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  • Day 86

    Transat, partie 3

    January 24 in Barbados ⋅ 🌬 27 °C

    19 janvier 3h36
    Le vent s'est stabilisé toute la journée autour de 22 noeuds environ pour repartir en soirée. Après avoir aperçu des voiles au loin, je contacte le bateau à la radio sur le canal d'urgence. Comme on porte à 25 milles max avec notre vhf, on peut discuter sur le canal d'urgence sans risquer de gêner quiconque. C'est un bateau allemand, le ... qui navigue comme nous en direction de Barbade. Ils nous disent qu'ils ont des fichiers météos qui arrivent pour 19h, ils nous rappellent à ce moment là.
    Ils nous racontent alors que ça fait ressoufler fort dans la nuit pour baisser au matin et ça jusqu'à dimanche où ça sera un peu la guerre, pour se calmer lundi, on est actuellement jeudi quand on discute. Autrement dit régime full vitesse, voiles réduites et bateau pas confort pendant 3j. Une chose est sûr, on va bien avancer et on peut commencer à espérer une arrivée en 15j de transat.
    Ce qui est dur c'est qu'Elsa ne réagit pas bien du tout aux conditions rudes, son stress la gagne et elle le transmet très fort. Faire équipe avec elle pour la cuisine et dans la chambre est fatiguant, il faut aller dans son sens en permanence, la rassurer ou l'écouter pour les choix de nourriture. Pire, quand on est à plusieurs, la voir craquer au bout d'un jour quand on sait qu'on va s'en prendre 5 comme celui ci, ça fait mal et ça cristallise nos pensées sur ça. Quand on est tous les deux, elle me parle de sa peur du bateau, de le piloter, de la vitesse, ... Et la peur c'est la pire des ennemies, elle s'immisce petit à petit dans ma tête et vient faire valdinguer mes certitudes une à une. Après tout c'est vrai, qu'est ce que j'en sais que le bateau se porte bien, que y'a pas de risque de casse ? Et ces questions résonnent en moi en même temps que le bateau vibre pendant ses grosses prises de vitesse, m'empêchant encore plus de dormir.
    Au final, en étant couché à 20h30 et avec un quart à 3h00, je pense que j'aurais dormi 3h en tout, pas mal mais va falloir mieux faire pour tenir les prochains jours.

    Quand j'arrive en quart, Elouan est à la barre tout sourire et je tarde pas à sourire avec lui. Y'a du gros vent et des grosses vagues, mais c'est aussi là où je prends le plus de plaisir. Le bateau fuse et barrer a réellement un intérêt, c'est dans ces moments qu'on se sent le plus vivant. Quand à 4h du matin, dans la lumière du peu d'étoiles encore visibles, je me couche sur la barre pour compenser l'influence de chacune des vagues. C'est dans cette posture qu'on atteint les records de vitesse du bateau, le bateau surf dans le creux de la vague en accélérant fortement, j'ai eu l'occasion de voir 12,6 noeuds au speedo, belle bête. Je discute avec Elouan le reste du quart, puis avec Gervais quand il se lève et on se marre bien. Ça m'a vraiment fait du bien ce moment ensemble après le petit stress qui au final n'avait pas lieu d'être avec Elsa. On a pris nos dispositions pour que le bateau ne reçoive pas trop d'efforts, qu'on garde une certaine stabilité et qu'on avance, c'est le must.

    20 janvier 6h10
    Au réveil en regardant le téléphone satellite pour voir si Nils nous a répondu, le téléphone ne détecte plus notre carte SIM. Autrement dit, on ne peut plus contacter personne pour le moment. Je tente plusieurs fois de l'enlever, de la remettre, de sécher l'intérieur au cas où il y aurait eu de l'humidité, mais rien n'y fait et il refuse toujours de lire la carte. C'est particulièrement problématique pour nos chères familles, on leur a assuré des nouvelles fréquentes et de pouvoir nous suivre à l'AIS. L'AIS ne donne pas d'infos fiables, et le téléphone fonctionne plus. Bombard lors de son aventure où il se rend naufragé pour prouver qu'on peut vivre en buvant eau de mer et eau contenue dans le poisson explique qu'il ne prend pas de poste émetteur justement pour cette raison. En cas de casse, il ne veut pas que sa famille panique ou qu'on vienne le chercher. Il reste encore 5j au minimum de voyage, j'espère que nos familles ne stresseront pas trop. Mes chers parents, de mon côté tout va bien actuellement, on fait de la voile et plus seulement de la bronzette au soleil et ça me fait le plus grand bien.
    J'essaye de contacter à la radio le bateau des allemands, ils nous avaient dit de les appeler s'il y avait quoi que ce soit. Malheureusement ils sont hors de notre portée, on ne peut pas faire grand chose si ce n'est d'attendre d'arriver et espérer.

    Je me mets à potasser un bouquin de météo afin de perfectionner mon approche de la voile, surtout sur le long terme. Gerv a "la bible", un bouquin presque de physique théorique appliquée à la météo et à la stratégie marine. Il ressemble dans sa forme à un bouquin de prépa, ça à l'air franhement indigeste. Je me penche en premier sur un résumé d'une centaine de page. Ça reprend les fondements des mouvements fluides de la planète, à différentes échelles, tout en expliquant les phénomènes avec des graphs. C'est top parce que ça fixe mes idées sur des concepts que je connaissais mais que j'avais pas assez en mot.

    Dans l'aprem j'avais mis une traîne histoire de dire et on avait pris les paris avec Paulo et Gerv sur la rapidité avec laquelle ça allait mordre. J'ai dis 2h, Paulo 1/2 journée et Gerv l'americanos 4j. La traîne a mordu en 4h, j'ai eu le zen le plus fin dans l'histoire. Je la remonte illico avant que la nuit tombe, c'est notre plus grande prise à vue de nez, une magnifique dorade coryphéne de 1,05m. Le plan de jeu de société se meut en Damona Poissonniers and Co, deux à l'evidage, un pour lever des filets, un autre pour couper des steaks et un pour tout nettoyer, l'organisation est allemande. Au repas, on se marre bien avec notre dorade au chorizo en discutant des prénoms de nos futurs enfants. Pour Gervais ça sera Gwenen et il a pas son mot à dire dessus.

    21 janvier 2:12
    Réveil 1h, je sors la tête de la descente pour checker un peu et j'me fais fouetter par la pluie. Retour dans la cabine pour s'habiller en conséquence, une fois tout vêtu de plastisque, je retourne voir Youen sur le pont. Il me dit qu'il vient d'essuyer un grain avec 37 noeuds. Autrement dit c'est pratiquement le maximum de ce qu'on a subi depuis le début de notre aventure. Le bateau est toujours voilé pour supporter la baston, il tient et manoeuvre bien dans le gros vent. La pluie passe, le nuage aussi, le vent retombe à 15 nœuds. C'est la dance de l'anémomètre qui accompagne notre zone de navigation. Les différences de températures entre l'air et l'eau (28,7°c actuellement, ça fait longtemps que j'me suis pas baigné, ça manque), créent des courants ascendants, à force, des nuages s'accumulent quand le taux d'humidité dépasse 100%. Le phénomène s'auto alimente, les courants de vent en altitude déplace tout, de l'air froid plus dense que l'air chaud qui monte le remplace, créant des vents violents. Lorsque le nuage est bien formé, il peut devenir instable et donc de générer de la pluie, voir des orages si il y a un trop grand déséquilibre électrique. On passe donc de passage de vent assez léger d'environ 15-16 noeuds, à des passages à 30, 32 voir 37 nœuds. Et quand y'a 37 noeuds et wes vagues de 4m de haut, il est nécessaire qu'il y ait quelq'un à la barre, autrement le pilote auto fait de son mieux mais peut ne pas gérer l'accélération et le surf dans la vague et nous envoyer dans le décor. Le phénomène est hyper visuel, suffit de regarder ce qu'il se passe derrière nous (comme le vent vient de l'arrière eheh), on voit les gros nuages gorgés d'eau (bien sombres) arriver sur notre fiffe. Autrement dit, on veille au grain.

    Aujourd'hui j'me suis rendu compte d'à quel point j'étais habitué à cette vie, on est depuis 4j dans les plus grosses conditions depuis le début du voyage mis tout est bien réglé et notre vie est devenue normale. Pratiquement pas de voile pendant la journée de mon côté, tout est carrément banal. On y réfléchit avec Paulo et on se demande si on aura le même effet en arrivant à Mindelo après 7j, ou alors on sera blasé. Cette après midi on a fait que jouer aux jeux de sociétés, on a fait un gâteau, écouté des podcasts sans pendre en compte que le bateau fait des +20 -20° en latéral dans les vagues les plus grosses qu'on n'ait jamais vu. On s'habitue à tout. Parfois en regardant les vagues on se dit que si les gens qui nous suivent se rendaient compte de leur taille, ça serait la panique permanente. Gervais nous dit que Viviane voudrait qu'il rentre illico. Ce matin c'était le plus impressionnant, des murs. On a pas de possibilité de les mesurer et le bateau flotte donc elles sont s'abattent pas sur nous, on reste toujours au dessus. Mais la vitesse du bateau double parfois tellement on surf, le nez tombe après le sommet, la sensation de glisse est magnifique. Seulement quand t'es à la barre et que tu regardes derrière toi, que la ligne d'horizon monte soudainement de 5m et qu'elle est maintenant plus grande que toi alors que t'es debout sur un bateau, y'a un leger pincement au coeur à chaque fois.

    On a croisé un cargo, ça faisait 3j sans contact, on a sauté sur l'occasion pour les appeler sur le canal d'urgence. Pour info tout le monde reste en veille sur le canal 16, donc y'a de grande chance que la personne en face entende notre message. On leur a expliqué qu'on avait plus de communication et ils ont accepté d'envoyer un SMS à Nils, j'espere tellement qu'il a reçu et qu'il va pouvoir transmettre l'info que tout va bien à tout le monde. On lui a fait répéter le numéro 4x pour être bien certain, il avait mal entendu au départ. C'est toujours agréable d'avoir un petit contact avec un humain qu'on connait pas. C'est seulement quelques mots mais ça nous rappelle que le monde vie autour de nous et qu'on est pas seulement en train de sillonner un océan infini. On a oublié de lui demander des infos météos, pas grave, normalement le principal est passé.

    Mon quart est assez pépère, un peu mouillé de temps en temps mais le vent ne souffle pas fort, j'alterne entre pilote automatique et barre lorsque ça forcit un chouille. Elsa monte pour assurer ses deux heures de veille et au moment de prendre la barre, le grain qui arrivait doucement dans notre dos depuis 30min éclate. On se prend une trombe d'eau dans la gueule comme c'est pas permis, ça faisait longtemps que j'avais pas pris autant d'un coup et en si peu de temps, c'est tropical. J'avais un sur-pantalon de pluie et un k-way un peu léger, mon caleçon est trempé en moins de 3min. Elsa n'a aucune visibilité et panique rapidement, je lui reprends la barre pour éviter une quelconque catastrophe. Dans ces cas là, faut naviguer à la sensation pour contrer les vagues et aux instruments pour comprendre où on va. Heureusement on touche assez peu de vent et le bateau reste assez maniable bien qu'on ne voit plus rien tellement il pleut.
    Lorsque la pluie passe au bout de 10-15min, je découvre qu'il y a une déchirure dans l'une des coutures de la trinquette, ça fait un peu chier mais c'est pas trop grave. Juste il faut l'affaler pour éviter que ça s'aggrave. On réveil le Gerv et on file à l'avant avec nos gilets et nos longes, en 15-20min, la voile est affalée et ferlée et le génois tangonné. Efficace donc.
    Je vais me coucher après avoir enfilé un caleçon sec et mis toutes mes affaires à sécher.

    22 janvier - 00h05
    Ce qu'il est rude ce quart, à peine eu le temps de profiter de 2h de dodo qu'il faut se réveiller, mauvaise gestion du sommeil, j'aurais dû faire une sieste cette aprem. La houle est plus petite mais sa période est plus courte, ce qui fait que le bateau a plus de mal à prendre les vagues, ça roule beaucoup ce soir. Le vent a sacrement perdu en intensité, moi qui ai tapé le nouveau record de vitesse avec 38,6 noeuds ce matin, je m'ennuie un peu à la barre avec du roulis et 20 noeuds, l'impression que le bateau se traîne. Avec l'expérience je prends plaisir à déceler chaque grain, à anticiper de mettre une veste pour la pluie, reduire un peu la surface de voile avec l'enrouleur de génois en prévision de l'augmentation du vent.

    Autrement aujourd'hui c'était lecture et jeux avec les copains, je sens une certaine envie du groupe d'arriver, ça regarde de plus en plus la tablette pour savoir si on a grapillé des milles. Il nous reste environ 500 milles, soit moins d'un quart du trajet, avec la vitesse des 3j précédents on y est en 3j. Ça serait cool d'arriver en 15j, après les 3 premiers jours de presque pétole, ça ferait une belle moyenne sur la suite de la traversée.

    J'ai passé quelques heures privilégiées avec Gervais parce que c'est rare de se retrouver à deux et de pouvoir parler tranquillou dans notre cloître, ça m'a fait beaucoup de bien. Après ça on s'est fait un magnifique coucher de soleil en musique, top

    23 janvier 1h00
    Il fait de plus en plus chaud, on a pas de thermomètre à l'extérieur mais dès que le soleil nous tape, ça devient vite un supplice. 45min d'exposition et zou on rentre se cacher à l'abri à l'intérieur, sauf qu'il fait étouffant à l'intérieur. Faut choisir entre brûler ou cuire, pas simple. En plus de cela on ne fait que voir la température du capteur dans l'eau augmentée, 29,1°C mais malheureusement on va trop vite pour se mettre à l'eau. Le risque qu'on lache est trop grand, alors on s'abstient.

    Les copains étaient en train de faire des jeux de sociétés quand le soleil à commencer à aller se coucher derrière les nuages, celui ci était particulièrement beau. D'énormes cumulonimbus empêchait à la totalité de la lumière de passé, mais cela faisait que seulement un faisceau jaune divin se propageait dans notre direction. Aux alentours du bateau quelques hauts nuages d'altitudes chopait les rayons et prenaient une teinte rose et la mer à son tour a pris la teinte des nuages. Un superbe tableau qui se dessinait à 360°, tout en pastel et pour couronner le tout, 2 oiseaux blancs aux becs rouges avec une longue queue fine qui se faisaient la cour autour des voiles. Bombard avait un livre de naufragé avec lui qui lui expliquait que les oiseaux comme les miens ne volaient ensemble qu'autour des îles. Il pensait alors être tiré d'affaire dans quques jours. En l'occurrence ça s'avérait complètement faux et ça lui aura donné de l'espoir pour rien pendant beaucoup trop de temps, participant à le briser psychologiquement. Pour ma part, sachant que j'arrive dans quelques jours, je le prends comme un signe de proximité avec la Barbade.

