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  • Day 10

    JDH. « Par des anges et des géants »

    October 21, 2022 in India ⋅ 🌙 24 °C

    Nous venons de passer trois jours intenses et suffisamment probants photographiquement pour enfin souffler ce soir : un dernier chaï et il sera temps de préparer nos sacs . Nous ne nous sommes pas privés ce matin de quelques sauts en tyrolienne depuis la muraille offrant un panorama sans pareil. Lors de chaque saut les sensations se mélangent, le précipice remonte l’estomac et fait pousser des cris d’excitation, la vue sur la ville d’un coté et le Moti Mahal -Palais des Perles du fort Mehrangarh- est incroyable, je me sens comme un grand gamin, quel pied !

    Cette ville, mais quelle ville mes aïeux ! Ce bleu parfois intense, souvent passé, s’écrit dans l’histoire, depuis des siècles jusqu’à nos jours : Diwali approchant, nombreuses sont les maisons à se renover avec minutie ; nombre de cahutes se parrent de guirlandes, les peintures sont rafraichies, le bleu se veut profond, les contours de fenêtres prennent leur plus belle teinte acajou, on dessine à l’huile les entourages des portes avec des motifs fleuris, des enluminures et des symboles religieux. Les gamins s’éclatent déjà avec leurs premiers clac-doigts et pétards. Il règne dans les rues une effervescence qui laisse supposer une fête toujours aussi spectaculaire.

    Dans les ruelles labyrinthiques de Chand Pole Chowk ou de Sodagaran Mohalla les milliers d’étals vendent lampes à huile, fleurs, guirlandes, sucreries, épices. Des boyaux si vivants que le coeur de l’Inde bat au travers de chaque encablure, tant de monde négocie ; on achète de l’or et de l’argent en vue des offrandes aux temples ; les barbiers par dizaines voient une clientèle qui ne désemplit pas à toute heure de la journée. Le parfumeur ravit quantité de coquets souhaitant s’embaumer des fragrances les plus riches, ses huiles de santal, de musc ou de oud s’arrachent, nous mêmes y auront succombé.
    Sur la place du marché un élephant prend place au milieu des vaches, des chiens galeux, des motos vrombissantes, des rickshaws pétaradants. Des vendeuses de saris, des gosses marchandent des plumes de paon ou des cordonniers ambulants s’affairent parmi la faune vivante et mécanique.
    Les cloches des temples raisonnent, les muezzins appellent à la prière, les dévots font la zakât, les sâdhus bénissent les offrandes de beurre, de noix de coco ou d’oeillets.

    De notre côté nous assistons à tout cela avec délice, nos appareils photo tournent à plein régime ; les cartes chauffent, les pellicules s’enchainent. Tout en accrochant les regards, nous imaginons ce que peuvent bien se dirent tous ces gens dont le langage corporel peut donner tant d’indices : Le prix ne semble pas convenir à cette dame faisant peser ses légumes, le vendeur empilant les poids sur sa balance, elle mouline avec ses mains de grands airs, ses deux billets de dix roupies virevoltants, ses hochements de tête et ses sourcils froncés semblant indiquer au marchand que son prix devra être renegocié.

    Pour ma part, je nage en terrain connu avec toujours le même appétit, mais quel plaisir de constater que Gael semble tout aussi conquis ; ses yeux brillent face à l’espièglerie ou la candeurs des enfants, tous plus adorables les uns que les autres (quoi que sortent quelques sales gosses du lot, mais c’est minoritaire), il rend aux passants qui croisent notre route leurs salutations avec autant d’engouement. D’ailleurs je ne veux pas trop en dire, seulement que ses photos rendent parfaitement honneur à ce qu’il vit. J’ai hâte qu’il les partage. J’admire sa douceur et sa patience, un hyperactif comme moi, il faut le supporter alors ça plus tout ce joyeux bordel, ce mec est très fort.

    Nous aurons observé le couché du soleil perchés sur la roche volcanique des contreforts de la citadelle, dominer la ville alors que le soleil s’éteint à l’horizon est une sensation à nul autre pareil. Nous aurons bu le chaï dans les rues, dans les palais, dans les guesthouses, échangé nombre de contacts, mais nous en aurons avant tout pris plein les yeux. Cette cité, comme Jaisalmer, comme presque toutes celles que nous croiserons encore, fait désormais partie du pèlerinage de ma vie. Presque toutes ? Oui, car notre prochaine destination est inédite, il me tarde de vous en narrer les nouvelles péripéties, je ne les connais pas encore, mais Diwali approchant, elles ne seront certainement pas tristes (encore une fois).

    « Le citadelle Mehrangarh, bâtie par des anges et des géants » - 1881 - Rudyard KIPLING.

    Goodbye Blue City.
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