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- Dag 6
- mandag 17. oktober 2022 06:59
- ☀️ 21 °C
- Høyde: 221 m
IndiaJaisalmer Tehsil26°36’13” N 70°38’20” E
The Thar. The lil´ Camel on the Prairie

Il y a 8 ans, les dunes du Thar m’avaient marqué, transformé. J’avais de gros soucis d’anxiété, être loin de tout, en particulier du premier hôpital pour me secourir en cas de crise cardiaque, était une épreuve. Pourtant, j’aurais parcouru ce désert 3 jours et deux nuits, écrasé sous une voûte étoilée remarquable. Cette étape était la pierre angulaire de mon voyage initiatique de gamin de 23 ans.
Je suis retourné à Jaisalmer il y a 4 ans. Une virée désertique morne, au milieu des champs d’éoliennes, m’avait tant déçu que mes amis et moi avions écourté l’escapade. Nous n’avions tenu à peine un jour et demi, avec des chameaux vraisemblablement mal soignés, voire maltraités. Le désert était bien là… perdu parmi les éoliennes. Notre guide semblait se préoccuper plus sincèrement de nos porte-monnaies que de nous partager son mode de vie. Mes amis avaient apprécié, mais n’avaient pas de point de comparaison. Pour ma part, appelons un chat un chat : C’était nul à chier.
Autant dire que pour cette troisième aventure à Jaisalmer, je souhaitais retourner aux sources. J’ai réservé le même hébergement qu’il y a 8 ans, dans l’espoir de retrouver la même équipe de chameliers.
Et bien, je ne vais pas tergiverser plus longtemps : c’était bien le cas. Et mieux, Sambhu, le jeune chamelier d’il y a 8 ans, est de nouveau de la partie, pour ma plus grande joie. La route serait la même, pour une nuit et deux jours de tape-cul. Quel plaisir de faire découvrir cela à Gael, moi qui ne souhaite que lui faire découvrir la quintessence de cet extraordinaire pays et lui donner, si possible, la même fièvre que moi pour la terre des Rois et des Sâdhus.
Nous partons au petit matin. Une jeep nous attend à l’entrée de la citadelle pour nous éloigner de Jaisalmer, à environ quarante kilomètres en direction du village de Sambhu, où ce dernier ainsi que nos trois méharis nous attendent. Nous nous rendons donc au village de Baran, au sud-ouest de la cité des Sables.
En chemin avant le village : Moment Coquillages et crustacés fossilisés sur de gros blocs disposés en bordure de route de jeep, plus kitsch et touristique à souhait, un bonheur, on en redemande -
Blague à part. Le temps a passé, Sambhu a désormais 26 ans, est jeune marié depuis trois mois. Il aurait aimé se marier avec le désert, nous raconte-t-il, mais le devoir familial est prioritaire. Qu’importe, il continue de parcourir son désert et de le faire découvrir avec tout autant de prévenance aux visiteurs, le temps de quelques jours. Nous voilà partis sur Papaya, fidèle au poste depuis 8 ans (et plus), King-Kong et Al Pacino, au sourire aussi ravageur que sa balafre.
Le désert, parlons-en, il vaut tout de même ce titre de "The Little Camel on the Prairie". En effet, des dromadaires femelles auraient été des "Laura", "Marie" et "Carrie", n’aurait pas été déconnant. Le désert a changé en quatre ans, encore plus en presque une décennie.
Alors, pour le coup, nous sommes éloignés de ces horribles éoliennes qui parsèment tout le pourtour de Jaisalmer et qui ne sont pas là pour alimenter la ville, auquel cas je les apprécierais déjà un peu plus, mais des bases militaires, nombreuses à ses portes. En effet, les tensions avec le Pakistan sont ce qu’elles sont, autant dire que nous sommes en zone plus que sensible. Notre balade, à trente-cinq kilomètres de la frontière, nous fait toucher du regard cette frontière de la discorde. Paradoxale frontière, ce désert ne connaît ni barrière ni religion.
La mousson a atteint cette région habituellement si peu nourrie en pluie. Pour certains, cette mousson a été « particulièrement généreuse cette année » ; pour d’autres, c’est le signe que les temps vont changer. Les chameliers deviendront serviteurs de steppes ou devront se reconvertir dans l’agriculture. Les temps ont changé en dix ans et ce qui semblait lunaire se transforme peu à peu, tantôt en savane, tantôt en pampa. Alors, pas de panique lecteur, ça reste sec, il fait toujours 36°C un 16 octobre, mais pour autant, de vastes étendues vertes ont pris la place des sols désolés, secs et poussiéreux. Les arbres sont beaucoup plus nombreux, les fleurs, aux senteurs exquises, s’ouvrent par centaines et les petites courges sauvages poussent d’elles-mêmes.
Quel contraste que d’assister, depuis une dune, à pareil spectacle. Quelques mètres à dos de dromadaire nous font passer de Laurence d’Arabie à la prairie de cette chère Laura. C’est un fait : Le désert change. Gage à la population sur place de trouver comment en tirer le meilleur parti. L’expérience reste pour autant merveilleuse.
Le soir venu, au pied d’une dune, nous trinquons à la bière. Au coin du feu, Sambhu observe mes vieilles photos de lui sur mon téléphone et, à son tour, il me partage les photos de son mariage.
Peu à peu, le soleil s’éteint au loin, pour embrasser une dernière fois l’océan d’or et de jade, emboîtant le pas au voile du crépuscule. Au fur et à mesure que le bleu du ciel s’obscurcit, des pépites se dessinent. D’abord l’étoile du berger, puis voilà la Grande Ourse, enfin les pupilles se dilatent et les cieux se parsèment de gemmes étincelantes, par centaines, puis par millions. La grande voie trace son chemin et cisaille les dunes. Jamais je n’aurais oublié ces étoiles, cet éther qui écrase ma poitrine et me fait sourire machinalement.
Quel bonheur que d’observer cela et de partager cet instant avec la personne que j’aime, bien qu’il faille cacher notre romance, par pudeur, mais également par respect. Conscients d’être dans une région où la population n’est pas encore prête à accepter ces débordements d’affection. Un simple regard, un doux effleurement de main, le « V » de la Victoire cédant sa place au « V » de loVe, pour autant de petites déclarations et de codes que nous échangeons entre nous discrètement et que nous seuls pouvons comprendre.
J’en reviens à nos étoiles. Nous avons pu observer les astres dans un confort inespéré, car pour le coup, nous disposions chacun d’un petit lit agrémenté d’un matelas tout mince mais moelleux à souhait. Notre couverture, cette année, ne sentirait pas le chameau, c’est le cas de le dire. Doucement, le regard se perd au loin, et le sommeil arrive. Morphée nous cueille pour nous transporter vers de belles contrées, nous faisant également le cadeau de nous laisser nous réveiller plusieurs fois pour observer encore et encore ce merveilleux spectacle.
Dans ce type d’expérience, notre nature ressurgit subtilement, l’esprit s’éveille et les yeux s’ouvrent aux premiers rayons orangés d’un soleil qui s’approche doucement de l’horizon… à 6h00, sans heurt, dans un coton délicieux d’un corps prêt à repartir après une tasse de chaï chaud. Un réveil si tôt, pourtant si simple, oui, même pour Gael.
Les lits auront été les toits des scarabées, semblant avoir trouvé leur meilleur dancing-room sous nos fesses, leurs traces s’arrêtant instantanément au-delà de notre sommier.
Le temps est venu de lever le camp et de reprendre notre route. Sambhu a harnaché nos montures, qui auraient cependant bien préféré continuer de déguster nonchalamment les branches épineuses sur leur chemin. La route du retour est toujours une épreuve pour les fessiers. Cependant, les pieds sont prompts à réveiller ces drôles d’animaux. Quelques heures nous séparent du retour à la civilisation vrombissante. Un dernier chaï à midi, une délicieuse petite préparation de riz aux légumes au milieu des vaches (très drôle de voir des vaches se balader de la prairie à la dune) et voilà déjà le moment des nouveaux adieux. Un instant aigre-doux : Nul ne sait quand je retrouverai, si je retrouverai, Sambhu, Papaya et leur merveilleux désert.Les mer