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- Päivä 13
- torstai 30. lokakuuta 2025 klo 23.36
- 🌧 17 °C
- Korkeus: 1 300 m
NepalKatmandou27°42’4” N 85°21’6” E
J11. Katmandou, dernier jour
30. lokakuuta, Nepal ⋅ 🌧 17 °C
"Bouge ta caisse mec! Tu vois bien que je peux pas passer!
- mais je peux pas plus, je suis contre le mur!
- hey, dis-lui d'avancer son tas de boue, je peux pas bouger, je vais racler le rétro!"
"Euh... on va peut-être descendre et puis y aller à pied, non? C'est plus très loin.
- tu parles, on peut même pas ouvrir les portes, c'est trop étroit!
- putain, j'en peux plus, j'ai chaud, j'ai un truc qui me coule dans la chaussure!
- ouais il fait chaud, on est serrés sa mère à l'arrière, je vais faire un malaise vagal!"
Voilà, lecteur immergé. Tu viens de passer 30 secondes avec nous dans la voiture du dernier taxi, ce soir, en route vers l'hôtel. Il est 17h36. On rentre de Pashupatinath, le complexe/temple funéraire.
La nuit est tombée, nous sommes trempés et entassés dans un petit taxi qui s'enfonce dans des ruelles de plus en plus étroites, les bas-fonds de Katmandou, à la recherche du Kusum Airport Hotel.
Le chauffeur qui nous a pris nous a dit qu'il connaissait le lieu, mais il s'est trompé d'hôtel : il y a le Royal Kusum et le Kusum Airport.
Il suit donc les instructions d'Olivier qui se trouve à la place du mort, avec une carte Google Maps hors ligne et qui le guide. Nous quittons les avenues encombrées pour des rues engorgées, entre les piétons, les motos, et les autres voitures qui klaxonnent à tout va pour se signaler.
Le pare-brise et les vitres du véhicule sont couverts de buée, la température monte dans l'habitacle, l'esprit du chauffeur népalais s'échauffe un instant puis se calme aussi rapidement alors qu'il sort de son véhicule pour laisser la place à un habitant du quartier qui va se charger de manœuvrer sa voiture et la faire passer dans ce trou de souris, entre une autre voiture et le mur d'en face. On rabat le rétroviseur, le nouveau conducteur monte le moteur en sur-régime pour avoir plus de précision dans la manœuvre et avance par à-coups sous les yeux de notre chauffeur, puis parvient à faire passer la voiture sans toucher ni à droite ni à gauche.
Nous sommes enfin déposés quelques minutes plus tard à notre hôtel, sains et saufs.
La journée n'avait pas bien commencé de toute façon : déjà, au réveil, on entend la pluie battre le toit. Un rapide coup d'œil par la fenêtre nous indique que le ciel est ultra bouché et rien ne présage d'une éclaircie dans la journée, malgré nos applications météo qui nous assurent le contraire. La journée va donc être humide et morne malgré les visites.
Au petit-déjeuner, on nous porte des verres d'eau chaude. Ce n'est pas la première fois que je vois ça dans un pays asiatique, ça m'a toujours surpris. Puis les différents plats arrivent au fur et à mesure. Nous sommes deux à avoir demandé un muffin. Il n'y en a pas. On a un demi faux-croissant à la place. Et puis un verre de jus de fruits "frais". Et puis un bol de fruits frais coupés.
Dans l'idée, c'est bien. Mais nous avons développé une certaine phobie à la tourista depuis le début du séjour, phobie mesurée mais indispensable - crois-moi, lecteur incrédule, j'ai eu de multiples occasions de m'en apercevoir au cours de précédents voyages - aussi nous évitons tout ce qui peut être de près ou de loin en contact avec l'eau non minérale, c'est à dire les fruits non pelés, tout ce qui est cru, et même le couteau qui a coupé des fruits non pelés.
Donc pour le jus de fruits, c'est non (mais Olivier se propose gentiment de boire celui d'Hervé, par pure compassion), et pour les fruits coupés, c'est non, pour trois d'entre nous.
" ah ben si vous les voulez pas, je peux les prendre!" Olive vole à notre rescousse, une fois de plus. Lui n'a jamais été malade en voyage. Pour lui, la tourista n'est qu'une légende urbaine. Ça se voit que ce n'est pas lui qui a passé une bonne partie d'une nuit la tête dans la cuvette, dans un train indien, il y a quelques années !