    Pendant ce quart, Gervais est resté avec moi tout du long, on a énormément papoté. Surtout de bande dessinée, on a refait le film de ce qu'on lisait étant petit, de nos premières lectures jusqu'aujourd'hui. On retraçait notre genèse et ça nous a sacrement donné envie de tout relire. Tout ça est parti de Picsou, Mr Big capitaliste avec ses valeurs de grands patrons qui est prêt à réduire sa famille en esclavage pour accumuler quelques nouvelles ressources. Et pourtant on se rappelle avec émotion de chacune des histoires qu'on a lu, elles sont tellement bien ancrées dans mon esprit que je peux savoir la fin d'une histoire que j'ai lu il y a 15 ans en lisant les 2 premières pages. C'est rare ce pouvoir quand même, de nos jours je peux mater 30min d'un film avant de me souvenir que je l'ai déjà vu, et pourtant je ne me souviens plus de la fin et je me fait surprendre tout pareil. Gerv me raconte les premiers abonnements qu'il a eu, carrément marqué par J'aime Lire. Moi c'était Spirou et Sciences et Vies Junior. Lui est plus Tintin, moi Astérix avec la main sur le coeur pour ceux de Goscinny. J'lui parle ensuite de Sfar et il est carrément choqué de connaître quand je lui remémore Sardine de l'espace et soudainement on a qu'une envie c'est de réussir à dénicher des Sardine de l'espace pour la suite de notre aventure. Peut être qu'on a besoin de régressif, en tout cas nos discussions se perdent autour de là où on vivait petits, du collège et de tout autre débat autour de l'enfance.
    Le temps de ces quatres heures, j'ai retrouvé mon imagination de petiot, j'avais l'impression de percevoir de nouvelles bêtes dans chacun des nuages qui nous passaient dessus à toute vitesse.

    Elouan nous a rejoint vers 00h pour les dernières minutes tandis que Paulo dormait pépère alors que sur le papier, il était sensé s'occuper du bateau.

    23 janvier 20h00
    Le fait de savoir qu'on arrive bientôt fait que j'y pense à fond. Je suis complètement habitué à ce rythme de vie et cela pourrait durer encore plusieurs semaines que ça me ferait plaisir. Seulement le côté objectif change quand on est plus train loin de la côte, ce n'est plus seulement faire de la voile mais rejoindre la Barbade. Actuellement il reste moins de 200 milles, d'ici 30h à 48h on devrait y être, voir moins si le vent se réveille. Je dis se réveille parce qu'il a chuté depuis ce matin. Avec les vagues qui elles n'ont pas chuté, on a perdu en stabilité et en vitesse, le bateau branquebale allés qu'il y a quand même 15 nœuds de vent. Après avoir passé une semaine à 25 noeuds, on a sérieusement l'impression de se traîner le fiak.

    Grosses lectures aujourd'hui pour changer, je commence à piquer la liseuse de You pour lire des Fred Vargas qu'on a pas en papier. Les temps glaciaires c'est terminé aussi, il était super celui ci. Youen parallèle lisait Sous les vents de Neptune, on discutait des deux en même temps c'était un vrai régal. J'ai enchaîné avec la suite de mon bouquin sur la météo et j'me suis pris une petite baffe de "on est quand même sacrement con" d'être parti sans avoir accès à aucune donnée météo alors que toutes les puissances du monde se plie en quatre avec les ordis les plus puissants pour essayer de modéliser le climat de la meilleure façon possible et qu'ils offrent en accès libre leurs données. Donc oui on ne réussi pas à avoir de fichiers météo grib avec notre téléphone satellite, mais il existe d'autres moyens de recevoir en pleine mer. Certes on pourra pas l'esquiver parce qu'elle ira forcément plus vite que nous, mais on verrait les signes avant coureurs, on pourrait adapter les voiles avant la bagarre, voir d'évier notre route pour se la prendre à un endroit plus calme. Bref le trajet était certes pas bien risqué mais on est quand même con.

    En fin d'aprem il nous tombe de la pluie dessus, pas vraiment un grain parce que pas accompagné des phénomènes de vent habituels, il pleut juste. Comme on est tous en permanence en slip, on sort tous pour vivre ça, douche gratis, on en profite ! Gervais You Paul et moi on se retrouve à se savonner sous le petit filet de pluie, c'est fort agréable. Quelques dauphins font leur apparition, ça faisait des lustres qu'on en avait pas vu, toujours bien agréable d'etre avec du vivant. Quand soudain, on aperçoit sur tribord un aileron qui sort de la surface de l'eau. Ca ressemble à rien qu'on a déjà vu, pas un mammifère, pas un cétacé, l'aileron est flexible et est énorme, il ressemble aux voiles d'asis qui montent sur elles mêmes en biais. On crit tous à l'espadon alors qu'on en a aucune idée, faut dire qu'il se fait appeler "Le voilier" pour une raison. On devient tout fou pendant 30s et on se rend compte que nos deux traines sont à poste, grosse panique pour moi parce qu'on est dans de beaux draps s'il décide de mordre à notre énorme hameçon. Rien ne se passe, la pluie cesse en degageant un beau ciel parsemé de quelques nuages, mais bien clair. La journée nous aura délivrer sa dose de spécificité en 10 min top chrono, la classe.

    24 janvier 17h
    J'me fais réveillé par du gros boucan, en slip j'entrevois Gervais sur le pont, j'me dis que la situation est gérée par le capitaine. 15min plus tard, j'entends le moteur, forcément signe qu'il y a anguille sous roche. J'enfile une veste de quart, pas de falsard et je sors dans le cockpit. La situation a l'air assez calme mais Gervais et Elsa s'agitent rapidement pour réduire la toile, ils viennent de se prendre un grain de 2min de 45 noeuds. Décidément, ces grains sont terrifiants et difficile de jauger leur puissance de loin. Le vent est passé de 19 à 45 noeuds en 30s, bateau surtoilé avec un seul ris et presque tout le génois. Je les aide à prendre un second ris après avoir enfilé un gilet de sauvetage, ils avaient déjà roulé le génois. La manip se fait rapidement, sans risque, seul problème, le premier ris a pété. Juste un bout à remplacer donc pas bien grave mais très impressionnant, Elsa est un peu sous le choc. La tension redescend rapidement, on discute un peu et je retourne me coucher sans comprendre comment les 3 autres ont pu rester dans leur couchette.

    Levé à 7h en même temps que le soleil ce matin pour la deuxième partie de mon quart. Magnifique spectacle encore une fois, pas mal de nuages qui reflètent tous des éclats d'or. Encore une apparition divine. Je descelle carrément la création d'un vent avec un gros paquet d'air froid qui passe sous un paquet d'air chaud et humide, le nuage se fait déformer petit à petit et le soleil vient de refléter dans ces gouttelettes. J'aperçois des bribes d'arc en ciel, juste quelques rayons par ci par là, sans avoir du tout un arc de cercle. Super localisés aux endroits où j'imagine qu'il pleut. Pour compléter cela, 3 foutbassants se pointent avec leur envergure magnifique. Encore d'apres le livre de survie de bombard, 3 oiseaux volants ensemble c'est signe de moins de 200 milles des côtes, j'le prends aux mots cette fois-ci sachant qu'on est bientôt arrivé. Ils volent en stationnaire beaucoup mieux que notre drone malgré, ils ont jamais besoin de battre des ailes et ils viennent frôler la surface des eaux en plein virage. L'eau passe à quelques centimètres de leurs ailes pendant que l'un d'eux vole dans le soleil, comme l'américain de Porco Rosso. C'est peut être un moyen de pas se faire voir se leurs proies. Je les siffle un petit coup et l'un d'entre eux tourne sa tête vers moi puis fait un petit tour du bateau, j'me sens plus que privilégié.

    Dernières heures de la transat, j'profite au max de la pleine mer, je vais pas la retrouver avant plusieurs mois. Au revoir cet infini de nuances de bleu.
    Aucun nuages à l'horizon, thermostat de l'eau à 29,2°C et un joli vent constant qui nous pousse vers l'île à bonne allure, voilà les conditions qu'on a. Plus que 60 milles avant d'arriver à la Barbade, 75 jusqu'au mouillage de l'autre côté, on devrait y être pour 3-4h du matin.

    27 janvier 10h36
    Pour notre arrivée, je devais être en quart à 3h mais avec l'excitation, je me réveille pour minuit après avoir aidé les copains vers 22h pour qu'on finisse le voyage ensemble. Petit à petit chacune des lumières se fait de plus en plus nette et on distingue les reliefs. On entre dans la baie où on va mouiller aux alentours de 2h et on éteint la navigation sur la tablette 15min plus tard, résultat 14j14h. On est encore trop excité pour dormir alors avec Gervais on met nos guirlandes de pavillons sur le bateau pour faire joli, on range un peu tandis que Elouan et Elsa gonflent l'annexe pour le lendemain. Je vais me coucher dans un bateau qui ne bouge presque plus, le léger roulis est plus berçant qu'autre chose, je m'endors en 3 pensées seulement.
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  • Day 80

    Transat, partie 2

    January 18, North Atlantic Ocean ⋅ 🌬 26 °C

    Mardi 16 janvier - 00h12
    Les jours s'enchaînent de plus en plus facilement, j'ai perdu le compte parce que mon cerveau est conditionné à ne pas savoir dans combien de temps on arrive. C'était nécessaire de présenter les choses comme ça dans ma tête. D'habitude pour me lancer dans une tâche j'ai besoin de lui donner une heure ou une date de fin, comme ça je sais que je me mets pendant 4h à fond sur cette activité. Ça me rend super productif sur le moment, mais dès lors que je dépasse les fameuses 4h, alors je deviens presque incapable de poursuivre sérieusement mon travail.
    Là le fait d'aborder la transat sans date butoire, sans deadline, ça me fait rentrer dans un état d'esprit différent. Je me laisse bien plus faire par le temps qui passe et les jours s'enchainent bien.
    Toujours pas de fichiers météo en vu, donc nos choix seront forcément moins éclairés et moins bon qu'en temps normal, la transat va donc elle plus longue que prévue, espérons qu'on morfle pas trop.

    J'ai passé ma journée à déguster "quand sort la recluse" de Fred Vargas. J'ai du mal à être raisonnable dans ces cas là et je l'ai englouti d'un coup. Pas grand place pour d'autres activités donc

    16 janvier 22h14
    J'ai du mal à comprendre les cycles de lune, j'avais l'impression qu'elle se levait vers 3-4h plein Est et la voilà plein Ouest à 22h, drôle d'affaire.
    Ce matin en me levant, la table est sortie sur le pont, pleine de sang, 3 poissons péchés des 9h. La journée s'annonce belle comme tout. C'était des petiots, qu'on a pas réussi à identifier avec le livre des poissons de Youen. J'ai continué la pêche avec les gens sur le pont toute la journée, surtout avec Paulo et Gervais. Très vite un poisson volant assez gros est tombé dans le cockpit, ça sera donc exocet à midi en plus de l'autre pêche, histoire de goûter. Les deux traines sont toujours à poste, on voit ce que l'océan a à offrir aujourd'hui. Vers 11h, première prise pour moi, le frère de deux des poissons qu'on a chopé tôt, un petit de 30cm de long, tout brun et revêtant une espèce de lubrifiant un chouia dégueu. C'est quand meme un petit boulot de remonter les traines continuellement avec les Sargasses qui se mettent dedans, on en croise en permanence, des fois sur plusieurs milles d'affilés. Elles sont à des stades d'avancement différents, certaines recouvrent toute la surface sur des centaines de m2, certaines sont au stade d'embryons, on dirait des bébés nénuphars.
    Après manger les traines mordent de nouveau mais le poisson se libère, mais pas pour la seconde, on chope un beau mahi mahi de 80cm, super lourd à remonter, on s'y fout à deux avec Gervais. Grosse surprise, son ventre est bien tendu, elle avait dans le bide un poisson de 25cm en train d'être digéré entier dans l'estomac, les sucs étaient en train de lui dissoudre la chaire. Ça nous amene à un total de 5 poissons dans la journée, assez pour manger ce soir et demain. Ceci dit on ne s'arrête pas, on se dit qu'on a un record de 5 à battre est qu'il est tout prêt, à peine 10min après avoir fini de lever les filets de la précédente, une nouvelle dorade coryphéne mord à l'hameçon. On hésite à la laisser partir, mais non, celle ci servira à faire nos premières rillettes de dorade ! Rebelote et record battu, on range les traines et au boulot, on taille le tout en dés, dans une casserole avec beurre oignons et épices et puis ça part en emiettage, puis huile, refroidissement et hop en pot. On se le garde pour notre point Némo à nous, quand on sera au plus loin de toute Terre pour notre transat, 870 milles de la côte la plus proche.

    Après cette première semaine de nav, on s'est fait un petit point avant le repas du soir pour discuter tous ensemble de la vie à tous, de comment se sentait chacun et comment on vivait la traversée. Ça s'est conclu en concours de celui qui faisait le plus l'éloge de notre groupe, donc tout va bien !

