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  • Day 4

    J4 - Jeudi 21 avril

    April 21, 2022 in Turkey ⋅ 🌙 11 °C

    La journée commence très, très tôt ce matin. 5h18. Quelqu'un frappe à la porte. Je remonte de mes lointaines vapeurs de rêve, le chemin est long, sinueux, je veux y rester.
    On frappe de nouveau, quelques coups, francs. C'est le gardien de nuit, le concierge, le type qui reste au bureau pour accueillir les éventuels retardataires ou voyageurs nocturnes, ou encore répondre aux demandes les plus insolites des clients, comme moi, hier: un rouleau de PQ et un café. On vit une époque...

    On en est à trois depuis lundi, toujours une nouvelle tête à saluer le soir quand on rentre, en général un jeune d'une vingtaine d'années, affalé sur son siège en train de jouer à un jeu sur son téléphone, parlant à peine anglais. Bref, celui-ci était sympa, dans le sens où on a eu une conversation la veille assez érudite, à savoir : pourrais-je avoir un rouleau de papier toilette et une café s'il vous plaît?" A quoi il a répondu, voilà pour le rouleau, et pour le café, c'est dans la cuisine, sur le toit.

    Je m'égare. A 5h18, j'ai aussi cette tendance. J'ai encore du mal à aligner mes planètes, mes chakras, mes énergies, tout ce que tu veux, lecteur, le compte n'y est pas.

    Je finis par tenir debout sans m'écrouler à moitié par terre, à moitié sur le lit, la bouche entrouverte et la salive me coulant dans l'oeil (comme j'ai la tête renversée). Non, je suis debout, il est 5h18, à Istanbul et on vient de frapper à la porte de la chambre. Deux fois.
    Cela doit être important. Une urgence? Le doute m'habite.
    J'ouvre la porte.

    EMINÖNÜ

    Je m'extirpe violemment du lit vers 9h, les yeux dans les valises. On était censés se lever tôt pour traverser la Corne d'Or, l'estuaire qui sépare la vieille ville au sud de la nouvelle au nord, toujours côté européen. Là-bas, il y a les quartiers de Karaköy, Beyoğlu et Cihandir et notre première visite de la journée: la Tour de Galata, que nous avons instantanément renommée Tour de Gataca et maintenant, tu peux t'asseoir pour dire le vrai nom de nouveau.

    Mais en voyant le jour se lever et la météo qui retourne au couvert, confirmée par nos applications de téléphone, nous décidons de reporter à vendredi cette journée car il nous faut absolument du soleil pour Gatac- GaLAta. Galata. C'est une tour dont je reparlerai qui donne sur notre vieille Istanbul depuis la moderne et du coup, en y montant, on a une vue panoramique sur toutes les mosquées et la vieille ville. Tu comprendras donc, cher lecteur, qu'il nous faut absolument du soleil, et en particulier du soleil levant, de l'est évidemment, pour éclairer Byzance de tous ses feux.
    Question de lumière.

    Pour la photo.

    Mais si, tu sais? la photo...! Ah ça y est. Je croyais t'avoir perdu.

    Nous optons donc pour une permutation avec vendredi et ça tombe bien, on n'avait rien de définitivement prévu. Nous irons dans le quartier d'Eminönü, celui du Bazar Egyptien, ou Marché aux Epices. Nous avons encore quelques mosquées à explorer ainsi qu'une éventuelle croisière sur le Bosphore à commettre, si l'envie nous gratouille.

    RÜSTEM PAŞA

    Nous voilà partis de nouveau à travers cet invraisemblable enchevêtrement de ruelles et de routes, moi armé de mon GPS, Mérignac de sa confiance (il est particulièrement inutile question orientation pour ce voyage, alors qu'en général, si tu me connais un peu en vrai et que tu es du sud-ouest, tu ddécouvriras peut-être, ébaubi, que je suis capable d'arriver à Arcachon lorsqu'on m'attend au Cap Ferret).
    Nous nous débrouillons comme des Stambouliotes. Si je n'obtiens pas ma licence de "taksi" dans le Vieux Stamboul d'ici mercredi prochain, c'est à n'y rien comprendre.

    La première mosquée de la matinée, Rüstem Paşa (le "s" cédille se dit "ch" en turc) est tellement imbriquée dans le lacis d'impasses, de ruelles et de caravansérails que nous tournons autour un moment, sachant pertinemment que c'est la bonne mais sans trouver l'entrée.

    Ah oui : un caravansérail. On a tous entendu ce mot un jour, et c'est très vocateur des chameaux, pour ma part. Et pour cause: jusqu'au 7e siècle, seuls les Chinois possédaient le secret de la fabrication de la soie. Et donc son importation se faisait le lond de la fameuse route de la soie, depuis la Chine en traversant l'Himalaya, la Perse (= le moyen-Orient) et la Turquie. Les cargaisons, extrêmement précieuses,
    voyageaient à dos de chameau, aussi, tous les 30/35km (une journée de marche à dos de camélidé), de mini-villes fortifiées s'élevaient pour protéger les caravanes pendant la nuit. Elles se composaient d'écuries, de hamams, de boutiques, d'entrepots ou encore de mosquées et les commerçants pouvaient y passer la nuit sans crainte de se faire piller leur trésor.

    L'intérieur de la mosquée est encore et toujours somptueux. Elle a été construite par le gendre de Soliman le Magnifique, à la tête de l'empire pendant une quarantaine d'années au 16e siècle, et qui était aussi son Grand Vizir.
    De taille beaucoup plus modeste que Sainte-Sophie ou même celle de Soliman, que nous allons visiter après, elle n'en reste pas moins un des plus belles.