Il est près de 8h, tout est calme dans l'hôtel. En remontant dans les chambres nous préparer, Hervé est pris d'une soudaine toux extrêmement sonore et se met à déblatérer du yaourt franco-népalais du meilleur effet pour réveiller nos voisins qui ont fait un vacarme insupportable hier soir. Un vrai vaudeville, avec éclats de voix et portes qui claquent. On a cru qu'on partageait l'étage avec Labiche et Feydeau. Puis chacun rentre dans sa chambre et nous claquons la porte 3 ou 4 fois de suite, pour faire bonne mesure.
Une fois dehors, la priorité est de trouver de quoi se protéger des gouttes. Nous alpagons un chauffeur de taxi qui accepte de nous amener à notre premier point de visite, le Monastère de Kopan. Il nous arrête en cours de route devant une boutique qui vend des parapluies.
Nous aimerions le garder pour la journée, mais lorsque je lui demande, malgré son oui, il insiste pour que je le paye pour cette première course. Je comprends qu'il ne sera pas là lorsque nous reviendrons.
Le monastère de Kopan est magnifique. Il doit l'être tellement plus par beau temps ! Mais le ciel est bas, gris et sombre, et cette pluie n'en finit pas. Nous faisons un rapide tour des jardins et des bâtiments, puis nous nous rendons dans la grande salle de prière où une quarantaine de jeunes moines sont assis sur d'épais tapis de sol et semblent en plein examen, ou du moins travail écrit. D'autres moines plus âgés, probablement les enseignants, marchent dans les rangées, les surveillant et parfois les aidant.
Comme dans tous les monastères bouddhistes, à l'intérieur, du sol au plafond en passant par les colonnes, tout est multicolore avec une dominante de rouge. Des symboles bouddhiques et des portraits d'anciens lamas ornent les murs.
Ici, au fond, un énorme Bouddha à la tête encerclée d'une auréole lumineuse surveille les humains avec bienveillance. Devant lui, deux portraits du Dalaï-lama actuel et d'un autre guide, découpés et en taille réelle, font face aux étudiants. L'effet est surprenant : si l'on n'y prête pas attention, on croirait vraiment qu'ils sont présents!
Nous y passons une bonne grosse vingtaine de minutes à shooter des centaines de photos depuis l'entrée.
Un désaccord mineur sur le choix du taxi, en raison du prix demandé, nous force à descendre à pied de la colline du monastère, sous une pluie légère mais persistante. Au risque de me répéter, encore et toujours, je trouve insupportable de me faire prendre pour une vache à lait systématiquement, d'autant plus que nous avons téléchargé une application de taxi qui nous informe de la vraie valeur des courses. Ok pour payer un prix touriste, mais pas 10 fois plus cher (véridique) comme ce qu'on nous a demandé à l'aéroport !
Nous faisons une pause dans une boutique dont la petite vendeuse accepte de nous commander un taxi depuis son téléphone. Olive en a plein les bottes, ou plutôt les baskets, qu'il a choisies de mettre ce matin plutôt que ses chaussures de randonnée, comme nous pensions que la pluie s'arrêterait rapidement.
Le taxi suivant nous conduit au stupa de Bodanath, le plus grand du monde asiatique, avec son imposante coupole blanche surmontée d'un toit doré et des yeux de Bouddha peints aux quatre points cardinaux. Nous évoluons dans un véhicule aux vitres qui semblent floutées, mais ce n'est qu'une illusion : c'est juste la buée. Jamais aucune ventilation dans leurs voitures, et les essuie-glaces sont commandés au coup par coup. Peut-être pour nous éviter de voir le danger quand ils conduisent, pensons-nous...
Sans soleil, c'est vraiment pas pareil. Le stupa est aussi majestueux, mais sous la pluie, la magie n'opère pas, ou beaucoup moins en tout cas. Le sol est détrempé, comme les bâches des boutiques autour du monument. Les couleurs que l'on voit ne sont plus celles des drapeaux flottant dans l'air et libérant les prières qui sont inscrites dessus. Aujourd'hui, ils sont collés entre eux et alourdis de pluie. Non. Les seules couleurs que l'on voit sont celles des parapluies des quelques visiteurs et moines qui tournent inlassablement autour du stupa en activant les moulins à prière.
On fait encore le plein de bracelets. C'est insensé, c'est même indécent d'acheter autant de breloques. On n'aura jamais assez de bras pour les porter.