    Je viens de voir qu'il y avait 5700m de profondeur sous notre bateau selon les cartes marines. Sûrement la masse d'eau la plus importante de ma vie sous la quille du bateau que je croiserai

    Pour le quart de cette nuit, je me remets de la techno dans les oreilles, ça devait bien faire un mois, sans compter le nouvel an que j'en avais pas trop écouté. Qu'est ce que c'est puissant quand même, bien plus intéressant qu'un café ou qu'une quelconque boisson énergisante. Je me suis complètement réveillé, avec le vent qui se lève et la belle luminosité de la nuit, j'ai pris mon pied dans chacune des vagues. Faut dire que les conditions sont au rendez vous, j'ai pu virer mon sweat et faire mon quart en Marcel. Olala

    17 janvier - 20h50
    L'heure à la Barbade est à GMT -4:00 alors que l'heure en France est à GMT +1:00, ce qui fait un décalage de 5h en tout. En partant du cap vert, on était à deux heures de décalage, du coup certains jours, on va changer d'heure de manière aléatoire sur le bateau. C'est là qu'on se rend vraiment compte que l'heure est un concept complètement arbitraire. Pour essayer de bouleverser le moins possible nos habitudes de quart de nuit, on va essayer de faire en sorte que la nuit tombe en même temps que le 20h - 9h des quarts. Il faut savoir ce qu'on veut voir à telle ou telle heure pour décider de l'heure à laquelle cela correspond. On pourrait définir le Zenith du soleil à 12:00, le coucher du soleil à une heure précise, ou son lever. Ce qui est dur aussi pour nous, c'est qu'on ne peut pas reproduire le schéma français. La différence de latitude fait que les saisons ne se comportent pas de la même façon. Là où on sait qu'en hiver le soleil se lève tard et se couche tôt, on ne sait pas bien comment il s'adapte si près de l'équateur. Alors, un peu au pif, on a décidé de retirer progressivement des heures pour être caler quand on arrive à la Barbade.
    D'ailleurs nos discussions commencent sur que faire à la Barbade, les mouillages qu'on a envie de voir où les activités que l'on veut faire. Moi qui ne connaissais vraiment pas les Antilles, je deviens fou sur le type de paysages que l'on va voir aux Antilles. On a récupéré avec le bateau un énorme atlas des Antilles, qui répertorie mouillage, port, explications de courant, détails de certaines passes, etc... Et chacune des photos fait carrément baver, j'ai du mal à me sentir plus en vacances et plus relaxé que je ne le suis déjà, mais les paysages sont chacun plus onirique les uns des autres.
    J'ai l'impression que l'on va retrouver le mode de navigation à aller de mouillage en mouillage, en se déplaçant à terre seulement avec l'annexe. C'était ce qu'on faisait beaucoup avec le Heaven Can wait, et c'est clairement ce que je préfère. En fait plus je reste sur le bateau pour vivre nos aventures, plus elles me plaisent. Aujourd'hui j'ai découvert des vus aériennes de petites passes étriquées où il faut naviguer entre des barrières de corails à fleur d'eau pour espérer y accéder, ça à l'air magnifique.

    Toujours est-il qu'il nous reste 1150 milles nautiques au moment où j'écris ces mots, la moitié de la traversée. Je me trouve actuellement au fameux point le plus éloigné de toute Terre, 1450 km d'eau à la ronde, une petite semaine de navigation. Le mettre en mot est assez terrifiant, je ne suis même pas sûr que des hélicoptères aient la capacité de venir nous chercher.

    J'écris ces lignes le lendemain. C'est marrant parce pile quand j'écrivais qu'on aurait bien du mal à venir nous sauver, on se prend un grain dans la gueule, rafale de 30-35 noeuds. On est au vent arrière, donc le bateau va dans le même sens que le vent, ce qui fait qu'on le ressent beaucoup moins fort qu'il n'est vraiment. Je regarde nos voiles, tout est sorti, grand voile pleine et le génois tout déroulé. Il faut agir parce que si le pilote ou le mec à la barre fait une erreur, avec les vagues et 35 noeuds, on est dans la merde. J'appelle Elsa qui veille en bas pour de l'aide, il faut commencer par enrouler du génois histoire de réduire sa surface. Au moment où elle choque l'écoute, elle ne l'a laisse pas tendue, l'écoute surpatte sur le winch, avec la tension dans le bout, ça peut rester bloqué. Je le débloque rapidement mais je fais pas gaffe et ma main vient se coincer dans la poulie derrière le winch. Sur le moment ça fait bien mal, j'ai peur de rester coincé, j'tire un coup sec et la main vient, direction l'eau froide par premier réflexe. L'eau est à 28,4° donc loin d'être froide mais ça soulage un peu quand même et je voit que seulement le petit doigt a pris et que ça n'a pas l'air bien grave. Pourtant je sens mon corps qui fait la classique chute de tension comme à chaque fois que je me fais mal. Je reveille Gervais rapidos pour qu'il aille aider Elsa dehors à réduire les voiles et Elouan pour qu'il check mon doigt, c'est lui qui connait le mieux ce domaine. Je m'allonge dans le carré parce que je sens que la tête tourne, jambes en l'air et ça le fait. Elou désinfecte et me fait un petit pansement avec de la crème. Pause gâteau et ne me relève doucement pour aller rejoindre les deux dehors. Le vent continue de souffler fort, ils sont à l'avant pour greer la trinquette, la voile de baston pour ne pas trop forcer sur l'étai du génois, bon réflexe de Gerv. Avec les conditions c'est gilets obligatoires. Je reste à l'arrière et je prends la barre pour les aider plus efficacement qu'avec le pilote. Une fois le génois roulé et la trinquette prête à être envoyée, on prend un ris. C'est pas l'étape la plus facile parce qu'il faut se maintenir face au vent, donc face aux vagues énormes. J'allume le moteur, puissance aux 2/3 et direction la vague pendant que Gervais est a pied de mat et Elsa au piano. Là c'est sportif parce qu'on tombe derrière chaque vague et ça éclabousse pas mal, heureusement la mer est chaude comme tout. Une fois la manoeuvre terminée, au moment de se remettre à la bonne allure, une énorme vague casse sur le bateau et projette des taxis embruns sur Elsa et moi, on est trempé en un coup. Encore une fois l'eau est chaude et le bateau est en sécurité et avznce bien dans les grosses vagues, l'adrénaline redescend et on se marre tous les trois. C'était de belles manœuvres, aucun cris, aucune panique, grosses conditions mais on a été efficace.

    La nuit après celà n'a pas été compliqué pour les gars sur le pont, mais ça balance bien dans la cabine avant, ça nous remet une petite leçon d'humilité.

    Au matin, mal dormi et mal au dos parce que dodo en biais et les muscles qui forcent pour pas tomber un côté ou de l'autre de la couchette. Le vent oscille entre 17-25 noeuds, le bateau avance toujours aussi vite malgré les vagues et la réduction de voilure, on reste comme cela. La mer prend des couleurs que je lui connaissais pas, il fait grand soleil, les moutons sont bien formés a la cime des vagues et des Sargasses oranges strillent la mer. On navigue donc sur un élément déchaîné, à dos de zèbre sous psychédélique.
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  • Day 77

    Debut de Transat

    January 15, North Atlantic Ocean ⋅ ☀️ 24 °C

    10 janvier - 22h
    Aujourd'hui c'est le grand départ pour la transat, réveil 7h30. On va chercher de l'essence et on se met à un ponton de libre en attendant de finir 2-3 procédures administratives. Le matin on croise pas mal de copains qui nous souhaite bon voyage, on se donne rendez vous de l'autre côté. Charles et Elaï sont restés avec nous tout du long et on s'est fait des aux revoirs digne de ce nom. Les coraux avaient pas mis leus réveil et on a fait des tours autour de leur bateau pour les réveiller. Même combat pour Orion. Au final on aura quand même vu pas mal de monde pour ce jour j. Il fait super beau et on est tous dans l'euphorie du départ, pas beaucoup de vent nous attend pour les premiers jours donc ça devrait être assez facile. Personnelement je me donne pas mal sur toutes les manœuvres, histoire de me refaire un peu de corne aux doigts. On enchaîne quelques changements de bords, on tâte un peu le vent en s'éloignant doucement des côtes. Je prépare deux traines que je fous à l'eau, on a acheté pas mal de matos de pêche à un marché il y a 2-3j et on a qu'une hâte c'est de sortir de quoi se régaler. Les conditions tombent et on se retrouve vite avec peu de vent, alors on en profite pour faire un échantillon de micro plastique, ça prend seulement 30min et ça ne nous ralenti pas des masses.
    Une fois que tout ça est fini, il est aux alentours de 14h et je décide d'aller bingewatcher Peaky Blinders. C'est après avoir bouloter 5 episodes que je me rends compte que d'ici 2j je termine la série à l'allure où je vais. Mais ce mode de consommation me plaît bien plus que de repartir sur du long terme et d'en profiter au fur et à mesure. C'est la même soif un peu primaire qui m'enlace à chaque fois, l'envie de savoir ce qu'il se passe sur le moment plutôt que de planifier sur du long terme.

    11 janvier - 20h12
    Presque pétole aujourd'hui, très peu de vent. C'était prévu et on le savait, toute la marina rigolait quand on leur racontait partir hier. Mais Loulou pourrait nous attendre un peu trop si on partait pas maintenant. Ceci dit, la pétole nous a permis de régler deux trois soucis sur le bateau, on a fait des épissures et surliures avec Gervais pour faire de nouveaux barber de spi.
    Comme précédemment on taff dure pour essayer de pêcher, à chaque fois qu'on pensait avoir une touche, c'était des paquets de Sargasses accrochés. On en a croisé des champs, c'est presque impossible de les éviter. On a pu sauter à l'eau pour virer les algues du speedo et du safran, aucune ne s'était mise autour de l'hélice.
    Tôt le matin on a eu l'occasion de voir des dauphins, ça faisait un bon mois que j'en avais pas croisé, ça me rassure la présence de poissons dans cet océan.

    L'aprem ça a été beaucoup de spi, on s'est fait ça en collab avec Paulo et Gerv, ça m'a fait bien plaisir de voir le Paulo autant investi et fier de lui quand la grande voile verte flottait à l'avant. Gervais à raison, ça donne l'impression que le bateau vole. On ressent directement l'impact sur le bateau, il est tiré vers le haut, plus stable et glisse comme si on lui avait retiré toutes ses entraves. Ceci dit on a pas bien avancé, moyenne très basse aujourd'hui, 135 milles pour 1j11h, hâte que le vent revienne.

    Paulo a sorti sa surprise, il a préparé deux cahiers de chants, mêlant chants scouts, chants marins et chants qu'il apprécie. Alors avec Gervais on donne de la voix et on essaye de retenir chacune des paroles et des intonations. On se lance sur "Au 31 du mois d'août", "Les prisons de Nantes", "Pelot d'Hennebont", "Santiano", "À que nos pères étaient heureux", et d'autres encore dont je perds le nom. C'est dingue comme on se sent progresser vite et comment le moment lorsqu'on commence à maîtriser un chant devient magique. On gueule et la justesse se trouve toute seule, heureusement qu'on a pas d'oreilles aguerries dans l'équipage, elles seraient vite agacés.

    Pour le repas du midi, Elsa et moi étions de team cuisine, j'ai commencé à stresser sur la bouffe. Je commence à bien connaître l'équipage et j'ai un peu peur de leur comportement si on vient à manquer de plats "réconfortant". J'me dis qu'on aura assez vite plus de légumes et qu'on finira sûrement la transat avec du riz, des pâtes et de la semoule sans sauce. J'ai absolument pas envie de compter mais j'ai l'impression d'y être obligé pour que ça fonctionne bien.

    12 janvier - 7h55
    Ce matin au réveil c'était discussion avec Youen en mettant les traines à l'eau. On a toujours autant d'espoir mais si ce soir on n'a aucune touche, demain on attaque avec le mastodonte qu'ils ont chopé au marché, un poulpie XXL avec un hameçon terrifiant. Quand les copains sont revenus de leurs emplettes avec le poulpe à la main, tout le bar de la marina nous a fait une réflexion ou était mort de rire. On va bien voir, nous on veut surtout un peu de frisson et de quoi manger frais !
    Le soleil est encore caché derrière des nuages de basse altitude, ils sont en plein de petits paquets réparti sur tout le ciel, de véritables moutons.
    La mer elle, je ne l'ai jamais connu aussi majestueuse, elle respire. La période des vagues est très longue, environ 15sec et les vagues sont de plus de 3m de haut. Le seul bruit qui provient de la mer est celui de la vague qui pousse légèrement le bateau lorsqu'on est à son apogée. Ce rythme très lent est on ne peut plus apaisant, on dirait qu'on est posé sur le ventre d'un géant qui sieste.

    4h03
    Levé pour mon quart je sors la tête du cockpit et toujours aucun signe de la Lune à l'horizon. Depuis qu'on est parti je l'ai pas vu, complètement fou cette affaire.
    Aujourd'hui on a pu toucher plus de vent par intermittence. On est passé de petite pétole où on est obligé de mettre le moteur pour pas que les voiles claques (on se le permet parce qu'on a des réservoirs tout gros mais sinon il faudrait affaler et laisser le bateau dériver), à petit vent tout doux. Ça nous a laissé l'opportunité de remettre le spi et de faire des belles pointes à 8 noeuds dans les rafales alors qu'il n'y avait qu'environ 12 noeuds de vent, la classe.
    Pendant la période de calme plat on s'est baigné avec Paulo et on jouait sévère avec la petite vitesse. C'est marrant parce qu'instinctivement, on a eu le même réflexe de commencer à faire des tours sur nous même dans l'eau. Chacun avec un masque, on se rend compte de la piscine infinie dans laquelle on se trouve et de l'éventail des possibles qui s'ouvre à nous. Alors on teste des trucs pour voir comment on peut se comporter dans ce nouvel élément. Là où c'est particulier c'est qu'on aurait carrément pu faire la même chose dans une piscine mais j'ai l'impression de n'avoir jamais senti cette sensation de nouveauté. Je me reconnaissais dans les discours des astronautes qui décrivent le manque de gravité tout en étant la tête à l'envers et en observant la surface de l'eau du dessous, avec toutes les vagues, les éclaboussures et les remous.
    Après le plouf, je me suis foutu à créer un nouvel appat puisque ça fait deux jours qu'on pêche rien. J'avais entendu quelque part que quelque chose qui flotte en sautant un peu et coulant parfois, pouvait faire croire à des poissons volants aux yeux de leurs prédateurs. J'ai donc pris un tube de dentifrice vide que j'ai coupé aux 2/3 dans la longueur afin de créer une multitude de tentacules argentées, j'ai chopé 3 écrous oxydés qu'on avait sorti de je ne sais quelle pièce du bateau, un gros hameçon trident pour finir et hop, je tente de le mettre à l'eau. Il manquait le détail de l'emerillon qui faisait que la ligne s'enroulait sur elle même, ce qui peut mener à sa rupture et qui rend fou quand on la range, j'en rajoute un et le tour est joué.
    Une heure ou deux plus tard, on est tous sur le pont à discuter en train de gérer le spi quand la ligne se tend fort, une grosse touche. De loin, on aperçoit que ça se bagarre dans l'eau, y'a du mouvement et ça n'a pas l'air de blaguer. On voit une bonite sauter au dessus de la seconde ligne de traine, complètement incroyable, Youen avait la GoPro dans la bouche j'espère que c'est visible à la vidéo. La ligne qui vient de servir d'obstacle au saut en hauteur de la bonite ferre un poisson et très vite, elle casse. Il reste donc un poisson ferré à la ligne que j'ai fabriqué tout à l'heure, mais lorsqu'on le ramene à 10m du bateau, le poisson se libère et se tire sans révérence. Un banc de bonite affamées a dû passer par là et on a même pas réussi à en avoir une, on est deg, mais en même temps on sait qu'il y a des poissons dans cet océan.
    On se laisse pas abattre et pour calmer les poissons, on fout le fameux Big poulpe à la traîne et on laisse mon appat sur la seconde traîne. 30min plus tard, on chope une belle dorade coryphéne avec le mastodonte, 83cm, belle prise. Après 3j sans avoir pêché, on est regonflé à bloc pour la suite !

