Satellite
Show on map
  • Day 150

    Déluge à Petroporos et Trikala

    September 4, 2023 in Greece ⋅ 🌧 19 °C

    Les deux nuits (lundi et mardi) passées à Petroporos furent agitées. Nous étions pourtant au calme dans un tout petit village, abrités par l'auvent de l'église. Mais c'est la pluie continue et surtout, les éclairs si fréquents accompagnés de coups de tonnerre assourdissants ⛈️⛈️⛈️ qui nous tenaient éveillés.
    Au départ, on se disait "tiens, c'est un temps breton". Mais là, pas d'éclaircies en vu, la pluie est constante, parfois très forte.

    Mardi : le matin, on replie notre campement et on file en direction du café le plus proche. La distance qui nous sépare est de 400m environ et pourtant, c'est la mission pour y aller car l'eau est déjà pas mal monté.

    La serveuse parle peu anglais mais on arrive à se faire comprendre. C'est elle qui nous a confirmé hier que c'était ok de camper sous le toit de l'église. Alors elle nous reconnaît ! On sait qu'on ne pourra pas rouler, surtout que le projet dans lequel on voulait aller, près de Larissa, à finement refusé qu'on vienne dans les prochains jours. En effet, ils fonctionnent principalement au solaire et là, il faut avouer que ça ne risque pas de marcher....

    Donc nous savons que nous avons la journée à passer au café, heureusement nous avons de quoi nous occuper ! Le blog n'a pas été écrit depuis longtemps, il faut organiser la suite du trajet en Turquie et faire des plans pour l'hiver. Et puis, on a toujours des livres, nos carnets de voyage et même des mots croisés, on se dit qu'on a de quoi tenir quelques jours avec tout ça (on ne savait pas encore qu'on allait y passer un certain temps!).

    Le petit souci c'est que comme on pensait arriver aujourd'hui dans un projet collectif, on a très peu de vivres (à part les petits déj avec notre super confiture de figures faite dans les météores !). Heureusement, le café fait un peu à manger, pas de menu mais on pointe les plats des autres "on voudrait les mêmes !". C'est simple mais bon, on est contents, et encore plus quand un habitant (serait-ce le patron du café?) nous offre le repas. Et même une glace !

    Les habitants (que des hommes) arrivent au compte goutte et s'installe au bar, c'est le point de rassemblement. Ça boit du café frappé, ça fume et ça regarde la pluie tomber... alors on tente de sociabiliser avec nos voisins de table. Pas un mot d'anglais mais on leur demande de nos apprendre du vocabulaire grec, ils se prennent au jeu et on rigole bien ! On va finir fluent si on reste plusieurs jours !
    Et la "paaf", ⚡️stupeur, un bruit étourdissant et coupure d'électricité instantané, oups ! Une demi-heure plus tard, la lumière revient.
    Deux heures plus tard "paaaaaaaf" ⚡️⚡️😲 bien plus fort, plus d'électricité pour la soirée, on est à la bougie.

    On les aime bien nos compagnons de galère, on reste avec eux au bar jusque 22h, lors de la fermeture. Ils sont fiers de nous présenter le maire qui, stressé, gère la coupure de courant. Au final, on aura rien eu le droit de payer de la journée, chacun voulant nous offrir un verre.

    Mercredi : La nuit diluvienne ne nous inspire pas confiance. On traine au lit le matin en regardant la "piscine" se remplir à côté de nous. Heureusement que l'église est surélevée d'un bon mètre. Pourtant, il nous faut braver les 30cm d'eau pour retourner à notre café préféré, à vélo c'est pratique pour ne pas avoir les pieds mouillés !
    On reprend notre "routine" thé/café du matin, on salue les locaux d'hier qui sont revenus pour regarder la pluie tomber. L'un d'eux ayant fort sympathisé avec Vincent, il l'invite à sa table pour "discuter" (il ne parle pas un mot d'anglais) et lui tend deux sacs plastique. L'un rempli de fruits, l'autre avec un gâteau et des œufs, pour notre survie ici, c'est trop gentil !! On est ému de son geste, ils sont si sympa c'est locaux ! Eux sont fiers qu'on ait choisi leur village pour dormir, bon... on avait pas prévu d'y rester si longtemps 😆

    Entre temps,nos petites activités d'organisation me font réaliser avec effroi que la date de validité de mon passeport n'est pas suffisante pour entrer en Turquie... j'avais lu 90 jours, ça a dû changer depuis, c'est écrit 150 j... !! Zut zut, une nouvelle occupation, comment renouveler vite mon passeport ? J'appelle, je prends rdv à Athènes en urgence. Bon, on risque de rester en Grèce plus longtemps que prévu...

