Satélite
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  • Dia 20

    Trajet pour les Canaries

    19 de novembro de 2023, North Atlantic Ocean

    Ça fait 2j et demi qu'on est parti de Tanger et ce que j'imaginais du bateau prend de plus en plus forme. On trouve tous nos marques à notre façon, certains sont plus impliqués que d'autres sur la navigation, d'autres sur le projet. On est porté par des vents plutôt constant qui nous poussent vers les Canaries, on devrait y être d'ici 3j si les vents ne faiblissent pas trop. On a pris du large pour pouvoir capter ces vents et pour le moment ça nous sourit bien. Le bateau file à une vitesse de 6 nœuds sur une eau assez calme mais avec un peu de houle. Les vagues ne se brisent pas et bien qu'impressionnantes, elles sont inoffensives, elles nous portent même.
    L'eau est particulierement bleue, j'ai pu le verifier lors d'une petite baignade hier accroché à un bout trainant dans le sillage. Un veritable puit bleu absorbant toute la lumière vers ses profondeurs. Il est incrit 3200m de profondeur sur nos cartes.

    Le bateau a fière allure et cest lui le seul à briser les vagues dans un léger roulis. Les voiles sont réglées aux petits oignons et le soleil assèche le pont aussi vite que les vagues ne le mouille.

    Paul nous apprend des chants scout, ça tourne surtout autour de la biture, Elsa Gervais et moi nous donnons à cœur joie et à gorge déployée, on se sent bien pirate dans les moments comme ceux ci.

    On croise énormément d'oiseaux bien qu'on soit à minimum 150km de toute terre. Certains espèrent trouver dans notre sillage quelconque nourriture, d'autres se reposent rapidement dans le flux de nos voiles. D'autres chassent au loin, et d'autres encore semblent s'amuser à voile au ras de l'eau, si bien qu'on croirait les voir se dédoubler juste un instant. J'aimerais pouvoir les reconnaître et j'attends avec impatience de croiser un Albatros (p'tite pensée à Fay et Imen).

    Hier Youen et moi avons lutter pendant une heure à essayer d'attraper de magnifiques poissons qui nageaient aux abords du bateau, ils nous ont suivi pendant au moins 2-3h. La mer etait tres calme et projetait de léger rayons du soleil sur leurs ecails, ce qui créait un dégradé de violet au cyan sur chacun d'entre eux. Chacun devait faire 60cm de long facile et ils se deplacaient avec une agilité qui semblait nous narguer. Passant tantôt à tribord, tantôt à babord, ils feignaient être intéressés par les appâts qu'on mettait au bout de la cane, mais s'en détachaient tout aussitôt.

    22-11 23h36
    La nuit dernière a été très complexe, pratiquemment impossible de dormir à cause du mouvement brusque du bateau ainsi que le fracas des vagues sur l'étrave. Le genre de situation qui te fait te demander si les copains sur le pont n'ont pas besoin d'aide. La petite boule au ventre de savoir si le bateau va bien et où tu commences à envisager le risque. Le quart s'est passé plutôt bien pourtant, mais c'est vrai que c'était physique. Avec le vent dans le dos et les grosses vagues, il etait assez complexe de réduire la voilure sans prendre de risque et on a tous passé une nuit plutôt énergique, le bateau fonçait à 9 nœuds dans les vagues.

    La journée a été l'une des plus molles de l'équipage après cette dure nuit. Tout le monde cherchait à faire la sieste et à se reposer un peu, le soucis c'est que la veille, le pilote automatique dans les vagues a sucré pas mal de batterie et que durant la journée, il n'y avait pas un chouïa de soleil.
    On s'est donc relayé à la barre pour économiser de la batterie pour cette nuit.
    Le relais à la barre n'etait pas facile non plus, la houle était tres forte, surtout vers 17-19h, avec des vagues de plus de 4m, les plus grosses que l'on a croisé pour le moment. Malgré leur taille, elles etaient bien chouette ces vagues et nous ont permis de faire 165 milles en 24h, une moyenne de pratiquement 7 noeuds par heure, avec le bateau qu'on a, Montessier serait fier comme tout, je le suis en tout cas.

    Après avoir ingurgité une bonne plâtré de pâte, au lit et puis récupération express jusqu'à 23h, l'heure à laquelle commence mon quart. Ces deux heures de sommeil ont fait du bien même si j'aurais voulu en avoir d'avantage. Ce n'est que partie remise, le bateau file un peu plus doucement et la houle est beaucoup plus douce, on pourrait même entendre les copains ronfler depuis le pont tellement les conditions sont chouettes pour dormir.
    À cette heure, la lune éclaire extrêmement bien, on y voit comme à 19h, ça rajoute encore un peu à l'atmosphère rassurante.

    23-11 14h34
    Je pense vraiment que la musique et l'eau sont sûrement les éléments qui m'intriguent le plus, ceux que j'ai envie d'exploiter le plus, qui suscitent en moi le plus de curiosité.
    Voilà maintenant 45min que je fixe notre sillage qui dans la houle donne l'impression d'etre une route de montagne alors que nous tenons un cap précis. J'ai le casque vissé sur les oreilles et le mélange des sens auditifs et visuels me procure une émotion qui ne me semble pas encore connue. Un appel sourd, une envie de me perdre dans l'immensité d'un milieu qui me dépasse. Je me rends compte que c'est bien souvent cette sensation que je cherche en soirée, cette espèce de relâchement tel que rien n'existe plus dans le moment precis autre que l'étreinte du son. Là, à la différence d'en soirée, je n'ai pas du tout envie de fermer les yeux, au contraire, les mouvements hypnotiques de l'eau m'attirent.
    J'ai des envies de mixer et de faire ressentir la même chose que je ressens actuellement. Le rythme répétitif du son et la complexité infinie des légers remous à la surface de l'eau se repondent parfaitement. L'un est impossible à suivre et l'autre calme l'esprit, le rassure. Ça me donne l'impression de marcher sur une ligne fine entre l'hypnose et la folie
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