    14 janvier - 6h26
    Le vent s'établit petit à petit, on sent qu'on arrive doucement dans la partie la plus stable des alizés. Le spi est de sortie pour 10h30 et on l'affalera seulement à 18h30, grosse journée vitesse. Après les premiers jours tout lent, ça fait plaisir de voir le bateau bombarder dans les vagues. J'me marre à aller à l'avant pour voir l'étrave, elle casse littéralement la gueule de l'océan, c'est satisfaisant comme tout. Sur la journée on doit avoir eu une moyenne de 7,5 noeuds. C'est très bon, j'espère que ça continue de la sorte jusqu'à la Barbade. On se l'est pas mal donné avec Gervais sur le spi, l'un à la barre et l'autre qui se fait les bras en régulant la voile, ça fait du bien de faire un peu de sport et d'aller se coucher avec un léger mal au corps.
    Charles et Elaï nous ont mis la pression en disant qu'ils allaient partir après nous et arriver avant, pour le moment on se sent hors de danger, à voir sur le très long terme.
    À part cela la journée a été assez lambda, quand on se met à faire de la voile, ça prend vite le dessus sur le reste. Surtout que le spi est exigeant, il demande concentration continue ou alors il risque de tomber à l'eau ou de se déchirer. Pas trop de place pour les loisirs aujourd'hui donc. Ça tombe bien ceci dit parce qu'on a rien pêché. C'est frustrant de voir un océan infinie avec des poissons volants qui virevoltent toutes les 30s et de pas arriver à percevoir aucun de leurs prédateurs. Pourtant on se dit qu'avec les deux traines en permanence, avec tout ce qu'on a testé en terme de vitesse et d'appât, si il y a poisson, il va mordre à nos traines. C'est juste qu'on croise rien.

    15 janvier 2h00
    On avait comme stratégie de louvoyer autour de la latitude de la Barbade, descendant le jour avec le spi et remontant légèrement la nuit avec le génois. Cependant aujourd'hui il y avait max 7 noeuds de vent, rien du tout. C'était journée noire pour notre moyenne de vitesse, ils ont bon dos les alizés. J'ai pas trop suivi l'histoire des fichiers grib mais le fait est qu'on a pas de prévision météo pour le moment, on navigue à la vue et aux nuages. C'est la classe quand ça fonctionne mais actuellement on touche aucun vent et ça me rend fada. Le spi se dégonfle avec aussi peu de vent, c'est dangereux, il risque de se mettre dans le balcon avant ou de tomber à l'eau, donc on le vire. On a aucun nuages au dessus de la tête toute la journée, le soleil tape comme rarement. On se rattrape sur les baignades de la veille qu'on avait pas pu prendre, c'est pistoche party. Gervais chope un turbo méga coup de soleil et une insolation qui va avec, c'est direction sa cabine avec le tube de Biafine. Les voiles claquent et le bateau se fait balancer par les vagues, c'est pas très agréable.
    On passe l'aprem avec Paul et Youen, a déconner sur le pont. Elsa n'est toujours pas intéressée par la nav, Elouan ne sort pas de sa cabine nous plus. On tente des trucs pour faire avancer le bateau mais rien n'y fait, y'a juste pas assez de vent, on est trop remonté en latitude. Alors on s'amuse comme on peut, on remplace des traines, on fait la galette des rois avec un gâteau au yaourt et une boule de bout en guise fève. C'est Gerv qui a la fève, il s'en cogne parce qu'il subit encore son insolation, ça fait un coup d'épée dans l'eau.
    J'me lis l'étranger de Camus dans l'aprem, c'est toujours impressionnant les récits sur les histoires de condamnés à mort. J'avais lu Le dernier jour d'un condamné aux Soleils chez les cousins et l'impression qui reste à la fin est la même que pour ce bouquin, un profond dégoût pour les peines de mort et la déshumanisation que ces sentences impliquent. Ça me fait marrer parce que j'ai l'impression d'entendre parler de la peine de mort en ce moment dans pas mal de média en France, comme si elle était remise en question, comme si elle devenait une solution aux problèmes de surpopulation en prison. J'avais suivi les débats qu'avait engendré une vidéo d'un type qui fait faire un kho Lanta à des prisonniers en prison et l'opinion public trouvait les conditions carcérales trop douces, trop laxistes. J'avais l'impression que pour eux, plus les détenus prenaient cher et plus ils se tenaient loin de la vision et dea réalité, plus ils se sentaient satisfaits. Et de pouvoir rentrer dans la tête d'un condamné à mort de la façon dont on le fait avec l'étranger permet de s'approcher de ce qu'il pourrait ressentir et fait comprendre en une cinquantaine de pages à quelle point la peine de mort a été abolie par pur bon sens et pas par un relâchement des moeurs.
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  • Day 64

    Cap Vert #3

    January 2 in Cape Verde ⋅ 🌬 26 °C

    Depuis qu'on est rentré de Sao Nicaulao, on reste super souvent avec les gars des coraux dysees. Au fur et à mesure du temps, ils prennent chacun leur tour leur quart de Damona, un moment où ils viennent partager une aprem ou une matinée avec les gens partant de chez nous. On partage énormément de chose et on a envie d'en découvrir plus, alors on multiplie les occasions en allant se balader, au bar, le soir sur nos bateaux respectifs.
    On s'organise une sortie avec Swann et Gabin des coraux pour aller passer 3j à Santo Antao avec Elsa, Gervais, Elouan et moi. Le matin même les gus ne sont pas réveillés, je les réveille juste avant de partir mais je sens que ça va être trop juste pour eux, c'est tellement juste qu'on rate notre bateau pour aller sur l'île (innacessible au mouillage parce que trop dangereux à cause des vents, de la houle). Fort heureusement il y en a un autre 1h après, pile le temps pour que les autres radinent. Au final on est tous dans le boat de 9h et on arrive à 10h là bas. En sortant on se fait harceler par les taxis du coin qui savent qu'on vient randonner. L'île est énorme, on ne peut pas tout faire à pied donc il va falloir qu'on en prenne un mais pour le moment c'est étape plein de bouffe. On se prend de l'eau des gateaux des pains, des sauces, du fromage et du jambon et on est parti. On chope un collectivo, on rentre le truc est plein , on pense naivement à ce moment là qu'on a de la chance et qu'on va vite partir. Le conducteur se marrait à gorge déployée en allant chercher toujours plus de monde à faire rentrer dans ce van. On a terminé à 21 dans un bus pour 13-14, c'était l'enfer mais tout le monde rigolait alors le mood était super détendu.
    Le taxi nous a déposé en haut d'un volcan, ça sera la base de notre expédition. On dévale la vallée de Paul (c'est son nom), le paysage est complètement fou. Il faut imaginer de grandes montagnes abruptes, luxuriantes de végétation, clairsemées de petit hameaux, dans lequelles sont taillés des chemins presque tous pavés et balisés. On passe dans des plantations et certaines d'entre elles vendent à même le chemin leurs produits. On achète ici du café et des petites bouteilles de liqueur local aromatisés. Typiquement un mélange de fruit de la passion (maracuja) et de grogue. Elsa, qui s'était préservée la cheville depuis un bail pour cette rando, souffre assez rapidement à cause du mouvement répétitif de la descente. On ne peut pas faire grand chose parce qu'on est au milieu de rien mais on essaye de la soutenir comme on peut. Pour le bivouac, on a presque tous des hamac alors il nous faut un endroit boisé à l'abri des regards et c'est pas chose facile à trouver. La vallée est luxuriante mais pas en arbre. De notre point de vu en autour on croise une zone qui a l'air boisée de l'autre côté de la vallée, sur une colline, ça à l'air top mais on a aucune idée de comment s'y rendre. On emprunte alors des chemins, certains vont en éclaireur avec une radio penda't sue l'autre groupe a la seconde radio et reste avec Elsa. On tombe très souvent chez des gens qui nous demande de nous en tenir aux chemins de GR. On croise des cultures magnifiques sur plusieurs niveaux, comme des rizières, qui suivent un cours d'eau plutôt bien aménagé. On se retrouve sous des bananiers, autour de canne à sucre et finalement, sous des plans de cafés, au détour de deux chemins, à côté d'un arbre magnifique et d'un tronc posé à côté. Le spot est merveilleux, on installe nos hamacs autour d'un seul arbre, les sacs en hauteur pour pas attirer d'animal, on se fait un super beau feu en faisant bien gaffe à la flore avoisinante, puis une fois bien installés autour du feu apres la tombée de la nuit, on se prépare de délicieux sandwichs en se sirotant les liqueurs. La soirée est toute douce, les coraux deviennent des amis, on se raconte de belles anectodes tout en créant un max de souvenirs. Le lendemain, au réveil, une dame passe sur le sentier à côté de notre camp et se marre en disant que c'est merveilleux. Elle s'appelle Sandra et elle tient un café dans les hauteurs de la montagne, elle nous y invite pour nous mettre en forme. On se prend un rapide petit dej avec gâteau sec et beurre de cacahuète puis direction les hauteurs. On arrive chez Sandra, une table sous un toit de végétation, calée entre deux maisons de parpaings, au sommet d'une crête terrible. Le café est super d'après les copains, j'en achète une dose pour offrir, j'espere qu'il se conservera bien. On se prend de la confiture locale et je peux tester pour la première fois de ma vie le célèbre combo peanut butter jelly, c'est délicieux.
    On repart ensuite en direction de la mer, la but est que Elsa puisse reprendre le ferry de l'aprem pour reposer son pied, la douleur est trop forte et faut pas forcer bêtement. On est loin de faire de petites marches et on se remange 1200m de dénivelé avant d'arriver à une route où Elsa peut choper un taxi qui la ramène à l'embarcadère, de l'autre côté de l'île. Avec les copains, on se met en quête de notre second bivouac, qui lui sera dans les hauteurs pour pouvoir refaire une seconde vallée le lendemain. Léger approvisionnement avec riz et petit pois carottes et on repart vers le volcan. La route est absolument sublime le chauffeur insiste pour qu'on regarde maintenant alors qu'on va descendre la vallée et qu'on a pas envie de se spoiler. On a bien cru que nous faire descendre était une combine pour nous voler nos sacs mais on arrive bien en haut du volcan. Cette fois ci il y a des arbres partout mais on cherche un spot cosi en direction de la deconde rando, on le trouvera au milieu d'une forêt de pins. Il y a tellement d'aiguilles sur le sol qu'on s'y enfonce comme dans de la neige. On prend peur pour le feu alors on se met à ratisser puis creuser pour enterrer notre foyer. On est super efficace, on récupère les grosses pierres qu'on sort de terre pour tout protéger et on a vite éloigné le danger de la propagation en faisant bien gaffe à se mettre dans un creux, à l'abri du vent. Notre second campement est prêt sous la nuit noire et on s'installe tranquillou en se faisant de grosses papotes autour de petites portions de riz légumes en conserves.
    Réveil vers 8h de nouveau, on plie bagage pour affronter une nouvelle journée, en poussant dans notre forêt, on tombe sur le point de vue de la vallée, c'est époustouflant. 1300m de dénivelé qui plonge dans la mer au loin, parsemé de vie si petite qu'on a pas l'impression qu'elle existe. La pente est vraiment raide, après les deux jours précédents ça nous ruine les jambes pour de bon. On a un rythme exceptionnel et on arrive vers midi à un restau, on entre et on retrouve les Poseadonie par hasard. On s'échange nos plans, eux veulent remonter ce qu'on a descendu ce matin. On termine de manger (un poulet succulent avec des légumes et du riz) pour 14h, ce qui laisse aux copains 3h30 avant la nuit alors qu'on est descendu en 4h, bon courage à eux. Nous on récupéré un taxi qui fait le tour de l'île et qui nous ramene à l'embarcadère pourbretourner à Mindelo. C'était une de mes premières expériences en dodo hamac et en bivouac, un énorme plaisir débloqué.
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  • Day 59

