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  • Day 6

    The Thar. The lil´ Camel on the Prairie

    October 17, 2022 in India ⋅ ☀️ 21 °C

    Il y a 8 ans, les dunes du Thar m’avaient marqué, transformé. J’avais de gros soucis d’anxiété, être loin de tout, en particulier du premier hôpital pour me secourir en cas de crise cardiaque était une épreuve. Pourtant j’aurais parcouru ce désert 3 jours et deux nuits, écrasé sous une voute étoilée remarquable. Cette étape était la pierre angulaire de mon voyage initatique de gamin de 23 ans.

    Je suis retourné à Jaisalmer il y a 4 ans, une virée désertique morne au milieu des champs d’éoliennes m’avait tant déçu que mes amis et moi avions écourté l’escapade. Nous avions tenu a peine un jour et demi avec des chameaux vraisemblablement mal soignés voire mal-traités, le désert était bien là…perdu dans les éoliennes, notre guide semblait se préoccuper plus sincèrement de nos porte-monnaie que de nous partager son mode de vie. Mes amis avaient appréciés mais n’avaient pas de point de comparaison ; pour ma part, appelons un chat - un chat : C’était nul à chier.

    Autant dire que pour cette troisième aventure à Jaisalmer, je souhaite retourner aux sources, j’ai réservé le même hébergement qu’il y a 8 ans dans l’espoir de retrouver la même équipe de chameliers.

    Et bien je ne vais pas tergiverser plus longtemps : c’était bien le cas. Et mieux, Sambhu, jeune chamelier d’il y a 8 ans est de nouveau de la partie, pour ma plus grande joie. La route serait la même, pour une nuit et deux jours de tappe-cul. Quel plaisir de faire découvrir cela à Gael, moi qui ne souhaite que lui faire découvrir la quintessence de cet extraordinaire pays et lui donner, si possible, la même fièvre que moi pour la terre des Rois et des Sâdhus.

    Nous partons au petit matin. Une jeep nous attend à l’entrée de la citadelle pour ensuite nous éloigner de Jaisalmer, à environs quarante kilomètres en direction du village de Sambhu où ce dernier ainsi que nos trois méharis nous attendent. Nous nous rendons donc au village de Baran, au sud-ouest de la cité des Sables.

    -on way avant village : Moment Coquillages et crustacés fossilisés sur de gros blocs disposés en bordure de route de jeep, plus kitsch et touristique à souhait, un bonheur, on en redemande-

    Blague à part. Le temps a passé, Sambhu a désormais 26 ans, est jeune marié depuis trois mois. Il aurait aimé se marier avec le désert nous raconte-t’il, mais le devoir familial est prioritaire. Qu’importe, il continue de parcourir son désert et le faire découvrir avec tout autant de prévenance aux visiteurs le temps de quelques jours. Nous voila parti au dos de Papaya, fidèle au poste depuis 8 ans (et plus), King-Kong et Al Pacino au sourire aussi ravageur que sa balafre.

    Le désert parlons-en, il vaut tout de même ce titre « The Little Camel on the Prairie », en effet des dromadaires auraient été des femelles que les baptiser Laura, Marie et Carrie n’aurait pas été déconnant. Le Désert à changé en quatre ans, encore plus en presque une décennie.
    Alors pour le coup nous sommes éloignés de ces horribles éoliennes qui parsèment tout le pourtour de Jaisalmer et qui ne sont pas là pour alimenter la ville, auquel cas je les apprécierais déja plus, mais les bases militaires, nombreuses à ses portes. En effet les tensions avec le Pakistan sont ce qu’elles sont, autant dire que nous sommes en zone plus que sensible. Notre ballade à trente-cinq kilomètres de la frontière nous fait toucher du regard cette frontière de la discorde. Paradoxale frontière, ce désert ne connaît ni barrière ni religion.
    La mousson à atteint cette région habituellement si peu nourrie en pluie. Pour certains cette mousson a été « particulièrement généreuse cette année », pour d’autre, c’est le signe que les temps vont changer. Les chameliers deviendrons serviteurs de steppes, ou devront se reconvertir dans l’agriculture. Les temps ont changés en dix ans et ce qui semblait lunaire se transforme peu à peu, tantôt en savane, tantôt en pampa. Alors pas de panique lecteur, ça reste sec, il y fait toujours 36° un 16 Octobre, mais pour autant, de vastes étendues vertes ont pris la place des sols désolés, secs et poussiéreux. Les arbres sont beaucoup plus nombreux, les fleurs, aux senteurs exquises s’ouvrent par centaines et les petites courges sauvages poussent d’elles mêmes.

