Satellite
Show on map
  • Day 37

    Sevā ça vient…

    February 18, 2023 in India ⋅ 🌙 24 °C

    Durant mon séjour au sein de l’ashram, je souhaitais faire l’expérience du sevā, travail désintéressé au service et dans l’intérêt de la société.

    Malheureusement, il m’a été indiqué qu’il était préférable de rester plus longtemps pour pouvoir prétendre à un sevā, en cause, j’imagine, l’organisation des plannings.

    Ce souhait restait donc inachevé. Je ne connaîtrais pas cette fois, ni peut-être même jamais, le sevā au sein d’un ashram.

    Puis, assise sur un banc ce soir, j’ai réalisé que je pratiquais déjà le sevā de manière régulière en France, lors de l’organisation des événements portés par mes collectifs. Environnement ou santé, prévention, sensibilisation, protection, ce que je fais déjà est un sevā. La seule différence, c’est qu’il n’est pas réduit à un ashram.

    Alors que je me rassurais de n’avoir rien raté de cette expérience du service désintéressé et dévoué à une cause, j’ai été approchée par une femme en fauteuil roulant visiblement handicapée des 4 membres. Celle-ci m’a alors demandée de l’aider à ajuster son coussin, ouvrir sa bouteille d’eau, lui donner à boire, la redresser, l’attacher… puis elle s’en est allée en m’adressant ses sincères remerciements.

    À peine 5 minutes après cet échange, un homme s’est approché de moi en me cherchant du regard, il a marmonné
    « can you help me ? » en me montrant une carte avec sa photo sur laquelle était inscrit « blind » (aveugle). Il m’a alors demandé de lui indiquer où trouver de l’eau. Je l’ai fait s’assoir et lui ai demandé s’il souhaitait que j’aille lui en chercher. Ne parlant pas un anglais très avancé, il a tout de même compris que j’allais m’occuper de lui apporter cette eau qu’il pourrait difficilement trouver seul en pleins bhajans d’Amma (tout le monde étant focalisé sur les chants).
    Nous avons échangé nos prénoms, il a posé sa main sur son cœur en guise de reconnaissance et a englouti le verre d’eau. Je me suis demandée depuis combien de temps il attendait pour pouvoir se désaltérer, s’il avait demandé à d’autres personnes trop concentrées sur Amma pour se concentrer sur sa soif et l’apaiser.

    Quelques minutes après, il s’est approché du banc sur lequel j’étais, m’a retrouvée alors qu’il faisait presque nuit, et m’a adressé un Namasté d’adieu plein de reconnaissance. Troublante expérience.

    Sans le chercher, le sevā est finalement venu à moi a 2 reprises ce soir, à quelques minutes d’intervalle.
    C’est cela que je considère comme de la spiritualité. Croire en ces rencontres et en ces moments inattendus qui ponctuent notre chemin et nous délivrent un message.

    À la veille de mon départ de l’ashram, je ne peux que m’interroger sur mon ressenti :
    suis-je une impie ou une squatteuse de foi de ne pas être touchée par la grâce d’Amma ? Suis-je trop terre à terre alors que je me croyais sensible et légitime de fouler le sol de ce lieu ?
    Est-ce normal de ne pas ressentir la dévotion dont tous ici semblent emplis ?

    Je vois de nombreuses caricatures, des dévotes apprêtées, décolletées et manucurées, des dévots semblant sortir d’un camion benne… Certaines attitudes me troublent aussi, l’égocentrisme semble en étouffer certains alors que le lieu est censé être pleinement tourné vers l’autre. Le Monde étant une grande famille selon la philosophie de l’ashram mais l’ego reste visiblement un refuge pour certains.

    Altruiste mais pas humaniste, telle est ma sensibilité… à tort ou à raison ? Cette question, comme bien d’autres ce soir, reste en suspend !
    Read more