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  • Day 36

    Bienvenue au(x) village(s) des curieux

    April 15, 2019 in Nepal ⋅ ☀️ 30 °C

    Voilà 2 nuits que je campe. Cela m'a fait découvrir que la curiosité des Népalais n'a pas de limites...

    Le premier soir, cherchant un endroit où poser ma tente, je bifurque depuis l'autoroute vers une petite route (piste). J'ai beau rouler, il y a des bicoques partout. C'est rural mais densément habité. Voyant un petit chemin qui part dans les champs, je m'apprête à tourner. Mais face au regard perplexe de femmes assises là, je préfère, par politesse, les saluer et vérifier si ça ne gêne pas que j'aille dormir par là. Erreur !
    C'est finalement un gars qui me dit de poser ma tente pas loin, mais je suis repérée... Toutes ces femmes, leurs enfants, leurs maris, en fait, tous les gens du coin débarquent peu à peu alors que j'installe ma tente. Je reste un moment, essayant de communiquer, mais personne ne parle anglais, moi toujours pas plus de 5 mots de népalais, 15 ou 20 d'hindi... Fatiguée et gênée face à ces regards fixés sur moi mais sans échanges, je finis par expliquer (même s'il n'est que 17h30, mais comment trouver du repos autrement?) que je vais dormir et lance un bye bye, avant de me calfeutrer dans ma tente. Chaleur terrible, j'étouffe.
    Mais j'entends qu'il y a toujours du monde et n'ai plus envie de ressortir pour être le clou (clown?) du spectacle... Rien n'y fait, les heures passent mais beaucoup restent là, débattent de mon cas... Je saisis au vol les mots "eau", "légumes","shower" et suppose qu'ils débattent de savoir ce qu'il convient de faire pour m'aider. C'est gentil, mais résultat j'aurai eu droit à une assemblée muette face à moi, bruyante le reste du temps et au final pas tres "helpful". Un gars (avec une petite bedaine moulée dans un marcel "Snoopy" et de belles dents du bonheur) m'a juste demandé si j'aimais le coca, j'ai dit oui, il m'a alors ramené... du Redbull (?).

    Le reste de la soirée/ nuit : le conciliabule (notamment des femmes) se poursuit, puis c'est une techno indienne qui prend le relais toute la nuit (en lien avec la nouvelle année sans doute). Dès 4h30 le manège recommence, des gens viennent et parlent fort juste à côté de ma tente... Le matin, je ne suis jamais préparée aussi vite pour tenter d'échapper à cette attention oppressante. C'est raté.. Dès que je sors, du monde attend déjà. Je prends mon petit dej devant une quarantaine de personnes, qui commentent tous mes faits et gestes. Je sors mon réchaud : "Oh ! Gas !", mon porridge : "Oh ! Indian breakfast!", mon eau : "Pani, pani", mes allumettes humides ne marchent pas, alors un bruissement excité parcourt l'assemblée : "Lighter, lighter!". Mais personne ne bouge pour intervenir. Je fais un tour à une échoppe et reviens avec un briquet. Tout le monde me suit des yeux, attendant avec excitation l'épisode suivant... Hilarité générale lorsque je me brosse les dents. Soupir... Même si je suis de meilleure humeur le matin et qu'il y pas de mauvaise intention à leur attention, c’est fatiguant...
    Un jeune homme qui parlait anglais et à qui j'explique la difficulté me dit "but it's because they have never seen this. They are full of respect !" Hum... les enfants qui s'amusaient à secouer ma tente alors que j'étais dedans étaient-ils vraiment "full of respect"?!
    Au moment de partir, une petite fille me dit, très enthousiaste, "Come back anytime!" Elle ne se rend pas compte que pour moi c'était dur...
    Je pense que le concept de voyage en solitaire n'est pas compréhensible par les Népalais des villages, qui vivent en communauté et apparemment jamais seuls et dans le calme.

