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  • Day 114

    J114, km 2’345, Potts River

    February 5, 2023 in New Zealand ⋅ 🌧 21 °C

    Au lendemain de notre jour de repos à Methven,
    nous partirons en navette/minibus pour atteindre le début du trail à Glenrock station. Cette section est divisée en deux parties: 3 jours pour atteindre la large rivière Rangitata, puis 4 jours pour atteindre Lake Tekapo. Entre ces deux parties, se trouve donc la rivière en tresses susnommée dont les bras séparent les deux côtés de la vallée sur une largeur d’environ 10 km.
    Les jours avant d’entamer cette section auront été ponctués de nombreuses recherches et discussions entre nous deux et avec les autres marcheurs pour répondre à une question simple: va-t-on tenter ou non la traversée à pied de cette vaste et sauvage rivière. Les notes officielles du TA indiquent que le trail s’arrête sur la première rive, et reprend de l’autre côté. Il s’agit donc à nouveau, comme pour la rivière Raikaia qu’on a contourné en minibus en passant par Methven, d’un obstacle considéré comme « natural hazard zone » (zone de danger naturel). Sauf que cette fois le détour est de 140 km, et que les notes précisent également que des personnes adultes et expérimentées peuvent, lors de conditions favorables (basses eaux), effectuer le passage à gué des bras successifs de cette rivière.
    Nous avons croisé plusieurs « NOBO » (« North bounders », des personnes qui marchent le TA du Sud au Nord) récemment qui nous ont indiqué avoir pu faire cette traversée sans soucis majeurs. On prévoit ainsi, au départ de Methven, de le faire si les conditions météo et hydrologiques le permettent. A cette fin on s’organise avec Daniel et Katharina, un couple d’allemands qu’on vient de retrouver par hasard alors qu’on avait sympathisé sur l’île du Nord, partagé quelques restos et parcouru de nombreuses sections ensemble. Le plan est qu’ils se fassent transmettre sur leur appareil GPS (on n’aura pas de réseau) les dernières informations nous permettant de décider de traverser ou non: le débit de la rivière, publié en ligne automatiquement chaque heure, et la météo en amont du bassin versant (pleut-il ou non).

    Juste avant notre départ de Methven, on apprend par Instagram une nouvelle qui nous incitera pour le moins à être prudent: une fille que l’on connaît pour avoir notamment descendu avec elle la Whanganui River en canoë, a dû être secourue par hélicoptère le jour précédent, alors qu’elle tentait justement la traversée de la Rangitata. Elle a pu franchir sans encombre les 15 premiers bras de rivière, mais comme de forts orages se déroulaient en amont, le niveau est rapidement monté, et lors de sa tentative de passer le dernier bras de rivière, elle a chuté et s’est fait emporter. Heureusement, elle arrivera à flotter sur son sac et regagner le bord. Elle perdra au passage sa tente, ses bâtons, et sa bouteille de filtration d’eau. En voulant faire machine arrière et revenir sur la rive de départ, elle fera le constat que le niveau d’eau est déjà trop haut. Elle se retrouvera ainsi coincée sur un îlot de gravier sans autre choix que d’appeler les secours par son PLB (« personal locator beacon », appareil d’urgence GPS/satellite). Un hélicoptère viendra la sauver 45 minutes plus tard.
    Cette histoire sera riche en enseignements pour la communauté: ne pas franchir de telles zones seul, se renseigner sur la météo en amont lorsque le franchissement dure 3 heures, et avoir sur soi un PLB (ce que nous avons, merci Guillaume pour le prêt!). A la décharge de cette pauvre randonneuse qui en est ressortie choquée, le débit de la rivière est passé de 55 à 150 m3/s en seulement deux heures, et son père lui avait envoyé les dernières données de débit par satellite! Ce débit montera encore à plus de 300 m3/s le lendemain, puis excédera encore les 400 m3/s les jours suivants. Pour comparaison, le débit moyen du Rhône à Genève est de 250 m3/s…

    Mais revenons au début de notre section. Après 1h15 de minibus, on partira en fin de matinée dans un massif sauvage, aride, couvert d’éboulis et de végétation basse : bush, herbes hautes / tussock, et gorse / divers types de plantes épineuses qui nous lacèrent fréquemment les jambes. Le deuxième jour on remontera la Hakatere River sur plusieurs kilomètres en marchant sur ses berges et dans son lit. On la franchira pas moins de 68 fois en quelques heures!

    Les paysages sont grandioses, sans forêt à l’horizon, juste des montagnes, souvent pelées, et de larges vallées. On se croirait dans le Rohan du Seigneur des Anneaux, ou carrément dans un western. Le temps est magnifique avec de la chaleur et un grand soleil.

    Après une nuit agitée avec des vents violents qui nous réveilleront en sursaut à plusieurs reprises, nous repartons dans des vallées d’herbes brunes et hautes, toujours accompagnés d’un vent soutenu.
    La pluie, que nous aurons vu les trois jours au loin dans le bassin versant de la Rangitata, finira par nous arroser en fin de la troisième journée. Nous recevrons en parallèle par satellite les nouvelles que nous attendions: les pluies battent leur plein en amont de la Rangitata (72 mm/j!), et le débit reste très élevé. Au moins cela facilite notre choix. Ou plutôt il s’agit alors d’un non-choix: impossible de traverser la rivière, et nous ne savons pas combien de jours nous devrions attendre pour pouvoir le faire. Toujours par satellite, Daniel organise ainsi une navette / un minibus pour nous permettre de faire le détour par la route, comme prévu « officiellement » par le trail. On verra encore avant de partir le Mt Sunday, qui a été filmé dans le Seigneur des Anneaux ; il s’agit de la cité d’Edoras, la capitale du Rohan! Nous sommes donc allés dans la ville de Geraldine, hors-trail, pour la nuit, et sommes remontés le lendemain sur l’autre rive de la Rangitata pour reprendre le sentier.

    Voici les étapes réalisées depuis Lake Coleridge :
    - km 2’292 Comyns Hut
    - km 2’313 Manuka Hut
    - km 2’345 Potts River
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