    SOLIMAN LE MAGNIFIQUE

    Nous nous dirigeons maintenant vers la 2e mosquée d'Istanbul en termes de prestige et de magnificence, c'est le cas de le dire, après l'Ayasofya (Sainte-Sophie). Ici, c'est carrément un complexe entier qui a été bâti avec un hôpital, une bibliothèquee, des écoles, un hamam...
    Nous restons à l'intérieur pendant la prière, une nouvelle fois. Les fidèles sont beaucoup plus nombreux, les hommes regroupés autour de l'imam devant son mihrab, la niche dans le mur qui indique la direction de la Mecque et donc l'orientation de la prière, alors que les femmes sont regroupées contre le mur arrière de la mosquée, cachées par des panneaux de bois en moucharabiehs.

    APRÈS-MIDI

    Après de nouvelles divagations volontaires dans les ruelles animées où nous croisons un nombre hallucinant d'hommes de tout âge poussant des diables (souvent vides) de toute taille, nous comprenons soudain leur but dans la vie en observant un échange: ils parcourent en fait les rues à la recherche de "clients" potentiels comme des personnes chargées de gros colis imposants et lourds qui pourraient se faire facilement transporter sur un diable! Pendant note repas, nous voyons par deux fois un petit jeune pousser un chariot sur lequel se balancent dangereusement deux longs placards/armoires. Les rues étant très souvent bondées (le mot doit être ici considéré dans sa pleine mesure), étroites et pentues, on ne peux que les admirer!

    A table, nous nous laissons encore endormir par le serveur, qui, mine de rien, nous re-propose la quasi-intégralité de la carte et finit par nous faire prendre une portion de frites supplémentaire. Alors que Mérignac avait juré devant Allah qu'il ne mangerait qu'une salade aujourd'hui. Il avait juste oublié de mentionner la demi-pide ("pidé") que nous prenons en plus car on n'est pas sûr qu'une salade soit suffisante. Une pide, c'est une sorte de pizza turque très fine et formée comme une grosse barquette de Lu. Nous n'avions pas prévu que les salades seraient juste énormes.

    Depuis le début du séjour, nous qui ne mangeons quasiment jamais de pain, nous avons refait les stocks, sous toutes leurs formes : pita, galette, pain brioché, pain blanc, naan, beurré, huilé, grillé... et c'est que du bonheur dans 9 cas sur 10!
    Pour ma part, je ne jure plus de rien devant personne. C'est les vacances et quelle que que soit la force de ma volonté, elle finira de toute façon par s'évanouir dans ma nature (bon, dans le domaine du raisonnable quand même, hein?).

    Pour faire court, après un café turc, nous refaisons un tour de Bazar Egyptien puis nous dirigeons vers l'embarcadère d'Eminonu pour acheter une croisière sur le Bosphore, histoire de dire qu'on y était.

    1h45 de bateau et un tour jusque sous le deuxième pont qui relie l'Europe à l'Asie. C'est cocasse. On découvre une nouvelle facette d'Istanbul, que ce soit du côté européen comme asiatique. Les maisons sont par endroits très luxueuses, en hauteur et sur des terrains boisés. Les collines environnantes sont toutes plantées à intervalles réguliers de gigantesques drapeaux turcs dont le rouge tranche sur le vert de la végétation et qui claquent au vent. Le retour n'est pas très fun, le vent est glacial.

    Nous terminons les visites de la journée par un ultime retour au Bazar Egyptien faire des amplettes pour les familles.

    SOIRÉE

    Rien de bien notable, nous repartons dans la rue du Dubb de hier, l'indien en terrasse. Le serveur me reconnaît et me demande si on revient pour lui. Ben... non! Et du coup, on s'arrête manger juste en face (mais c'est juste une coïncidence).

    Une étrangeté parmi tant d'autres que je n'ai jamais le temps de raconter ici: tous les soirs, une camionnette food-truck vient se garer sur l'étendue entre sainte-Sophie et la Mosquée Bleue, notre QG, pour distribuer une soupe gratuite et un quignon de pain à une foule de passants toujours plus nombreux. On a au début pensé à une sorte d'Armée du Salut, mais les poireuteurs n'ont rien d'indigents ou de personnes en difficultés financières. Il y a même des étrangers, des touristes! Et tout ce petit monde s'installe sur la place et boit sa soupe en gobelet dans la satisfaction la plus intérieure...

    Bon, je sens bien que tu reste sur un non-dit, lecteur frustré. Il te manque quelque chose, je t'ai dérobé une partie de l'histoire que tu as pris le temps et la patience de lire malgré d'évidentes lacunes rédactionnelles.

    Que vois-je à 5h18 ce matin lorsque j'ouvre la porte, après que le concierge m'a tiré du plus profond des sommeils en frappant de manière si décidée?
    Eh bien, je te le raconterai une prochaine fois, car nous n'avons nous-mêmes pas le moindre début d'amorce d'explication quant à sa décision de nous réveiller.
    Nous voulons tirer les choses au clair en espérant le revoir demain (pas vu ce soir) pour lui parler et comprendre, car la situation avait un haut potentiel de vriage, quelque soit la direction prise! Quoi qu'il en soit, pas d'inquiétude, aucun animal (pas même un chat errant du quartier) n'a été blessé pendant le tournage, comme i'disent à Oliwoud.
    Je te souhaite une douce nuit.
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