    Cap Vert #2

    December 28, 2023 in Cape Verde ⋅ 🌬 26 °C

    Le soir, Charles et Elaï passent sur le bateau en nous disant que flemme d'un apéro mais qu'ils partent en rando demain et qu'on est tous invités. Réveil 8h00 pour Gerv, Elouan et moi et rendez vous sur la terre à 9h. On apprend à se connaître un peu dans un collectivo, un van où on peut faire entrer de base une dizaine de personnes mais où souvent 15 personnes entrent facile grâce à des places rajoutées, le but est qu'on ne partent pas avant qu'il soit pratiquement plein et le chauffeur dépose tout le monde sur sa route petit à petit. Le prix est super réduit mais c'est bien plus long. Là on a de la chance, tout le monde va dans la même direction et il est plein une fois qu'on est dedans, donc départ immédiat. C'est un grand jeu de chaise musicale à chaque fois les collectivos, au départ personne n'entrent dedans et vers la fin ça afflue de tous les côtés pour profiter du voyage pas cher et de peu de temps d'attente.
    En rentrant dans les terres, on découvre pour le première fois que le cap vert pour se verdure totalement, on est au beau milieu d'une vallée plutôt luxuriante. On s'arrête au milieu de nul part et étrangement les 3/4 des gens descendent ici, notamment un certaine Maria qui nous prend d'affection, elle a une dégaine de nonne mais classe à souhait, avec un petit foulard à la Versace dans les cheveux. Elle nous raconte que toute sa famille habite dans ce oan de la vallée, qu'elle a travaillé à Toulon et qu'elle rend visite à sa famille pour la première fois depuis 3-4 ans. On emprunte donc le sentier avec elle, qu'est ce qu'elle jacte. Elle croise un type qu'elle connait et on a l'impression de plus l'intéresser, alors on poursuit sans elle. Sauf qu'on se trompe de route et en faisant demi tour, elle nous siffle en contre bas pour nous dire de revenir, c'est reparti pour discuter avec Maria. Elle nous raconte que certains spots ici sont à éviter seul parce qu'il s'y trouve des esprits qui n'aiment pas les gens égoïstes et que pour eux, se balader seul dans un endroit aussi beau est une preuve d'égoïsme. Les esprits donnent toujours deux avertissements et au troisième ils "bastonnent" et certains sont revenus muets avec des marques difficilement compréhensible sur le corps, heureusement pour nous, on est 5 et on compte pas se perdre solo. À un embranchement, nos chemins se séparent et on rediscute entre nous. Charles et Elaï sont martiniquais de naissance et ont vécu autour du monde de la voile toute leur vie. Charles a fait parti du pôle Martinique, c'est à dire les gens qui représente la Martinique dans les compétitions de voile dans le monde, c'est pas tout à fait le même que le pôle France, et Elaï a déjà fait 2 transat avec sa mère qui s'était construit son propre bateau, pourtant ils ont 24 et 20 ans. Charles marche pieds nus, il nous explique qu'il a prit cette habitude depuis qu'il est allé en treck en Norvège avec un ami et que ses chaussures lui filaient des ampoules, alors il les a retiré. Mais là où c'est croustillant c'est qu'en Norvège, y'a de la neige et que rapidement ses pieds ont perdu leur sensibilité, il ne ressentait plus ses doigts de pieds, si bien qu'il marchait dessus dans la descente tellement ils étaient devenus inutilisable. Deux forces de la nature somme toute.
    Le paysage devient carrément hallucinant quand on arrive en haut de notre pic, des montagnes très raides et abruptes, presque des falaises à certains endroits, et une vallée verte et luxuriante avec des cultures de canne à sucre, quelques arbres du dragon (une espèce endémique du cap vert). Maria nous disait que cette vallée a subi une sécheresse de 36 ans et Elaï nous le confirme, quand elle a fait cette ballade 4 ans auparavant, elle n'avait pas croisé du tout ce paysage. De l'autre côté de la vallée, pareil, luxuriant dans toute la vallée et sec aux abords de la mer, notre vue se dégage jusqu'à la ligne d'horizon, qui est tellement haute comparé à d'habitude, les nuages sont bien en dessous. C'est la première fois que je peux voir aussi loin de ma vie je pense, notre montagne n'est pas si haute, environ 1 500m, pourtant avec vu sur l'océan, la sensation de l'infini est bien plus forte que dans les Alpes.
    On revient sur nos bateaux vers 15h, on avait pas prévu à manger, complètement affamé on dégomme tout ce qui traine et repos l'après midi, il fait un temps magnifique, on se baigne de partout. Le soir, on se prend un pot au bar avec Gerv pour profiter du wifi et on croise Charles et Elaï, on se boit un coup avec eux et ils proposent de poursuivre l'apéro chez eux. On dépose nos affaires et on chope Elouan au passage, bam rendez vous sur Anatole. Leur bateau est un petit 9,6m de régate et putain ce que c'est beau un bateau de la sorte. À la base, rien n'est pensé confort mais tout est pour la performance, tout le greement est en dynema, des bouts tout fin mais extrêmement résistant (bien cheros aussi), les cabines sont assez rudimentaires, les rangements aussi mais le bateau est superbement bien agencé. La soirée se déroule si bien qu'ils nous proposent de faire la nav ici Mindelo sur leur bateau au lieu du notre qui doit partir le lendemain matin pour raccompagner Helo à l'aéroport. On accepte avec grand plaisir avec Elouan et le lendemain 8h, on se pointe sur leur boat avec un petit sac pour deux jours après avoir fait une bise à Héloïse qui rentre en France. On s'était couché à 4h donc aussitôt arrivé, aussitôt recouché d'un commun accord avec les copains, réveil 11h30. On va se balader en ville, petit restau à base de cachupa - le plat traditionnel du cap vert, un mélange de patates oignons et fèves, servie souvent avec un oeufs un tout petit peu de viande -, celle ci n'est honnêtement pas bonne, trop sèche mais pas de galère on se marre quand même. On va ensuite faire quelques courses pour leur bateau et on en profite pour acheter de quoi faire un rougail saucisses, notre petite spécialité quand on se retrouve tous les deux avec d'autres personnes avec Elouan. On passera aussi une bonne heure dans le magasin de pêche de la ville où Charles va faire une multitude d'emplettes pendant qu'Elaï va tout faire pour l'en dissuader. Retour au bateau, c'est baignade après grosse vaisselle, Charles me confie qu'après de la côte, à cent mètres, se situe une avancée de roche dans l'eau qui regorge de poissons. J'enfile le masque et le tuba (l'occase de prendre ma revanche sur le tuba que j'ai du mal à utiliser) et je file voir ça, je n'ai tout bonnement jamais vu autant de poissons de ma vie, il y a des bancs infinis de sardines ou de poissons qui y ressemblent. C'est tellement impressionnant les bancs, la façon dont la totalité des poissons savent quoi faire sans qu'il y ait de leader, l'information passe entre eux à toute vitesse et le banc s'écoule autour des récifs ou d'autres poissons. Je vais dedans pour voir comment ils réagissent et ils m'evitent à peine, jamais je ne pourrai choper même une sardine parce qu'elles sont super habiles, mais elles sont à 30 cm tout autour de moi, c'est merveilleux. Je me calme quand j'entends le bruit d'un moteur pas loin, les pêcheurs connaissent le spot par cœur et je n'ai pas du tout envie de finir dans leur filet alors je mets les voiles.
    La soirée finit tôt cette fois ci parce que c'est réveil 6h le lendemain pour arriver vite à Mindelo et profiter de l'après midi. 6h it is, il fait nuit noire à la grande surprise de Charles et on part tranquillement après avoir récupéré l'ancre. On a pas de vent donc Charles est deg de pas pouvoir nous montrer les perfs de son bateau, mais on se marre bien alors tout va. Il se fait bouffer rapidement sa ligne qui a mit il y a 30min et ça commence à crier des "J'abandonne" et des "Je te l'avais dit" de leur côté. On les reboost un coup avec Elouan et on remet la traîne à l'eau avec cette fois l'appat magnifique de poulpe qu'ils ont acheté 20€ la veille. En 20min, une dorade coryphéne qui mord à l'hameçon, je la remonte à la canne - première fois pour moi que je remonte un truc à la canne d'ailleurs - elle est magnifique, on la prépare et hop direction la cuisine pour Elouan qui prépare à manger. Je chauffe Charles pour remettre la traîne à l'eau pour pêcher plus et faire un maxi festin ce soir avec Damona, au bout de 15min, la traîne fait effet et Charles remonte un tazard noir ou Wahoo, magnifique poisson tigré de 1,05m de longueur, il est grandiose. On passe ensuite 40min a préparer un sevice de Wahoo en guise d'entrée, c'est absolument délicieux et il reste suffisamment de tazard pour manger à 10 ce soir, c'est parfait. On arrive assez vite à Mindelo après manger et on croise le bateau des coraux dans la baie au mouillage, alors on les siffle de tous les côtés mais ils n'ont pas l'air sur leur bateau, ils sont sur le nôtre et on s'en aperçoit en approchant. Pour flex, Charles et Elaï font la manœuvre en arrivant à la voile, c'est la grande classe, tout le monde est bouche bée, le bateau se maîtrise comme un dériveur ou un cata de voile légère, ça rappelle nos bêtises à naviguer entre les bateaux au mouillage avec Antoine sur l'archipel des Glénans. On aide les deux à tout ranger sur le bateau et direction Damona pour dire bonjour à tout le monde. L'ambiance est survolté à bord, les coraux sont arrivés y'a deux heures de leur traversée depuis les Canaries et ils s'enfilent une bouteille de rhum en mode Ty punch sur notre pont, en toute tranquillité.

    Le soir, on mangera avec l'équipage d'Orion et Anatole sur notre bateau le tazard pêché le jour même, préparé par mes soins tandis que Cécile d'Orion a préparé un délicieux accompagnement et son mari a fourni le vin, encore un repas étoilé.

    Nouvel an
    On nous avait dit que le nouvel an était une institution à Mindelo et qu'on le pouvait pas le manquer. Il dure deux jours là bas et on en a profité à fond. Le 30 au matin on se rend compte qu'une énorme scène est en train de se monter en face du palais de la ville, en haut de la rue principale. En se renseignant un peu, on apprend que Mo Kalamity, une artiste qu'on écoute à fond avec Youen passe le soir même avec d'autres artistes et le lendemain pareil. Sur la place Césaria Evora, un immense bar couvert se monte, avec aussi des murs de sons par ci par là, on assiste aux prémices d'une festival, ça à l'air dingue. On a passé la journée ensemble avec Youen et vers 15h, on se pète une Pirate, une bière bien forte pour appeler Loulou pour son anniversaire. La bière est bonne allrs on en achète deux chacune pour tous les copains et on rentre au bateau vers 18h. Les coraux sont là et on commence le before ensemble en se buvant des petits coups par ci par là. Énorme plat de pâte pour tout le monde, ça discute bien et on se marre puis vers 22h, on bouge car les concerts sont censés commencer. On emporte nos bières avec nous et zou on se retrouve dans une marrée humaine de gens qui attendent comme nous le début des ostilités. Dans les rues sont installés partout des petits stands qui vendent friandises, parfois viandes, et boissons en tout genre, de vrais petites épiceries tout les 4m. On se balade avec les copains en quête d'activités mais les concerts ne démarrent pas, Charles et Elaï en ont marre et ils rentrent, Elsa aussi. À force le premier concert démarre avec 2h de retard, c'est un rappeur local et ça à l'air d'être une sacrée star. On sacrement ivre avec les copains et le son bouge sacrement bien alors on va là où ça bouge le plus, on se fait alors potes avec une bande de cap-verdien et ça part en pogo avec eux. C'est carrément la guerre des sourires, on se marre à gorges déployées. Ça ce saute dessus quand il faut et ça aide à chercher les claquettes des uns quand les autres marchent dessus. Je me retrouve même à protéger un type qui roule un joint pour pas qu'il se fasse écraser, sacré bordel. Une fois le concert du rappeur terminé, la grande majorité des jeunes se tire je ne sais où et ils passent de la musique un peu électro molle en attendant l'artiste suivante : Mo Kalamity. Encore une fois l'attente est interminable alors avec Paul on part découvrir les environs et on tombe dans une rue parallèle sur une porte qu'on nous avait décrite : celle d'un disquaire. La porte est à moitié fermé et le proprio nous voir hésiter alors il vient à notre rencontre et nous dit que c'est seulement pour les membres ce soir. On ne comprends pas trop la situation mais en demandant seulement à entrer, on se retrouve à l'intérieur. Changement d'ambiance immédiat, les basses sont remplacées par un disque tout pépère qui tourne sur une platine, il y a 6 personnes en tout dans la salle, les deux proprios Antoine et Miriam, un couple qui est à une table et nous deux. On se prend une petite caipi et on attend sagement, ayant du mal à nous remettre du Switch violent de mood. Ce lieu est vraiment à part et semble bien refléter l'envie de liberté d'Antoine, aucune des assises n'est à la même hauteur, énormément de d'objets upcyclés, des tissus teints font de légers mouvements au plafond. Sur les murs on retrouve des phrases révolutionnaires peintes au pinceau épais, sur l'un on voit énormément de photos, sur l'autre un assortiment de plantes. Je vais demander au proprio des détails sur ce qu'on écoute. Il me raconte alors que c'est un révolutionnaire cap verdiens et qui, de part sa musique, à réuni le peuple et a été décisif lors de la libération du cap vert face aux Portugais. Sa musique s'est alors propagé aux autres pays d'Afrique et a été la source d'espoir pour de nombreuses nations qui ont commencé leur indépendance. L'album s'appelle Independencia de Teta Lando et je conseille à tous d'aller l'écouter. J'étais sacrément content quand je suis allé le télécharger et que j'ai vu que l'un des titres de l'album était déjà dans l'une de mes playlists. La caipi est succulente, il y a des fruits rouges dedans et on regarde quelques albums qu'il possède. Une vraie petite escapade loin du tumulte du dehors, mais assez rapidement, cela cesse et on retourne dans le brouhaha pour aller écouter Mo Kalamity qui a commencé. On arrive à rejoindre certains copains, tout le monde est turbo criblé, maxis zooted, Faya Babylon et on s'écoute l'une des artistes les plus chill que j'ai eu l'occasion d'entendre. Le concert merveilleux, les bras s'agitent, les paupières se ferment et tout le monde entre dans un mood introspectif, énorme régalade. À la fin du concert il est 4h, il doit y avoir encore un autre artiste et ils remettent du son pour changer le plateau. On repart se balader mais on est bien fatigué, on rentre tranquillou sur le bateau vers 5h pour discuter sur le pont avec les coraux.