    Le second soir, je prends mes précautions en choisissant un endroit vraiment paumé, près d'une rivière. Et en ciblant une seule maison pas loin. (C'est New year's Eve pour de bon, pas envie de me faire emmerder par des gens éméchés). J'ai quand même eu le droit à une bande de jeunes étudiants de la madrasa, plantés à 1 m, pendant que je cuisinais. Moins patiente et les trouvant moins sympathiques, j'ai davantage osé les chasser... (Cela m'a pris 15/30 min, ils restaient accrochés, prenant des photos, faisaient mine de partir, pour revenir par un autre côté !). Je n'ai plus eu comme spectatrice qu'une petite fille, à la fois curieuse et timide. Chaque fois que je lui demandais son nom elle reculait de quelques mètres, puis revenait. Elle a finit par me le dire ! Isenke :)
    Des 4h30, la famille était active (et bruyante). Toutes les générations vivant là, j'ai été réveillée par des sortes d'étouffements/ crachats du grand père. Mais je ne peux pas me plaindre, alors que c'est moi qui m'installe près de chez eux !

    Entre ces nuits épiques, je suis la plate et droite "Highway 1" et roule mes 60 à 80 km par jour. C'est monotone, il fait très chaud et je commence à être malade. Du coup le soir ce sera repos à l'hôtel, indispensable après 2 nuits courtes et sans douche.
    Les paysages sont les mêmes depuis que je suis descendue des montagnes : champs de blés, orge, rizières. Passage à travers de nombreuses villes sans trop d'âme ni d'intérêt. Traversées par la highway, elles offrent parfois un "bazar central" pour les plus importantes. Beaucoup de déchets, de poussière. Entre ces villes, des villages sommaires (des toit en ossature bambou, des murs avec de la bouse de vache, comme en Inde). De temps en temps, un petit temple. Depuis 2 jours je vois plus de mosquées et ressens l'influence indienne : le dhal bhat est devenu "puri", on trouve des "indian sweets" et les gens n'ont pas l'air surpris par mes quelques mots d'hindi. L'appel à la prière "Allahou Akbar" s'est ajouté aux bruits de mes nuits.
    Hum... ai-je le droit de dire que je ressens aussi cette influence par les épisodes surréalistement absurdes qui me rappellent ma vie passée là-bas? Le gars qui a affiché "hôtel" sur sa devanture mais qui ouvre de grands yeux quand tu lui demandes une chambre : "No, not possible". Les gens qui te disent que c'est impossible de trouver du papier toilette dans la ville, tu vas dans la boutique à coté et.. tu en trouves. D'autres à qui tu montres ta carte postale timbrée en demandant s'il y a un "post office", et qui te tournent le dos en rigolant car ils ne comprennent pas... Un restau qui te dit qu'il a du fresh fruit juice et qui te ramène... encore du Redbull (?). Un autre à qui tu demandes s'ils ont des glaces, qui te dit oui. 5 min après, c'est non. Haha. Crazy Nepal, pas que Crazy India.

    Choquée de voir que le Lonely planet ne mentionnait aucune des villes que j'allais traverser, et pensant que j'allais découvrir des pépites insoupçonnées, je me suis en fait... ralliée à leur opinion. Le long de cette highway et à l'est du Népal (en dehors des montagnes plus au Nord), il n'y a pas grand chose à voir . Mais après l'hôtel à Inaruwa, il ne me restera plus que 105 km avant la frontière. J'en ai fait plus de 350 ! Il faut juste que je vérifie si elle est ouverte, elle était apparemment fermée pendant les élections en Inde.
    (https://edition.cnn.com/videos/world/2019/04/12…)
    Le seul contact "warm showers" (sorte de couchsurfing pour les voyageurs à vélo) de l'est du Népal ne m'a pas répondu mais j'ai rencontré dans un petit restaurant un Népalais qui parle très bien anglais, marié à une ukrainienne, et qui m'a invité dans sa ferme en Inde, juste de l'autre côté de la frontière... A suivre.
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