    La serveuse d'aujourd'hui parle anglais, ainsi qu'un habitant, Thomas, qu'on avait rapidement vu hier, super ! Ils prennnent notre situation au sérieux, pas question de nous laisser dormir dehors ce soir. Nous y pensons dès le matin mais avons peu de solution : aucun hébergement dans le village, la prochaine ville est à 20km (aucun bus ne passe) et personne n'a la possibilité de nous héberger.

    Finalement, la situation se débloque en fin d'après-midi. On réserve un hostel à Trikala (la ville à 20km par laquelle nous sommes déjà passés) dans l'espoir de pouvoir prendre un bus le lendemain, jeudi, mon rdv à Athènes étant vendredi.
    Avant de partir, Thomas insiste pour que nous venions manger chez lui, sa mère, Agnès, nous a préparé à manger. On hésite car il y a un petit créneau pour rouler, la pluie est faible.

    Mais il insiste, on rencontre Agnes qui est adorable et nous prépare un bon repas typique : de la soupe de lentilles, une salade grecque, des frites et de la saucisse locale. On passe un très bon moment, réconfortant aussi, avant les 20km qui nous attendent...

    Le départ se fait sans surprise sous la pluie 🌧🌧🌧 on est équipé et tout notre matos est waterproof, allé on en a pour une heure de route !
    Mais au bout de 10min, psssschit, je crève à l'avant. C'est vraiment pas le moment... le ciel est noir, ça gronde à nouveau, bien sûr, on évite de se mettre sous un arbre pour la réparation. Ça nous met un bon coup de stress... vite fait bien fait, on devient experts en trous de chambre à air, on repart sous la pluie.

    On est seuls à rouler, un couvre-feu dans la journée interdit aux gens de circuler. Autour de nous, les champs sont inondés. La route secondaire pour les vélos nous fait parfois passer par des chemins de terre. Devant nous, des marres qui prennent parfois toute la route : pas le choix, on fonce dedans avec de l'élan. On lève les pieds... mais la flaque n'est pas encore traversée... pas le choix, on met les pieds dans l'eau, c'est froid !!
    Vincent garde cette image de moi au milieu d'une marre avec mes sacoches faisant office de flotteurs. On est pas loin de l'aquabike, nouveau sport local !
    Mes sacoches avant sont à moitié dans l'eau, celles à l'arrière la frôle, pour vous dire la hauteur.

    Bref, nous arrivons sains et sauf à l'hostel où le gérant nous accueille, nous montre la chambre (un dortoir au sous-sol.. seuls lits disponibles) et la chaufferie où nous pouvons faire sécher nos affaires. Chouette ! On ne se prive pas d'utiliser la pièce entière pour étaler nos affaires.

    Jeudi : le lendemain matin, Vincent levé avant moi a l'air inquiet. Il me regarde et me montre ses pieds... qui barbottent dans 20cm d'eau... Il y en a partout, dans toute la chambre, mon livre flotte allégrement.
    Ehhh voilà, nous qui pensions être au sec. La nuit a été terrible, j'ai très mal dormi en entendant le déluge, c'était impressionnant et les conséquences bien pire que les deux jours précédents pour la région.

    Notre stress du matin, quel est l'état de la chaufferie ?? On ose pas ouvrir la porte de peur de faire circuler l'eau. Finalement, on découvre que toutes nos affaires qui étaient étalées par terre sont trempées (carnet, cartes postales et autres bricoles).

    On alerte le gérant, on essaie de tout faire sécher et on s'attelle à notre seconde mission de la journée : trouver un bus pour aller à Athènes. Car mon rdv à l'ambassade est dans deux jours.

    Le petit-déjeuner avalé (merci nos chers amis de Petroporos !), je file à la gare de bus pour me renseigner tandis que Vincent gère les affaires mouillées.
    Il ne pleut plus ce matin là, mais le spectacle en ville est saisissant, la rivière est toujours dans son lit mais touche quasiment le pont. L'ampoule du lampadaire touche quasiment l'eau.
    La station de bus est à environ 4km de la ville. J'arrive à un rond-point submergé les voitures roulent dans des marres d'eau. Poue le traverser, je suis obligée de descendre du vélo, j'ai de l'eau qui frôle le genou !! Je suis abasourdie par les conséquences de la nuit, je peux comparer car nous sommes passés par là hier.

    Je continue la route difficilement pour rejoindre la station de bus. Là, un monde fou, un brouhaha, la salariée au guichet complètement dépassée par la situation.
    Elle n'a pas d'information précise, oui, peut-être, à 11h30 et à 14h, deux bus dans la journée, après on verra. Je rencontre un couple de français qui avaient leur avion à Athènes le lendemain...
    Ma question principale au guichet : et vous prenez les vélos ? Oui, peut-être, pas sûr...