    À partir du lendemain, on communique avec les coraux seulement sur la vhf, avec le channel 6. On laisse allumé notre vhf portable et dès qu'on veut se dire un truc, c'est beaucoup plus rapide que toute autre communication. On impose littéralement ce qu'on veut dire, ça a donné lieu à de superbes blagues. Toujours est il que toute la journée on parle du before du nouvel an sur notre bateau sur le channel 6 et vers 21h, Charles et Elaï se ramènent, les coraux au grand complet aussi, une partie de l'équipage des Poseadonie, l'équipage d'un bateau en face de nous sur le ponton : Atlantea ainsi que des bateau stoppeurs. On est donc une bonne vingtaine sur notre bateau, il n'y a plus aucune place nulle part. Tout le monde a ramené des petits trucs à boire et à manger, c'est très joyeux. On se met à mixer dans le carré avec l'enceinte entre l'intérieur et l'extérieur du bateau, on impose l'ambiance techno et ça prend bien, ça nous rappelle nos soirées à Grenoble. On s'échange les platines de mains en mains, chacun y va de ses petites pépites, le mood est super bienveillant et on se fait des maxis B2B2B. À côté de ça on est pas tous dans le même genre de mission, Swann des coraux tchatche de plus en plus avec une Margot de l'équipage de Atlantea, mais chose bizarre, Margot est avec son copain sur le bateau. Avec Elsa on suit d'un oeil leur rapprochement et va y que ça se compare la taille des mains, vas y que ça va sur la plage avant du bateau pour discuter solos. À la fois c'est pas notre pote la Margot donc on s'en cogne mais on est sacrément gêné quand le copain en question commence à la chercher et qu'il part du bateau pour la retrouver.
    À 00h00, feu d'artifice au dessus du port, on se régale à être pile en dessous avec en bande originale 93 Bang Bang pour fêter la nouvelle année. Vas y que tout le monde se claque un becquot et que ça commence à déguerpir de notre bateau pour aller à la soirée en ville. Tout le monde est parti sauf les coraux et nous vers 1h, on prend nos affaires et on s'arrache. Direction cette fois ci la scène/bar place Césaria en passant par les petites épiceries pour se prendre des petits verres. Le son bouge bien mais on a l'impression d'être en boîte de nuit, tout le monde est hyper bien sapé. Ça danse le collé serré de partout, c'est limite si ça se fait pas l'amour sur place. Moeurs étonnantes mais ils ont l'air de s'amuser comme tout. Sur le chemin on rencontre des français et des capverdien et on s'arrête à chaque fois pour discuter 30min. La soirée est plus tournee autour des rencontres que du son et c'est pas plus mal après le before de folie qu'on s'est mis.
    Vers 4h, on blague avec des cap verdiens qui nous propose une photo avec Paulo. Je prends Paul en photo avec eux et l'un me dit "je te prends en photo comme ça tu seras dessus" je lui file mon portable et le temps que je réalise, il s'était barré en courant. J'ai essayé de le chercher des yeux mais la foule est omniprésente, aucune chance que je le retrouve. On essaye de prendre en facture un des mecs en pensant qu'il est pote avec le voleur mais au bout de 30min, il a fait 4 groupes différents et on abandonne. Je rentre me coucher un peu dégouté de la soirée, j'aurais voulu m'en moquer mais j'arrive
    pas. J'm'en occuperai plus tard.
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  • Day 51

    Cap Vert - 1ere partie

    December 20, 2023 in Cape Verde ⋅ 🌬 26 °C

    Découverte Mindelo
    On arrive à Mindelo juste avant le weekend, ça nous laisse un bon moment pour souffler et prendre un peu connaissance de la ville. L'ambiance est assez particulière, la marina est blindée d'européens et en grande majorité, de français. Un bar flottant est situé pile entre les pontons des bateaux du port et la Terre, il a le wifi, ce qui fait de lui le repère idéal pour tous les gens séjournant à Mindelo en bateau. En revanche dès qu'on sort de la marina, on se fait rapidement dépayser. Une demi douzaine de types viennent m'aborder à chaque fois, pour me vendre des services, de la weed, de la coke ou "des femmes". C'est marrant comme ceux ci sont les plus grandes galères mais aussi ceux qui parlent le mieux le français de l'île, chacun explique qu'il a appris en côtoyant les gens du port. Sinon ils demandent de l'argent directement, ou alors de faire un tour en "Aluguer", des chauffeurs privés moins cher que des taxis, ou proposent de te vendre des renseignements.

    La ville est magnifique en apparence, des bâtisses de 2-3 étages pleines de couleurs s'accumulent dans le centre ville. Assez rapidement néanmoins, on tombe sur des favelas, des amoncellement désorganisés de parpaings, de bout de tôle et de tissus. Un dénommé Georges nous a fait visiter la ville le second jour, on était bien content d'être avec lui au moment de passer dans les quartiers les plus pauvres. Il y a énormément de chiens qui se baladent à Mindelo et il paraît qu'ils sont tous gentils, autrement les habitants les tuent rapidement. Dans la favela, les gens mangent par terre, des animaux mort se décomposent, il règne une odeur vraiment pas nette.

    La ville est réputée pour être la capitale de la musique cap verdienne. On a eu du mal à s'en rendre compte pendant les premiers jours, mais assez vite on a découvert que ça chante et joue de la musique en permanence dans chaque espace pouvant accueillir du monde. C'est fou comme on s'aperçoit qu'ils ont des caissons de musique dans tous les lieux possibles, typiquement dans la rue à côté du marché à poissons, collés à des vendeurs de viande grillée à la sauvette.

    Une autre des spécificités de la ville est que c'est un point de départ idéal pour la transatlantique. Il y a donc une multitude d'équipage qui se créent et qui se désagrègent. Sur l'ensemble de notre séjour, une bonne douzaine de personnes ont dû nous demander de les prendre en bateau stop pour faire la traversée. On a croisé absolument tous les profils, jeunes qui construisent leur projet autour du bateau stop et qui embarquent pour un tour du monde, des connaissant la voile, d'autres non, un père de famille qui s'entraîne pour faire la transat avec sa compagne l'an prochain, des filles sans expérience qui se font harceler par leur skipper et qui veulent changer de bateau... Après la première semaine, on croise 4 joyeux lurons au bar en train de se mettre une sacrée guerre, les gars sont pas fâchés avec l'alcool. On discute avec eux, ils viennent de finir la traversée depuis les canaries et tout à l'air de se passer merveillsement bien. Ils sont juste en face de notre bateau donc on se fait visiter mutuellement et la soirée se poursuit sur le pont. Pourtant, quelques jours plus tard, on apprend qu'ils s'embrouillent avec leur skipper pour des raisons inconnues. Et quelques jours encore après, on les croise avec toutes leurs affaires au bar, le capitaine les as viré parce qu'ils pouvaient plus se voir. Parmis eux, Paul, un très chic type avec qui on se Vera souvent à Mindelo. Il nous parle d'un petit bar disquaire très sympa, je note l'adresse. Lui travaille chez Deezer et a son collectif de drum and bass à Paris, alors on en vient vite à discuter musique, vraie régalade. Toujours est il qu'il n'a pas de bateau et qu'il va se débrouiller après 3 semaines pour recopier un bateau et lier des liens d'amitiés avec chacun d'entre nous et pas mal de monde en ville. On fera d'autres rencontres avec des bateau stoppeurs en soirée ou auprès des bars, souvent une chouette expérience, sauf pour les femmes. Elles ont l'air de se faire systématiquement emmerder par leur capitaine, comme ci la rétribution devait se faire en nature.

    Biosfera
    Assez vite, on a été en relation avec Biosfera, ils nous ont fait découvrir leurs locaux en périphérie de la ville, avec le camp de base principale et leur atelier pas très loin. Ça a été notre première occasion de prendre un Aluguer 4*4 en montant dans la remorque à l'arrière, grosse sensass. À la suite de la visite, Hercules met en mot ce qu'il attend de nous : un business plan pour monter une entreprise qui vend les produits en plastique recyclé de leurs ateliers. L'entreprise a pour vocation de générer assez de profit pour payer le local et le salaire des ouvriers qui bossent à l'atelier à temps partiel, confectionner de nouveaux produits à vendre car les leurs sont complètement open source et ils n'ont donc pas d'image de marque, si on a le temps, de travailler sur la mise en place d'un conteneur qui sera le prochain atelier (disposition, raccords hydrauliques et électriques).
    On prend notre mission tel un vrai travail et la routine qui va avec, 9h-17h, l'équipage est séparé en deux teams, l'une business model et l'autre création de nouveaux design (avec Paul et Youen), tantôt on taff sur les ordis avec des logiciels de modélisation 3D, tantôt on taff dans l'atelier avec Hercules pour faire des tests sur la structure du plastique. Au fur et à mesure des jours et du temps passé à Mindelo, on se rend compte que Biosfera et une asso vraiment implantée sur le territoire. On retrouve leur nom dans le marché central avec des affiches de prévention, des sculptures chocs aux abords de plage avec des panneaux de sensibilisation ainsi que sur des grandes fresques sur des écoles. C'est carrement valorisant parce qu'on sent qu'on peut réellement avoir un impact en travaillant avec eux sur les problematiques plastiques. Cependant, quand je côtoie Hercules, il raconte qu'il préférerait être agriculteur et je sens bien qu'il s'en carre pas mal de l'avenir de Biosfera.
    On devient des habitués d'un petit restau/épicerie qui à force de nous débarquer, prépare une table de 6 pour nous chaque midi, on y mange des sandwichs entre 0,75€ et 2€ ou le plat du jour est à 3€. C'est un vrai moment de pause dans la journée, on rencontre quelques cap verdiens qui parlent français, notamment José. José doit avoir dans les 60 ans, court sur patte, il a l'air toujours alcoolisé mais on se rend compte à la longue qu'il a un petit souci de mémoire. La seule chose dont il se souvient chaque jour c'est qu'Elsa a la "same face" que sa fille et il nous le répète à chaque fois qu'on le croise, si bien qu'on lui demande une photo. Il nous la montrera le lendemain tout fier et forcé de constater que sa fille avait pas mal de traits en commun avec Elsa.

    Après 2 semaines et demi ensemble, Biosfera est partie en vacances. À ce moment, nous avions terminé le business plan et donné les plans d'une poubelle, d'une table pliable ainsi que d'un banc. Malheureusement, au vu des capacités de production de plastique actuelle, il faudrait pouvoir vendre à prix d'or le mobilier créer par l'atelier, alors que le matériau est moins bon que le bois et que plus de la moitié de la population de Mindelo à l'air de vivre dans des bidons villes. En se baladant, on tombe sur des chaises fabriquées à partir de vieilles cagettes ou de vieilles palettes et chacune des solutions qu'ont trouvé les habitants de Mindelo à l'air plus solide que le plastique qu'on voudrait vendre. En terme structurel, me plastique est bien trop flexible et il faudrait donc utiliser une quantité bien trop grande pour chaque objet pour le rendre utilisable. Cependant les prototypes de la poubelle et de la table pliable ont fonctionné et les copains ont créé des ponts pour essayer de les vendre à des hôtels de la ville.

    Sillage Atlantique (soirées, mix, chants, Bordeaux, bouteille)
    Pendant notre mission avec Biosfera, on a rencontré un des premiers équipages vraiment chouette de notre périple, Sillage Atlantique, c'est 4 Bordelais, chacun chef scout marin, massifs et barbues (sauf un frêle, imberbe et malade en mer par dessus le marché). On se croise rapidement au bar et on part en soirée avec eux avec Gervais et Elouan. L'ambiance est super cheche parce que deux filles qu'ils ont rencontré au bar sont avec nous et j'ai l'impression que le but est plus de les rencontrer elles que nous, pour Elouan aussi d'ailleurs. Ceci dit on se marre bien et petit à petit j'arrive à bien discuter avec chacun, on va à un petit bar extrêmement pépère, le Jazzy Bird, où des chanteurs sont posés dans la rue et 5-6 tables sont posées dehors pour profiter du son, typique ce que j'attendais de Mindelo quand on m'en parlait. Mais le bar et la musique ne sont pas au goût des filles, qui viennent de s'acheter de la coke à des vendeurs à la sauvette, on est carrément pas sur la même longueur d'onde. S'ensuit alors une longue marche pour rejoindre une boîte de nuit, parce que pourquoi pas. On rencontre une bonne demi douzaine de mec bizarre sur le chemin, mais on est une dizaine donc ça le fait bien. Arrivé devant la boîte il y a une dizaine de vigiles, j'entre dans trop me poser de question avec Elouan et je tombe sur tout ce que je redoute. Des canapés de mauvais goût avec une pseudo ambiance tamisée, du son de loveur et 5 personnes maximum à l'intérieur alors qu'il doit être facile 1h du matin. Les potes ne suivent pas à l'intérieur alors je me réfugie dans les toilettes pour pas devoir agir d'une quelconque façon dans ce lieu qui me terrifie. Les copains ne viennent toujours pas alors je me pointe à la porte, ils se sont fait recaler parce qu'ils etaient en claquettes, la honte mais c'est honnêtement pour le mieux. On ressort en se marrant en quête de musique et d'endroits où faire la fête, sur le retour on croise un type avec une bar de fer, bien content qu'il soit tout seul à ce moment là et on se croise gentilemment. On repère un bar dans l'enceinte d'un terrain de tennis, y'a de la musique et ça à l'air ouvert alors on tente. On comprend que c'est la fin d'un mariage, 2-3 personnes rangent le gâteau mais les serveurs nous disent qu'on peut venir s'installer. À partir de ce moment les filles n'intéressent plus les Sillage et on commence à sérieusement bien se marrer. Le paroxysme est atteint quand Stan nous propose un battle d'accrosport, on relève le défi avec Elou et Gerv. On était pas prêt pour la dose qu'ils nous ont mise, un pilier qui tient un type sur les épaules qui lui même tient un type avec ses pieds sous les aisselles du troisième, le tout en tournant pour faire décoller le troisième du sol, magistral. Voir ça à 4h du matin ça n'a pas de prix et on se marre comme c'est pas permis.

    Dans les jours qui ont suivi on les a invité à une soirée sur le Damona, on a fait à manger, énormément discuté, on leur a appris à mixer pendant qu'ils nous racontaient leur vie à Bordeaux. En une soirée on s'est vraiment bien rapproché d'eux et on s'est promis de se revoir de l'autre côté de l'Atlantique, ou bien sur le sol français dans les années à venir. Ils nous ont aussi montré ce que ça donne lorsque 4 personnes savent chanter ensemble, c'était magnifique, surtout avec les chants puissants comme Potemkine ou la Strasbourgeoise.
    Certains de leurs partenaires sont des domaines Bordelais et ils nous ont filé une bouteille en cachette dans notre frigo juste avant de partir. On s'est promis de la boire à une belle occas.