Puis on s'arrête dans un restaurant japonais qui ne paye pas de mine, mais on se retrouve en rooftop avec une vue directe sur le stupa, c'est magnifique, même sous la pluie. La table n'est pas assez grande pour contenir tous les plats qu'on nous porte. Ce n'est pas que nous mangeons plus que de raison, mais nous commandons souvent des "sets" c'est-à-dire des menus complets avec de nombreux petits plats contenant chacun un aliment différent. Aujourd'hui, c'est teriyaki.
On n'en peux plus, on a la panse pleine, et on oublie l'espace d'un moment cette pluie qui lessive tout autour de nous.
Étape suivante : Pashupatinath, le complexe funéraire. Un incontournable pour qui visite Katmandou pour la première fois, avec ses ghats de crémation. Le lieu n'a pas trop changé depuis 2 ans, toujours sale, voire sordide, et néanmoins empreint d'une certaine religiosité, hérissé de ses multiples templions et stupas à moitié délabrés sur la partie haute, et bien sûr ses ghats de crémation le long de la rivière Bagmati, bien plus gonflée par les pluies de mousson que le mince filet d'eau putride qui coulait lors du dernier voyage.
Avec cette pluie, on n'imagine pas une seconde que des crémations puissent avoir lieu aujourd'hui. Et pourtant...
Un ghat, c'est une jetée de forme ronde ou octogonale sur laquelle on pose le bûcher et le corps à brûler. Lorsque la crémation est complète, on ne sait pas trop si les cendres et les restes sont poussés dans la rivière d'un coup de balai ou si tout est récupéré.
Il y a 2 ans nous avons néanmoins vu des gens qui semblaient chercher des choses après les crémations au pied des ghats, dans les boues de la rivière asséchée, avec de longues perches.
Aujourd'hui un ghat couvert, destiné à une famille plus aisée, semble-t-il, est utilisé sur la partie aval de la rivière, et un autre non couvert également, en amont, de l'autre côté du petit pont. Deux corps recouverts de draps et de couronnes de fleurs orange sont déposés au sol, en attente.
Le lieu, la symbolique, la météo, tout concourt à rendre ce moment tristement mémorable pour Hervé et Nath. Et ça tombe bien, c'est l'anniversaire d'Hervé ! Mais les singes du temple n'en ont cure. C'est un féroce combat de race auquel nous assistons : les chiens contre les singes.
Les chiens errants du temple se déplacent en meute pour courir après les singes, provoquant une panique agressive chez ces derniers. Eux qui passent déjà la moitié de leur temps à se chercher des poux, c'est le cas de le dire, ils ont là matière à s'enflammer. Leur survie en dépend.
Près du petit pont qui enjambe la Bagmati, je suis en train de faire des photos de la crémation lorsque trois chiens déboulent en aboyant derrière moi, me bousculent et filent comme l'éclair à la poursuite de deux singes qui volent sur le muret de pierre le long de la rivière avant de se jeter sur un pylône et de grimper au plus haut. Les chiens restent impuissants autour du poteau, aboyant en vain, le regard vissé sur les singes.
Olive est sur le pont en train de faire d'autres photos, Nath et Hervé un peu plus loin sur les escaliers. Tout va très vite : d'un saut élastique à faire pâlir les meilleurs athlètes du cirque Pinder, les deux singes se sont envolés du pylône pour atterrir hors de portée des chiens. Ceux-ci, comprenant que cette bataille est perdue, rebroussent chemin, me foncent dessus comme si j'étais transparent, m'évitent au dernier moment et reprennent le pont dans le sens inverse. Ils sont en train de se regrouper avec le reste de la meute.
Olivier, inconscient du danger, continue son shooting. Un sentiment de panique se répand alors et grossit rapidement parmi les macaques. Les mères raflent leurs petits d'un geste rapide et les calent de nouveau sous leurs ventres tandis que les mâles essaient de faire barrière en hurlant, hystériques.
Les chiens attaquent.
Le front avance rapidement et les singes n'ont qu'une option : utiliser leur nombre en leur faveur.
Une centaine de singes venant de toutes parts se regroupent soudainement de l'autre côté du pont, tentant de faire face à l'attaque des chiens mais rien n'y fait.
L'air est électrique. Au loin, les nuages noirs s'amoncellent, zébrés d'éclairs. L'orage gronde. Et c'est le deuxième mouvement de panique chez les macaques : les forces s'inversent, ils doivent fuir. La nuée se rabat donc de notre côté du pont, en une vague ininterrompue qui crie et hurle en furie pour sauver sa peau.