    Quel contraste que d’assister depuis une dune à pareil spectacle, quelques mètres à dos de dromadaire nous font passer de Laurence d’Arabie, à la prairie de cette chère Laura. C’est un fait : Le désert change. Gage à la population sur place de trouver comment en tirer le meilleurs parti. L’expérience reste pour autant merveilleuse.

    Le soir venu, au pied d’une dune, nous trinquons à la bière. Au coin du feu, Sambhu observe mes vieilles photos de lui sur mon téléphone et à son tour il me partage les photos de son mariage.

    Peu à peu, le soleil s’éteint au loin, pour embrasser une dernière fois l’océan d’or et de jade, emboîtant le pas au voile du crépuscule. Au fur et à mesure que le bleu du ciel s’obscurcit, des pépites se dessinent. D’abord l’étoile du berger, puis voilà la Grande Ours, enfin les pupilles se dilatent et les cieux se parsèment de gemmes étincelantes, par centaine, puis par millions La grande voie trace son chemin et cisaille les dunes. Jamais je n’aurais oublié ces étoiles, cet éther qui écrase ma poitrine et me fait sourire machinalement.

    Quel bonheur que d’observer cela et partager cet instant avec la personne que j’aime, bien qu’il faille cacher notre romance, par pudeur, mais également par respect : Conscient d’être dans une région où la population n’est pas encore prête à accepter ces débordements d’affection là.
    Un simple regard, un doux effleurement de main, le « V » de la Victoire cédant sa place au « V » de loVe, pour autant de petites déclarations et de codes que nous échangeons entre nous discrètement et que nous-seuls pouvons comprendre.

    J’en reviens à nos étoiles ; Nous avons pu observer les astres dans un confort inespéré, car pour le coup, nous disposions chacun d’un petit lit agrémenté d’un matelas tout mince mais moelleux à souhait, notre couverture cette année ne sentirait pas le chameau, c’est le cas de le dire. Doucement le regard se perd au loin, et le sommeil arrive, Morphée nous cueuille pour nous transporter vers de belles contrées, nous faisant également le cadeau de nous laisser nous réveiller plusieurs fois pour observer de encore et encore ce merveilleux spectacle.

    Dans ce type d’expérience, notre nature rassurgit subtilement, l’esprit s’éveille et les yeux s’ouvrent aux premiers rayons orangés d’un soleil qui s’approche doucement de l’horizon…A 6h00…sans heurt, dans un coton délicieux d’un corps prêt à repartir après une tasse de chaï chaud. Un réveil si tôt pourtant si simple, oui même pour Gael.
    Les lits auront été les toits des scarabées, semblant avoir trouvé leur meilleur dancing-room sous nos fesses, leurs traces s’arrêtant instantanément au delà de notre sommier.

    Le temps est venu de lever le camp et de reprendre notre route. Sambhu a harnaché nos montures, qui auraient cependant bien préféré continuer de déguster nonchalamment les branches épineuses sur leur chemin. La route du retour est toujours une épreuve pour les fessiers, cependant les pieds sont prompt à réveiller ces drôles d’animaux. Quelques heures nous séparent du retour à la civilisation vrombissante, un dernier chaï a midi, une délicieuse petite préparation de riz aux légumes au milieux des vaches (très drôle de voire des vaches se ballader de la prairie à la dune) et voilà déjà le moment de nouveaux aurevoirs. Un instant aigre-doux : Nul ne sait quand je retrouverais, si je retrouverais, Sambhu, Papaya et leur merveilleux désert.
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