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  • Day 42

    Retour au pays

    April 22, 2020 in Peru ⋅ ☀️ 19 °C

    Le 13 avril, l’ambassade de France informe qu’il n’y aura plus aucun vol en partance du Pérou à partir du 22 avril. Des informations complémentaires stipulent que les frontières aériennes fermeraient pour un minimum de 3 mois.

    Lorsque cette annonce tombe, les derniers vols de prévus sont à destination de Londres et Francfort. L’étude de la situation est vite faite, nous voilà bloqués à un jour de route de Lima, à l’autre bout du monde, et pour un laps de temps encore très important.

    La gérante de l’hôtel nous dit qu’elle va essayer de nous faire un prix pour la chambre au mois. L’incertitude de tout et la sensation de n’avoir plus aucune cartes en mains rythme forcement notre quotidien. Nous prenons en tout cas pleine conscience que nous ne repartirons pas de sitôt, avec tout ce que cela peut engendrer.
    Concernant la découverte du Pérou, c’est loupé, pour ce qui est de vivre dans une ville péruvienne, c'est le cas depuis plus d’un mois déjà… et peut être bien plus.

    Le 17 avril Air France annonce organiser un dernier vol Lima/Paris le 22. Outre le fait qu’il s’agisse d’un dernier vol pour la France, celui-ci s’avère être également le dernier vol en partance du Pérou.

    Nous sommes en contact avec un autre couple de français, Hannah et Pierre Adrien, depuis un ou deux jours. Ils sont basés à environ une demi-heure de nous et on se rend compte que nous partageons les mêmes réflexions et que nous avons pris les mêmes décisions jusqu’à présent. Cela nous rassure mutuellement.
    Etant sur la même longueur d’onde, nous tentons ensemble de prendre ce vol en se disant que l’on aura au moins essayé.
    Il nous faut plusieurs choses :
    - Trouver un chauffeur qui accepte de faire 24h de route aller, 24h de route retour tout en ayant une quarantaine imposer ensuite.
    - Faire une demande d’autorisation de circulation mentionnant le jour, l’heure et la cause plus diverses informations sur le chauffeur, le véhicule et nous-même. Sans cette autorisation il est impossible de partir
    - Arriver à être sur les listes de l’ambassade pour que cette dernière nous appelle et veuille bien nous vendre des billets pour le vol.

    Arriver à ce que ces 3 éléments fondamentaux coïncident a été une galère innommable.
    Nous avions trouvé un chauffeur après moult tentatives, fait la demande d’autorisation de circuler… mais tout a été à refaire, le chauffeur en question de donnant plus signe de vie. Nous sommes arrivés à en trouver un autre et à avoir une nouvelle attestation.

    En théorie nous avions tout pour rejoindre Lima… Mais pas de billet pour le vol.
    Nous nous étions tous les quatre mis d’accord au préalable pour ne pas rejoindre la capitale sans avoir les billets d’avion car il était hors de question pour nous de risquer d’être bloquer plusieurs mois à Lima. Il a donc fallu littéralement harceler l’ambassade par mail et téléphone, jusqu’à ce qu’on nous dise qu’il n’y avait plus que des places en business à 1200€. S’en est suivi de fastidieuses négociations pour finalement arriver à débloquer des places en éco… Qu’on ne voulait pas nous vendre car nous étions trop loin de Lima.

    Entre temps le chauffeur nous mettait la pression car il avait des réparations à prévoir sur sa voiture (nous l’apprenions) et qu’il ne voulait pas faire en ces temps de crise si nous ne partions pas. Bref, il faut négocier avec tout le monde et lorsque c’est bon d’un côté, c’est de l’autre que ça ne va plus. Si bien que nous remballons nos sacs, préparons à manger pour la route et que le jour même de notre supposé départ nous ne savons pas si nous restons encore 3h ou 3 mois. Au final, en négociant encore et encore… et encore et en mentant (pour la bonne cause) légèrement à l’ambassade en disant que nous étions déjà en route nous arrivons à avoir ces fameux billets.
    Les quelques pièces de la voiture ont été changés, là aussi non sans mal.