    Tarrafal
    Héloïse nous a rejoint vers le milieu de notre aventure avec Biosfera, ça a fait un bien fou à l'équipage de côtoyer une nouvelle personne et de voir Paul aussi content. Chacun des membres de l'équipage a pu steever avec le couple, ça a permis aux deux d'avoir des moments privilégiés avec tout le monde. On s'est fait une aprem plage et caipi pour ma part.
    Il fallait quand même qu'helo voit ce que le bateau donne lorsqu'il est pas fixé à une ancre au mouillage. Alors on est parti en direction de Sao Nicaulao, une île à l'est de Sao Vicente, histoire d'y passer Noël et d'être de retour à Mindelo pour le vol retour d'heloise. En allant à Sao Nicaulao, on s'est arrêté à un mouillage à l'abri d'une île déserte, une réserve naturelle où on n'a pas le droit d'accoster. Le matin, on se prépare à partir et du seul bateau au mouillage sort un couple qui vient nous voir en annexe. Ils voulaient nous emmener faire du snorkelling avec eux, aux abords d'un rocher, à quelques dizaines de mètres de notre bateau. C'est un couple de Belges qui naviguent sur Orion, un grand cata tout neuf, qu'on recroisera plus tard. Ils viennent d'un mouillage sympa à Tarrafal, la ville où on avait prévu d'aller à Sao Nicaulao et nous conseille de contacter Anatole, un bateau avec deux jeunes qu'ils ont rencontré là bas.
    On repart donc direction Tarrafal et on y arrive le 24 décembre, vers 14-15h, le mouillage est magnifique et bien protégé, l'eau y est magnifiquement claire et le temps est chaud et doux. On se réparti les différentes tâches pour passer un super réveillon et après une baignade autour du boat, tout le monde met la main à la pâte. Avec Elouan Héloïse et Paulo on débarque sur la plage de sable noir en annexe et une multitude de gosses viennent nous voir et nous aident même à porter l'annexe vers une attache. Ils nous garantissent qu'ils gardent l'annexe pendant une heure, mais de nature méfiante venant de Mindelo, on l'attache à la chaîne. On decouvre une petite ville avec pas mal de monde, mais l'impression qui se dégage en premier du lieu est beaucoup plus posée qu'à Mindelo. Ça fait tellement du bien de ne pas se faire sauter dessus par des gens qui veulent qu'on paye pour tout et rien. Il y a des enceintes devant pas mal de boutiques, des gens qui picolent devant un bar ouvert, ça rigole et ça s'apprête d'un peu partout en prévision de Noël. Nous on recherche de quoi faire un bel apéro et une pièce de viande ou de poisson pour le plat principal. Après avoir fait le tour des deux supermarchés, tenus par des chinois qui vendent absolument tout et rien (ils ont d'ailleurs l'impression de monopoliser le business local et n'ont pas l'air apprécié même si tout le monde va acheter là bas), on va en quête de poisson avec Elou vers les barques de pêcheurs sur la plage. Ils nous vendent un petit thon de 3kg puis le vident devant nous, il est encore tout frais. Retour sur le bateau, on commence à faire à manger tous ensemble. Puis on mixe un peu, on s'habille et l'apéro est parti. Houmous, chips, saucissons, andouillette, fromage et foie gras (français ramenés par Héloïse), puis on passe au plat, des grands steaks de thon cuit par mes soins - très fier de ceux là d'ailleurs, cuisson magnifique - accompagnés de pommes de terres et de courges au four, puis tarte au citron non meringuée pour le dessert. À la fin on crevé de chaud, on est fatigué et on a légèrement trop bu, tant et si bien qu'on se couche hyper tôt pour un soir de réveillon. La moitié de l'équipage n'aura pas été debout pour la naissance du p'tit Jésus, mais on s'est super bien marré et le repas était délicieux, une vraie tablée d'adultes. C'est fou comme mettre une chemise et boire du vin rouge assis à table fait facilement de nous des adultes , et j'adore ce genre de jalon avec mes potes où j'ai l'impression de grandir à leurs côtés.

    Le lendemain, après une belle grasse matinée, je vais voir les gens au mouillage pour leur souhaiter joyeux Noël, ça n'est que des français, sur la petite dizaine de bateau, que des français. Je vais trouver le Anatole et fait la rencontre de Charles et Elaï, je leur propose de boire un coup avec nous ce soir pour se rencontrer. Au matin on a pas de cadeaux sous le sapin, mais j'dois avouer que c'est pas nécessaire, il fait terriblement chaud et on se baigne dans une eau magnifique, tout le monde en maillot et on se marre à faire des acrobaties autour du boat. L'aprem, je file avec Paulo, Héloïse et Elsa sur la plage de la ville (pas celle où on arrive en annexe, un peu plus loin), le sable noir est tellement chaud qu'on peut pas marcher dessus, alors on file vite à l'eau. Elle y est peu profonde et claire comme tout, alors on prend les masques et on s'éloigne un peu pour voir un tas de petits poissons se balader pépère. En m'éloignant j'ai croisé le chemin d'une grosse tortue, c'est tellement majestueux quand c'est dans l'eau et très loin d'être lent. J'ai essayé de la rattraper mais elle m'a rapidement dosé.
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  • Day 40

    Traversée Cap Vert - #2

    December 9, 2023 in Cape Verde ⋅ 🌙 25 °C

    05-12
    Quatrième jour de navigation, j'me lève doucement aux alentours de 9h. Je sors la tête du bateau et je trouve les copains en train de prendre des photos avec une bonite magnifique. Le bestiau ressemble à l'idée que je me fais d'un petit thon (81cm quand même) avec des rayures noires sur les flancs, la notre en compte 4 de chaque côtés. Elle est bien plus dodue que les dorades qu'on a péché jusqu'alors, sûrement aux alentours de 3-4kg.
    À peine avoir mis la bonite sur la table que Paul et Gervais remettent les traînes à l'eau. Les copains se mettent à découper le gros poisson tranquillou et on aperçoit sa chaire rouge, ça va être une première pour nous à cuire, sachant que je suis de cuisine le midi, je réfléchis déjà à comment lui rendre hommage.
    Une fois qu'ils ont fini de lever quelques pavés et un gros filet, on check les lignes avec Paulo, je vois passer un truc dans l'eau rapidement et soudainement les deux traines se tendent d'un coup. Je me dis qu'on a chopé un truc flottant et ayant les doigts tout cremeux (crème solaire nécessaire même à 10h), je vais chercher des gants pour relever la ligne. Lorsque je reviens, Paul et Gervais me crient que c'est des poissons. On vient de ferrer deux dorades coryphenes d'un coup, sûrement un banc. L'une se détache toute seule, l'autre finira dans notre seau. On commence à être rodé, les poissons souffrent de moins en moins. On perd cependant notre crochet a poisson dans la manœuvre, ça fait bien chier, il etait super utile dans ce genre de situation pour pas se blesser. Pris d'une folie poissonesque, Paul et Gervais remettent les lignes à l'eau. Tout est parti des Suédois et de leur Espadon, on veut le notre aussi.
    Pendant que l'on vide une daurade, les deux lignes se tendent de nouveau.
    Ça faisait pas mal de temps que j'essayais de les raisonner sur le stockage de notre poisson déjà sur le bateau et ils commencent à accepter d'y réfléchir lorsqu'on remonte deux daurades de plus. On laisse une s'échapper, puis on récupère l'autre. On aura donc ferrer 4 daurades et une bonite en l'espace de 3h, c'est hallucinant. Sur le bateau, ça parle stratégie pour l'espadon, le roi des mers. L'espadon est le poisson le plus rapide du monde et le plus volumineux du livre "Poissons" qu'on a sur le bateau, qu recense les poissons qu'on peut pêcher. Un espadon peut faire jusqu'à 4m et 600kg, l'idée même que 600kg de muscle morde un truc attaché à Damona me terrifie, mais pour la prospérité l'histoire est belle.
    On calme les ardeurs de tout le monde et on arrête de mettre des traines à l'eau, rangement et repos mérité pour le petit poulpe et le petit rapala.

    Entre les poissons et la vaiselle il est rapidement l'heure de faire à graille. On part avec Elsa sur fondue de courgettes et poireaux aux epices, riz pilaf et steak de bonite fraîche. J'ai jamais ne serais-ce que goûté une bonite donc c'est du total freestyle, mais viande rouge oblige, je les cuits à feu vif de chaque côté dans une poêle bien grasse avec du poivre. J'avais pris soin de virer les nerfs et les arrêtes (la pince à épiler était de sortie), le résultat est succulent, ça fond dans la bouche et le goût se rapproche terriblement du bœuf. Énorme réussite, on devient fou autour de la table, Gervais se régale tellement qu'il en vient à apprécier les poireaux, trop top.

    Grosse sieste pour digérer, je me réveille avec les copains sur le pont qui s'agitent. Je sors la tête de ma cabine, des Dauphins de partout. J'suis tout bien réveillé donc je vais les rejoindre et bien que ce soit exactement ce que à quoi je m'attendais, je suis quand même surpris. Ils sont énormément, ils semblent arriver de partout. Certains viennent du large et nous foncent dessus, d'autres jouent à droites et à gauche de l'étrave. Plusieurs dizaines sont sur les côtés et derrière le bateau, il est complètement illusoire d'essayer de les compter. Il en surgit 8 dans chaque vague, certains vont tout droit, d'autres passent le plus près possible de l'avant du bateau, tous se grillent la priorité, c'est un énorme foutoir. Un peu plus au large du bateau (20-30m), des p'tits filous font des mega bond et atterissent comme ils peuvent dans l'eau. On identifie plusieurs espèces differentes dans ce gros banc, c'est merveilleux. Je passe une bonne vingtaine de minutes à observer cette chorégraphie qui semble complètement désordonné, pourtant chacun sait exactement ce qu'il fait, personne ne se touche, ils avancent dans le flux de chaque vague.
    Plus le temps passe et plus mon regret de m'être mis à l'eau trop tard la dernière fois refait surface. J'me mets en moins de deux en maillot et direction la jupe du bateau. Il doit bien en avoir une quinzaine collés au bateau juste sous la jupe, ça me refroidit momentanément. Mais l'envie est toujours là, il faudra bien le faire un de ces jours donc pourqioi pas maintenant. On descend l'echelle de bain pour voir comment ils reagissent, voir s'ils essayent pas de mettre des coups dedans, à prioris ça va, ils sont pas perturbés.
    J'enfile un masque et je descend progressivement les barreaux de l'échelle tandis que paul et gerv me decrivent leur position autour de moi. Puis vient le moment où je lache les jambes, les bras agrippant fermement un barreau de l'echelle, la tête vers le bas.
    Au départ je ne vois rien, l'eau est beaucoup plus trouble que les derniers jours, elle est bleue marine en surface, voir grise puis vert foncé dès quelques mètres. Je sors la tête de l'eau, les copains me crient à gauche, à droite, je me remets dedans directement et là c'est completement bluffant. Les dauphins nagent à quelques mètres de moi, il doit en avoir 4-5, ils me regardent. Ils sont moins en surface que lorsqu'ils jouent à l'avant du bateau, descendent un peu en profondeur pour remonter à côté de moi. La situation est complètement folle, je m'aperçois que j'entends très bien leurs cris aigües dans l'eau. Parfois ils s'approchent un peu près, ça fait drolement peur alors je serre les bras pour me remettre rapidement sur l'échelle. C'était court mais intense, Paul qui me regardait s'est déjà mis en maillot et veut tester l'expérience à son tour.

    Il fonce avec moins d'appréhension que moi maintenant que je suis revenu entier, les copains se decident eux aussi à se mettre en maillot. Alors petit à petit toutble monde se met à l'eau les uns apres les autres, parfois deux en même temps en mettant un grand bout auquel se suspendre derrière. Ça crie de joie ou de peur à l'arrière du Damona, l'adrénaline est au maximum.
    Petit à petit cependant les dauphins se tirent et le peu de soleil qu'on percevait derriere les nuages aussi, on voit presque plus rien dans l'eau alors on cloture l'expérience. On en ressort tout bouleversé et tout fatigué, le bateau avançait vite mine de rien, les bras ont bien pris.
    Gros goûter avec galette sucre pommes expérimentales cuisinés par Youen, chocolat au lait ou thé puis jeu de société autour de la table. L'eau était à seulement 23,3° pendant cette affaire, on a chopé des réflexes de luxe, c'est presque froid pour nous.

    Ceci dit, il n'y aura pas eu un seul jour sans dauphin depuis notre départ des Canaries

    06-12
    Aujourd'hui magnifique levé de soleil, je suis debout à 5h pour mon quart donc j'ai tout le temps de le voir se développer. Des nuances d'orange, de violet et de rose comme j'ai rarement vu, je vire carrement des serviettes et des maillots sur les filières babord pour m'accorder la vue optimale.
    C'est l'un des seuls réconfort de la journée d'ailleurs, aujourd'hui grosses vagues qui font tout bouger, pas de soleil, petite flemme de tout. Alors je cherche un bouquin, pour me changer les idées. Je jette mon dévolu sur Fred Vargas, que je connais seulement au travers de la voix de Thierry Jensen, qui l'a bercé pendant les longs trajets en voiture. J'ai l'impression de retrouver la voix du conteur pour chaque personnage, sauf pour les personnages québécois, là c'est carrement les têtes à claques que j'entends, le contraste me fait bien marrer, ça chante pas mal dans ma tête. Je dévore "Sous les vents de Neptune" et c'est pratiquement ma seule activité de la journée, je me le prends d'une traite, gros morceau. J'en sors avec un léger mal de crâne mais ça m'a fait mettre en pause le reste du voyage, la journée passe super vite.

    Y'a deux jours, Paulo organise un diner presque parfait avec trois équipes de deux tirées au hasard, un budget max, un thème à trouver et des notes. J'suis trop content de tomber avec Youen, il a tellement d'idées pour ce genre de jeu, cest le partenaire idéal (Paul aussi d'ailleurs, mais plus je retrouve Youen plus ça me fait plaisir). On commence alors à potasser des idées, des thèmes, on finit par s'accorder sur une espèce de pièce de théâtre tout au long de la soirée autour d'une machine à voyager dans le temps. Le frère de you fera des petites videos à la Jerry dans les Totaly Spies et on sera les serveurs de l'epoque à laquelle ils tombent. Surement préhistoire avec chasseurs ceuilleurs, antiquité et futur. Pour le moment on se base olus sur nos idées de costume que sur des envies de plats, faut que je me mette sérieusement à réfléchir à la bouffe. On se fait ça dès qu'on a pris nos marques à Mindelo.