Je n'ai pas le temps d'attraper ma caméra pour filmer la scène, le flot de bêtes est impressionnant de rapidité. Une vague, une multitude qui se répand sur tous les supports possibles : murets, pylônes, câbles électriques, et avance à la vitesse de l'éclair comme un seul être en panique. Et Olivier se trouve en son centre.
Je ne comprends pas de suite ce qui se passe, nous nous regardons, interdits, avec Nath et Hervé. Puis derrière les singes courent les chiens. Féroces, enragés, les babines luisantes de bave, à la poursuite de leurs proies, rendus fous par l'instinct de chasse.
Après la première vague de singes, le pont subit la deuxième vague de chiens. Olivier, qui avait été pris de cours avec les singes, tente de s'extraire de ce corps mouvant mais ne peut lutter. Je le vois se faire renverser du pont et chuter la tête la première dans la Bagmati. L'horreur.
Par chance, son appareil est resté intact, au sol.
La nuée de singes, désormais hors d'atteinte, se disperse de nouveau un peu plus loin dans les escaliers, tandis que l'élan canin se rompt à mesure que chaque individu se désolidarise de la meute dans une poursuite veine de quelques singes perdus.
Tout n'a duré que quelques dizaines de secondes mais le choc, la commotion sont indescriptibles parmi les spectateurs. Je m'effondre à terre, vomissant profusément. Nathalie est en crise de nouveau, fermement maintenue au sol par Hervé, un genou dans son dos, hurlant : "D'la beuh! Faut d'la beuh!"
Je me relève et j'appelle Olivier. Introuvable. Les eaux sombres de la Bagmati sont impénétrables.
"Olive? OLIVE? Vous avez vu Olivier? Mais enfin, il est bien quelque part !"
On le retrouvera quelques instants plus tard sur les bords de la Bagmati, trempé, souillé, mais vivant, une vieille poche plastique sur la tête et une paille funéraire dans la bouche, qui lui aura permis de respirer sous l'eau.
Nous sommes au final tous sains et saufs.
Bon.
Je dois t'avouer quelque chose, mais tu t'en doutes déjà, lecteur sagace.
J'ai un tantinet augmenté la réalité. Je me suis laissé emporter, pour ce dernier rapport, et je m'en veux.
Évidemment Olivier n'est pas tombé dans la Bagmati, Hervé a finalement trouvé de la beuh pour Nathalie, et je n'ai pas vomi profusément. Je vais très bien, merci.
Je suis désolé, je viens encore de broder. C'est plus fort que moi.
Nathalie n'a eu nul besoin de cannabis. C'est une personne calme et équilibrée qui n'a besoin que du bonheur d'être en vie pour être heureuse.
Mais le combat entre chiens et singes a vraiment eu lieu et c'était vraiment très impressionnant. Je crois que je n'avais jamais vu autant de singes à la fois courir dans une seule et même direction, véritablement comme un seul être, un peu comme les nuées d'oiseaux dans le ciel.
Il pleut toujours.
On n'en peut plus, la pluie a eu raison de nous. Nous avons pu faire toutes les visites que nous avions prévues, c'est déjà ça.
On fait quelques achats de dernière minute, oui, il en reste encore, et nous prenons un taxi. Ce taxi-même qui finit par se perdre dans les bas-fonds de Katmandou.
Ce soir, pour fêter l'anniversaire d'Hervé, après tant d'émotions, ce sont eux qui nous invitent. On décide d'aller manger au restaurant de l'hôtel d'à-côté, l'herbe est toujours plus verte ailleurs.
Le cadre est somptueux, tout en boiseries et en arabesques. Mais encore tenu par des stagiaires. On est dans le pays de Jean-Michel À-Peu-Près. Les serveurs, encore une fois, ont du mal à comprendre et à s'exprimer en anglais, de sorte que je tente de nous faire comprendre en utilisant Google trad en népalais. Et même là, je ne suis pas sûr du résultat car il fait une drôle de tête en lisant la traduction. Mais nous finissons par avoir ce que nous voulons au moment où nous le voulons.
Nous terminons ce voyage par un repas convivial entre amis parmi des Népalais qui mangent leurs thali sets à pleines mains. Un peu écœurant, mais cela ne nous gâche définitivement pas le plaisir d'être ensemble et d'avoir vécu un périple inoubliable.
Et la pluie tombe, encore et toujours...Lue lisää

