    Nous prenons donc la route… enfin c’est ce qu’on pense une fois que les au revoir sont fait. Que nenni ! Le chauffeur, Jérémy, nous dit ne pas avoir de feuilles de coca et qu’il ne peut pas partir sans. Il a fallu faire toute la ville pour en trouver. Cette fois c’est bon, on est lancé… pas pour longtemps.

    Premier barrage en sortie de Chachapoyas et on se fait stopper. Il est 13h, le policier s’en fou de l’autorisation valable à partir de 12h et ne veut faire passer personne avant 14h. Jérémy a plus d’un tour dans son sac (sac qui ne contient pas que de la coca) et a dans ses contacts un commandant de police (qui nous a d’ailleurs laissé un carton à déposer à Lima). Quelques minutes plus tard et par un curieux hasard, nous voilà donc reparti.

    Plus loin nous récupérons Hannah et Pierre. Nous sommes désormais à 5 dans une Toyota Yaris, avec 4 gros sacs à dos, et… un chiot (chiot de l’hôtel que nous amenons à Lima). Pour le petit bonus de l’histoire, nous avons passé une bonne quinzaine de barrage de policiers et de militaires (avec contrôles divers et variés) ou nous devions cacher le chiot car il était interdit de circuler avec.

    Donc à ce moment-là on a tout, la Toyota est blindée, Jérémy a les contacts qu’il faut, on est au top. Sauf que non, c’est encore trop simple, ça manque encore un peu de relief ! Oh ben tient, le coup de la panne ça relèverait un peu tout ça !
    Les 8 premières heures de route on les a passées au beau milieu d’une guirlande de Noel. Tous les voyants s’allume, un part un, la voiture chauffe à mort. On doit s’arrêter tous les quarts d’heure pour mettre de l’eau. Là on se dit que c’est plié et qu’on va rappeler l’ambassade pour leur dire de revendre les billets.
    Au bout d’un (long) moment notre chauffeur parvient à rafistoler la fuite et on peut enfin tracer la route.

    Un petit mot sur Jérémy ; le gars est une machine. Il a conduit 24h et s’est arrêté qu’une heure trente pour se reposer au bout de 15h de trajet. On salue également les feuilles de coca à qui nous devons beaucoup.

    Arrivés à Lima après donc 24h de route le mardi 21 avril.
    Le lendemain matin nous avons rendez-vous devant l’Alliance Française. Sur place nous sommes 400 à attendre de pouvoir monter dans un des 8 bus organisés par l’ambassade pour rejoindre l’aéroport militaire. Devant celui-ci il y a pas mal de sud-américains qui attendent et dorment là avant de pouvoir rentrer chez eux. Cela donne l’image d’un camp de réfugiés… on se sent alors forcément privilégié, voir même honteux du haut de notre bus…

    A l’aéroport militaire on nous fait s’asseoir sous une « tente » à 1m de distance. Les sacs sont mis au milieu tandis que les chiens policiers en font le tour.

    Après un vol de 12h30 avec une personne sous oxygène et une autre qui tombe dans les vapes les yeux ouverts, nous arrivons à Paris. Deux RER et un TGV plus tard nous sommes à Lyon où nous attendons 3h pour un TER en direction de Chambéry.

    Jusqu’au 22 avril nous aurons passé 38 jours de confinement au Pérou (36 à Chachapoyas)
    Nous n’avons pas quitté les masques depuis le départ et jusqu’à chez nous.
    Etant donné qu’aucun contrôles n’est fait en France et bien que ce ne soit pas la seule aberration face au virus ici, nous entamons ensuite une quarantaine de notre propre initiative.

    Le voyage se termine malheureusement ainsi. Nous n’avions pas prévu de rentrer si tôt mais les circonstances sanitaires en ont décidé autrement. Nous sommes tristes d’être rentrés et à la fois soulagés de ne plus être dans l’incertitude du lendemain. Nous espérons fortement retourner en Amérique du Sud prochainement. L’Equateur et les Galápagos resteront un merveilleux souvenir malgré tout.
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