    Bref, je repars en ville avec l'ambition de prendre le bus de 14h. Repas rapide avec Vincent, je charge mes sacoches sur le vélo et retourne à la gare. Lui pourra prendre un bus plus tard, l'urgence c'est mon rdv !
    Je reprends la même route que le matin mais arrivée au rond-point, je me fais stopper par la police qui régule le trafic. "Ahhh non madame, la route à droite est bloquée".
    "Comment ça, je suis passée il y a à peine 3h ?"
    "Oui mais ça a changé c'est bloqué..."
    J'explique ma situation, je râle (en bonne française) et on finit par me dire que j'ai cas voir par moi-même.

    En effet, le courant autour du rond-point s'est intensifié, les voitures passent que d'un côté mais ne peuvent pas tourner à droite. Je remets les pieds dans l'eau et traverse pour retrouver un morceau de bitume. Je me dis alors que tout va bien, j'ai bien eu raison d'insister. Je roule seule sur cette route puis au loin, j'aperçois une pelleteuse.

    Je m'approche et je vois des monticules de terre, et à côté, une rivière... elle traverse littéralement la route. Le courant est fort c'est inimaginable. Des voitures flottent pas loin de là. Je vais de long en large et constate qu'en effet, comme me disent les trois personnes avec la pelleteuse en face, ça ne passe pas. C'était donc cela, l'avertissement de la police. Je commence à comprendre que c'est pas très malin tout ça... pourtant j'ai un bus à prendre et je suis encore dans les temps.

    Je raconte cela aux monsieurs en face et je leur dis que je pense que je vais réussir à passer. Je prends mes sacoches que je leur lance comme des ballons de rugby, ça le fait rire de me voir si déterminée. Alors ils jouent le jeu. Je leur monte le vélo, est-ce qu'il passe par dessus la "nouvelle" rivière ? Non...

    L'un d'eux me dit d'attendre ici, il a une idée. Il conduit l'un des camions, fait une marche-arrière jusqu'au bord de la rivière et là miracle, il descend la plateforme arrière qui créé un pont sur la rivière !! Incroyable ! 💪🌟Je les remercie mille fois, je monte sur la plateforme avec mon vélo, le camion avance doucement et me voilà de l'autre côté. Quelle aventure mes ami.e.s, dignes d'un film d'action.

    J'arrive à la gare épuisée, je me sens un peu fière et aussi un peu bête d'avoir bravé ces interdits pour un foutu bus ... quoi qu'il en soit, je fonce vers le guichet, la salle n'a pas désempli. On me dit "pas de bus pour Athènes aujourd'hui"... c'est la douche froide. Mais, le bus de 14h ?? Aucun bus ne part aujourd'hui, peut-être demain...
    En effet, le couple de français est toujours là, ils ont décalé leur avion car la route pour Athènes est bloquée. Je l'ai vu de mes propres yeux, les courants sur la route sont beaucoup plus intenses maintenant que pendant le déluge (alors qu'il ne pleut plus), je n'aurais jamais pensé à cela avant.

    Vincent ne s'attendait pas à me voir revenir à l'hostel. Il n'est pas en grande forme, je lui raconte mes aventures, de même qu'à Léna et Théo (nos ami.e.s en camping-car) qui étaient aux météores et on pu prendre la route pour nous rejoindre. Chouette de revoir des visages connus, de pouvoir boire un verre en terrasse et de penser à autre chose. Ils en profitent pour nous rendre le graaal : le toit de tente qu'ils ont récupéré au camping en Albanie pour nous, on ne les remerciera jamais assez 🙏😇

    Autour de nous, on voit des gens avec des sacs et des caddies remplies de bouteille d'eau. Plus d'eau potable dans toutes la ville. On cherche également dz quoi manger et on rêve alors d'un gyros. C'est sans compter que la moitié de la ville est privée d'électricité et qu'il y a une queue monstre devant le seul fast food ouvert. Tant pis, notre riz - sauce tomate fera très bien l'affaire !

    Nous dormons dans le même hostel avec les pieds qui barbottent (sans douche et sans toilette), c'est gratos ce soir pour nous.

    Vendredi : On retente notre chance vers la gare de bus le lendemain matin, en empruntant un autre chemin (celui de mon retour) qui est bien moins innondé. On a pas grand espoir et dans tous les cas, j'ai loupé mon rdv à l'ambassade (j'ai réussi à en reprendre un pour le lundi). En effet, c'est encore la déception, pas de bus non plus aujourd'hui... il faut attendre que la police valide l'ouverture de la route, et que l'eau s'évacue. Seule option, faire un méga détour par Ioannina avec un changement. On passe du temps à la gare de bus (j'ai l'impression d'y avoir passé 2j entiers !) pour prendre une décision. C'est dur moralement de venir là chaque jour sans pouvoir prendre le bus. On décide alors de retourner voir les météores qu'on a tant aimé, en espérant que la route sera réouverte dimanche. On est alors contents de reprendre la route, pourtant dans le sens inverse de notre destination initiale...
    Read more