    07-12
    Il s'est passé un tournant décisif d'un point de vu température aujourd'hui, la couche nuageuse des deux derniers jours s'est levée et on s'est fait tabasser de soleil toute la journée. Je garde bien en mémoire la mission que la grand mère de Paul m'a confié, je veille à ce qu'il mette de la crème ponctuellement. Je le sens dès le petit matin, ça sera une journée sous le signe de la baignade. Premier bain à 25,5°, ça a bien remonté depuis 2-3 jours. Deuxième couche de crème post bain histoire d'être sûr de soi.
    Le bateau avance bon train, pas trop de vent mais on réduit la distance restante petit à petit. Je me commence un bouquin que Joce m'a filé pour le voyage, 200 pages de Fab Caro, "Le Discours" je me marre bien devant, c'est léger et assez agreable à lire, en 3h c'est plié.
    Hop encore une couche de crème, le corps pegue mais il me remerciera cette nuit, Paul y passe aussi. On arrive vers midi et le soleil n'est toujours pas à son zénith, la situation devient critique au soleil, hâte qu'on repare le bimini pour nous protéger du soleil.
    Après manger c'est l'heure d'un nouveau bain, le thermomètre indique une eau à 26,4° je deviens fou de cet océan de plus en plus chaud. L'air aussi est de plus en plus chaud, il provient des grosses masses d'air créer par le Sahara juste à quelques centaines de milles.
    Comme il fait bien beau on fait le point sur notre consommation electrique, on consomme bien plus qu'on produit, même dans les meilleurs conditions. Il faut qu'on reduise et nos deux facteurs principaux sont le pilote automatique (2/3) et le frigo (1/3). Petit point lors du repas, le constat est simple : on doit plus barrer. On passe l'aprem à discuter autour de la barre, à se baigner et à faire des devinettes. On est interrompu par des poissons volants qui passent à quelques mètres à toute allure. J'avais jamais croisé ce truc tout droit sorti d'un conte mythologique, faut dire que c'est impressionnant. J'en aperçois en petit banc de 4-5, voler à la surface de l'eau, ils fretillent et disparaissent rapidement. Ça devient vraiment incroyable quand le soleil se couche et qu'on en voit à contre jour, on s'aperçoit d'à quel point certains volent haut, à quelques mètres des vagues, comme une chauve souris. À la tombé de la nuit, l'un d'entre eux se retrouve sur le pont du bateau, il a mal calculé son coup. Le temos de prendre une photo et on l'aide à retourner à l'eau, il avait pas l'air de pouvoir y retourner seul. Peut être avait il besoin d'être dans la mer pour décoller.

    Lorsque je sors la tête du bateau pour prendre mon quart à 23h, l'air est encore chaud, je croise Paul en short, c'est mon premier quart pied nu, espérons que ça dure. Au thermomètre actuellement, l'eau est à 27,2° alors je sais déjà ce que je fais en me reveillant demain matin.

    08-12
    J'ai pas pu me baigner de la journée malgré le grand soleil et l'eau chaude, le bateau va trop vite. On peut rigoler quand ça va jusqu'à 5 nœuds, au delà y'a un sacré risque qu'on ait pas les bras assez costaud pour nous remonter si jamais. Je vais pas me plaindre non plus, le bateau avance à vive allure, on se fait toujours porter par des maxis vagues, on pousse à 8 voir 9 noeuds dans le creux de la vague. À ce rythme là, on devrait arriver dans la nuit, aux alentours de 3-4h. J'ai le cœur à lire énormément en ce moment, c'est chouette parce que je me plonge dans des récits trépidants pendant plusieurs heures voir plusieurs jours non stop, mais je pense moins. J'ai moins le côté contemplation qui s'éveille quand je boulotte des livres de telle façon. Il est possible que je m'investisse un peu trop dans la tache que je me donne, ce qui fait que je délaisse souvent les autres. Pendant la traversée jusqu'au Cao Vert il m'aura fallu que 3j pour venir à bout des 26 épisodes de 24 minutes de Samurai champloo. J'étais un peu bloqué à ce moment là aussi. C'est surement aussi du au soleil, il tape de plus en plus fort et j'ai tendance à croire qu'il inhibe la réflexion, j'ai du mal à les imaginer du Sud les philosophes.
    Un moment que je garde encore comme de la pure contemplation c'est les étoiles lorsque le ciel est clair. Sur mes tranches de quatre heures de quart reparties aléatoirement, le ciel auquel je m'habitue un soir se transforme complètement le suivant, la terre tourne bien mlus vite qu'il n'y paraît. Encore de nouvelles constellations dans ma collec' Cephee, Pegase, la Girafe, le Lézard et la Baleine.

    Ça fait deux jours de suite que le ciel est complètement dégagé et deux jours de suite que je m'arrange pour être à la barre lors du couché du soleil. J'espère secrètement voir le rayon vert, il me semble qu'une partie de la legende indique une latitude semblable à la notre et un ciel dégagé. Alors voilà deux soirs où je fixe lentement le soleil descendre pour venir se coucher juste derrière nos voiles. Deux soirs que je modifie légèrement notre cap pour l'observer à ma guise. Deux soirs où à force de fixer le soleil couchant, le persistance rétinienne du soleil créer des sortes de petits nuages de lumière dans le paysage. Ils sont magnifiques ces couchers du soleil et je remercie grandement les vagues d'être aussi grosses, celà ajoute beaucoup à l'intensité du moment. La couleur du ciel devient completement pastel et tire peu à peu vers le vert, elle se reflète dans les vagues qui s'illuminent de cime en cime, ce qui fait apparaître tous les poissons volants à contre jour. Sans cette lumière si particulière, on a du mal à les distinguer sur l'eau.

    J'ai pris l'habitude de prendre un temps de mon quart pour écrire ce journal et il se passe actuellement un phénomène assez louche. Des planctons phosphorescents, mais pas les mêmes que ceux qu'on a déjà croisé. Ceux ci ont l'air de s'illuminer quand ils le souhaitent, ils brillent plus fort, mais beaucoup moins nombreux et ne semblent pas briller quand on les bouge. Ça donne un spectacle assez flippant, ça et là, dans les vagues et sous une nuit complètement étoilée, de petites portions d'eau s'illuminent en vert presque fluo. Cest tellement rapide et diffu que ça attire l'oeil mais disparaît aussitôt, comme la sensation d'avoir vu un éclair. Parfois certains de ces phénomènes se répètent en ligne, ça donne l'impression qu'un être invisible marche sur l'eau et fait naitre la vie sous chacun de ses pas, un gardien de l'ocean, comme celui de la princesse Mononoke.
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  • Day 40

    Traversée Cal Vert - #1

    December 9, 2023 in Cape Verde ⋅ 🌙 25 °C

    Après une nuit au mouillage (pas top mais on a fait du mieux qu'on pouvait avec la côte, les vagues et le vent), on est parti pour le Cap Vert. La prévision des prochains jours semble top, un vent assez stable, nous portant tranquillement dans la direction du Cap Vert. Aujourd'hui Damona bombarde à 6,9 noeuds de moyenne, la pointe de vitesse si on le maintient sur 24h. À cette vitesse, on mettra 4-5j pour arriver, on sait bien qu'il faut pas réfléchir comme ça mais c'est toujours agréable de voir son bateau filer sans trop de contraintes.

    Au moment où j'écris, il fait nuit noire sur le bateau, aucune Lune et des nuages, on ne voit pratiquement rien et le peu de lumiere qui s'échappe de l'intérieur du bateau empeche nos yeux de s'habituer à l'obscurité. C'est assez angoissant commte tenu de la gite importante du bateau dû aux grosses vagues qui nous poussent vers le cap vert. Heureusement qu'on les prends par l'arrière, ça aurait été un enfer de travers. Aujourd'hui c'était encore journée torse nu, pas mal pour un 2 décembre. On a fini l'aprèm en mixant tous les uns après les autres avec l'enceinte callée entre le pont et l'intérieur, c'était super.

    Pendant mon quart, il y a très vite eu l'un des plus beaux ciels de ma vie. Parce que pas de lune et très peu de nuage, les etoiles brillaient d'un éclat que je leur connaissaient assez peu. Armé d'une petite application qui permet de cartographier le ciel en temps réel, j'ai pu reconnaitre et nommer toutes ces constellations d'hiver. Toutes ces étoiles m'étaient inconnues, les plus beaux ciels que j'ai vu sont ceux de Crouzit l'été en Auvergne ou bien ceux de Carantec, l'été aussi.
    J'ai donc mis un dessin sur Persée, Andromède, Taureau, les Gémeaux avec les célèbres Castor et Pollux, ainsi qu'Orion, que Raphaël m'avait montré un jour mais que je n'avais jamais su retrouver.

    Le quart se passe doucement, la mer est énorme, mais aucune vague ne casse, on s'en rend bien compte lorsque la Lune se pointe et diffuse son eclat sur ces masses d'eau. J'ai de grosses discussions sur l'éducation avec Elsa et sur les partis politiques avec Paulo. Je vais me coucher tout fatigué mais ça sera très dur de trouver le sommeil, le bateau gite énormément et je n'arrive pas à mettre la main sur mes boules quies. Une nuit avec peu de sommeil, on s'habitue à tout.

    03-12
    Aujourd'hui le bateau avance bien moins rapidement, le vent s'est tarit. En voulant enlever le ris pour gagner en vitesse les copains coincent la drisse de GV en tête de mât, ça me préoccupe pas mal puisque j'y suis monté y'a deux trois jours pour vérifier les fameux réas. J'ai du mal à imaginer que la graisse blanche que j'ai appliqué puisse être la cause du blocage de drisse, mais ça fait chier, on ne peut pas pour le moment modifier la voilure de la GV. Un problème à régler à l'arrivée.

    Grand soleil aujourd'hui encore, bouquinade sur le pont toute la journée, j'attaque "La vie mode d'emploi" de Perec avec une attention toute particulière sachant l'affect que papa y porte. Je poursuis aussi tranquillement mon anime Samurai Champloo, j'en attendais un peu plus de ce qu'on m'avait décrit mais ça se regarde très bien.
    Vers midi on croise une tortue à la surface, elle est énorme. Elle doit bien faire 80cm de long, la tête hors de l'eau elle a pas l'air super à l'aise. Mais bon, on ne s'y connaît pas en tortue et on a juste le temps de l'admirer qu'elle est déjà loin dans le sillage.
    Croiser des tortues n'est peut être pas si anormal que ça dans les eaux sur lesquelles on navigue, la température de l'eau monte sans jamais s'arrêter. Aujourd'hui on a atteint 25°, obligé d'aller me baigner pour fêter ça.
    Se baigner quand le bateau avance est un processus bien defini, on sort l'échelle de bain et on met un bout à l'eau qui pend sur une dizaine de mètres. On se met à l'eau doucement avec l'échelle puis on se laisse tracter par la vitesse du bateau. Bizarrement on a plusbdu tout l'impression de faire du qur place quand nos petits bras nous retiennent des milliers de litres qui nous arrive à quelques noeuds dans la figure en permanence. On prend de jolies accélérations avec les vagues et on peut profiter de nuances de bleus qu'on trouve pas dans la nature autre part avec seulement un masque.

    Vers 15-16h, un bateau est en vu et nous appelle à la radio. Comme je m'en aperçoit le premier je m'occupe de discuter avec eux, ils sont suedois mais parlent tres bien anglais. Ils nous racontent qu'ils n'ont plus de communications et qu'ils voudraient joindre leurs proches pour les rassurer, ils nous demandent de transmettre un message. Alors on se dit qu'on tente le coup du téléphone satellite pour la première fois, pour rassurer de complets étrangers.
    Je prends numéro de téléphone et message, on rigole ensemble sur deux trois points de mecomprehension puis on se dit au revoir. Avant de se lâcher, ils nous disent qu'ils vont au même endroit que nous "Sao Vincente", surement Mindelo et qu'ils viennent de pêcher un Espadon de plus de 2,2m et 110kg. J'hallucine complètement derrière ma petite radio en repensant à notre dorade de 2kg. J'ai l'impression qu'il nous dit ça en clin d'oeil au message envoyé à ses proches, on capte l'intention et on rigole une nouvelle fois avec eux. Maintenant nous avons une motivation de plus pour arriver à Mindelo, goûter pour la première fois d'un espadon !

    Une autre de mes motivations serait de régater avec les Suédois pour arriver en premier aux îles. Paul me soutient mais la demande de nous battre un peu pour la première place ne chauffe pas tout le monde, à voir comment les choses evoluent. Une course sur plus de 700 milles nautiques, entre deux bateaux de 13m, pour se retrouver à l'arrivée, moi ça me plaisait bien.

    L'aprem se conclue sur un échantillonnage de plastique (on profite de notre petite vitesse), on essaye de faire fonctionner notre téléphone et on se fait deux trois parties de jeux devant le coucher du soleil.

    À l'heure où j'écris, on peut encore voir le feu de tête de mât du Niord, le bateau suédois, il est à 3 milles maintenant, on a pris un peu de retard avec l'échantillonnage (on a du ralentir un chouïa pour garantir la justesse du prélèvement). Ils avaient pas l'air de se mettre en vent de plein cul cette aprèm midi. Pour notre part, on est vent arrière avec le genois tangonné, les voiles sont merveilleusement bien en papillons et on file en direction direct de notre destination.
    J'espère qu'au reveil on aura rattrapé l'écart, du moins pas perdu de terrain.

    5-12
    Pendant le quart d'hier soir, j'ai finalement perdu de vu les Suedois, d'abord de visu et puis après sur les instruments. Trois possibilités, ils ont parcouru plus de 22 milles en 40min donc ils ont navigué à 33 milles, autant que les bateaux de courses les plus modernes dans leur pic de vitesse. Soit leurs instruments ne fonctionnent plus, soit ils l'ont simplement éteint.
    J'espère qu'ils l'ont éteint pour économiser de l'énergie afin de conserver au mieux possible leur espadon. J'sais pas pourquoi mais cette histoire d'espadon plus grand et lourd qu'un champion de MMA me travaille sacrément.

    Au réveil ce matin, 7h, première rencontre avec les dauphins de la journée, ils sont super fast et prennent juste le temps de venir voir ce qu'on fait et ils filent. Leur respiration est efficace, on sort le trou d'air et bam ça repart direct dans l'eau.
    Première parce qu'on les verra trois fois aujourd'hui, à chaque fois des groupes différents ceci dit. La seconde fois, il est aux alentours de 11h. Youen dit qu'il y a des dauphins, c'est drôle comme on s'habitue vite, on est loin de l'excitation de notre première rencontre. Seuls les copains sur le pont se déplacent ou levent les yeux pour les apercevoir. Pourtant ceux ci valent le détour, on en compte entre 15 et 20, ils ont pas du bouffer la même chose que les premiers parce qu'ils font des bonds de partout. Par réflexe on compte, on regarde quel type de dauphin c'est, on sort le micro pour enregistrer leurs bruits et on note tout ça pour le programme Ketos.
    La troisième rencontre est la plus impressionnante, quand je sors ma tête pour aller les voirs, y'en a partout, ils sont une quarantaine autour du bateau et derriere nous au large on voit une multitude d'ailerons se rapprocher rapidement. Il y a une telle effervescence dans l'eau qu'on ne peut pas tout voir, on tourne la tête fans tous les sens pour essayer de ne pas rater chacune des pirouettes qu'ils font. Le spectacle est hallucinant, certains font des vrilles hors de l'eau, d'autres se dandinent en l'air avec un manque de grâce qui nous fait marrer tandis que d'autres ont l'air aggressif et frappent la surface avec leur queue. