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  • Day 36

    Etreindre le Monde

    February 17, 2023 in India ⋅ 🌙 25 °C

    Je suis arrivée à l’ashram d’Amma convaincue que j’y vivrai un moment de recul, d’introspection et de haute spiritualité.

    Arrivée à Amritapuri, il faut déjà trouver la bonne entrée pour pouvoir pénétrer dans l’ashram, c’est dire à quel point il est grand.
    À l’accueil, j’attends pour pouvoir m’enregistrer, intimidée à l’idée de ce qui m’attend. Mais rapidement, l’intimidation laisse place à la confusion. En effet, lorsque mon tour arrive, à 2 reprises des résidentes me passent devant sans le moindre remord, à l’indienne, sauf que… ce sont des occidentales… elles sont visiblement très pressées de trouver une solution à leur problème et ne semble en rien relativiser la situation ! La femme a l’accueil s’excuse platement et me fait comprendre qu’il s’agit de personnes « à fortes personnalités », ce qui sous-entend en langage ashramique qu’elles sont particulièrement pénibles.

    Contre mon passeport et une fiche de renseignements, on me remet les clés de ma chambre. Pour se faire pardonner de l’attente, la gentille dame de l’accueil me promet une chambre avec une vue sublime. Je la remercie chaleureusement et lui assure qu’il n’y a rien de grave dans ce qui s’est passé, je suis zeeeeen.

    Je m’engouffre dans le hall d’un immeuble de 17 étages et grimpe au 14ème. Les portes de l’ascenseur s’ouvrent sur une vue incroyable avec, à 180 degrés, la mer d’Arabie au bord de laquelle est situé l’ashram. Cette première vision sublime me remplie de joie. Je trouve mon numéro de logement dans le couloir, déverrouille le verrou et ouvre la porte de ma chambre : oups ! Elle est déjà/encore occupée, par un homme, visiblement sous la douche au son du sifflement et de l’eau qui émanent de la pièce !
    Je redescends à l’accueil où je retrouve ma gentille petite dame, qui part en pleine apoplexie de confusion et d’excuses. Cette fois, elle me donne les clés d’une chambre située à l’autre bout de l’ashram mais selon elle : « very quiet place ». Elle me gratifie d’un cœur avec les doigts et me lance un « thank you so much angel ». Mes 14 kilos sur le dos, je repars légère par ces paroles d’amour vers mon petit cocon. Je traverse l’ashram, ce qui me permet de voir comment il est organisé et quel type de personnes le fréquentent…

    L’ashram d’Amritapuri accueille 3000 personnes de nationalités diverses et variées. Des personnes seules, en couple ou des familles avec enfants vivent ici à l’année. Des gens meurent et d’autres naissent à l’ashram. C’est un village.

    Je suis tout de même surprise par le nombre de français qui séjournent ici, quelques jours mois ou années… je me dis que les années 70 n’ont pas totalement disparu dans l’esprit de certains car la majorité a clairement connu le flower power.

    J’arrive à mon petit logement, il est spartiate mais propre et lumineux : un matelas par terre dans le séjour et une salle de bain. Il n’en faut pas plus pour un séjour minimaliste.

    Puis 17h sonne, c’est l’heure à laquelle tout le monde se réunit dans l’immense hall temple pour les enseignements (témoignages), la méditation et les bhajans (chants dévotionnels). Plus de 1 000 personnes sont assises dans un silence à peine troublé par les chuchotements. On sent une ferveur monter doucement. Certains sont déjà en état méditatif, d’autres lisent les enseignements d’Amma. Puis, comme une vague, tous se lèvent et le silence se fait total. Au loin, j’aperçois une petite silhouette blanche avancer précédée et suivie par d’autres personnes vêtues de blanc ou de orange. Les mains se joignent devant la poitrine puis au-dessus de la tête en signe de salut dévotionnel.

    C’est elle. La petite fille devenue déesse vivante. La guru que tous sont venus enlacer, moi y compris.

    Pendant un long moment, des sœurs se succèdent pour parler de leur rencontre avec Amma et de leur dévotion. Cette première partie est un hymne à l’aura et à l’action d’Amma. Puis viennent les chants, conduits par Amma elle-même et rythmés par des dévots musiciens.

    Puis c’est l’heure du darshan. Ce moment tant attendu, tant convoité, cette lumière dans une journée ou dans une vie. Cette expérience souhaitée par tant de gens souhaitant accéder à l’Amour sans limite.

    "Vasudhaivakutumbakam", est un terme et un idéal indien qui signifie que le monde entier est une famille. C’est ce que prône la philosophie d’Amma. Elle dit que sa religion c’est l’Amour et qu’il est le socle du Monde.

    Sur la scène se déroule alors le défilé des gens ayant obtenu ce soir là le « token », c’est à dire le sesame pour avoir le droit et l’immense privilège d’aller se lover dans les bras d’Amma. Ce soir là, elle embrassera les gens jusqu’à minuit passé.
    Reine de la ruche, des dizaines de nonnes s’activent autour d’Amma comme des abeilles : lui mettre des chaussettes, lui mettre un coussin dans le dos, lui donner à boire, récupérer les offrandes qu’elle tend nonchalamment, répondre à ses demandes… les câlins semblent s’enchaîner sans âme… ce à quoi j’assiste est loin de ce que je m’étais imaginé.

    Quiconque s’approche d’Amma s’agenouille et s’incline au sol comme pour lui baiser les pieds. On embrasse même le sol qu’elle a foulé. Tous ces gestes et ces attitudes évoquent un fort culte de la personnalité… Même si cette dimension spirituelle est culturellement très différente en Inde, je ne peux m’empêcher de me dire : est-ce ça la spiritualité ?

    Les photos étant interdites au sein de l’ashram, voici des photos de l’extérieur bien plus beau.

    La suite au prochain darshan…
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