification des dates d'entrée dans le pays et prise de température. Le terminal de bus est vide, tout comme la ville. Beaucoup de magasins sont fermés et on apprend que de nombreux hôtels ont également fermé leurs portes, renvoyant clients et personnel, afin de les protéger du coronavirus. La tension est palpable...
    On sonne à notre hostal, fermé également, mais Mary la gérante accepte de nous héberger. On prévoit de rentrer sur Punta Arenas, puis de prendre un avion pour rejoindre de la famille dans le Nord du pays. Le lendemain, on apprend que notre vol est repoussé, que de très nombreux passagers se pressent à l'aéroport pour rentrer. On attend quelques jours de plus, pour voir notre deuxième avion annulé également. Les aéroports sont bondés, les avions décalés les uns après les autres, on redoute de devoir camper 3 jours devant un comptoir au milieu de gens quelque peu nerveux pour parvenir à attraper un vol. On en discute avec notre gérante qui nous propose spontanément de rester dans l'hostal autant que nécessaire, moyennant un petit loyer. Accepté direct!! Et du chocolat en remerciement de sa gentillesse!
    En attendant, on suit de près l'évolution du virus à travers le pays, les mesures sanitaires qui s'accentuent, la mise en place du couvre-feu, les villes en quarantaine.
    Actuellement, la situation est calme à Puerto Natales. Les militaires font poliment respecter la file à l'entrée des supermarchés qui, elle, est assez animée, ça discute, ça sourit. Les petits commerces, fermés au début de l'épidémie, sont en train de rouvrir (impossible pour certains de ne pas avoir de revenus durant 2 semaines, pas d'épargne et aides du gouvernement insuffisantes), mais il y a moins de monde dans les rues, plusieurs avec des masques. Pour certaines boutiques, on fait la file devant la grille, on donne sa liste au personnel à l'intérieur qui, en tenue d'isolement, remplit le sac de commission et le repasse au client. Il reste quelques Européens mais on croise surtout des locaux. La saison touristique s'est terminée trop tôt, les répercussions risquent d'être dures...
    Nous sommes toujours dans l'hostal, mais nous ne sommes plus seuls. Trois autres colocataires sont arrivés, un chat également, on sympathise en espagnol, on cuisine local (suisse et chilien), on regarde des films, on skypapote avec la famille. On attend toujours un avion pour rejoindre le Nord du pays, mais les vols sont très restreints et sont toujours repoussés ou annulés. On sort une fois par semaine, avec nos foulards pour faire les courses, et on prend l'air sur le balcon.
    Dehors, les lumières de la Patagonie nous offrent par moments des paysages grandioses, entre les premières neiges sur le Mont Ballena, une éclaircie soudaine après un orage violent au-dessus du canal, ou la pleine lune orange qui se lève parée de son écharpe de nuages...
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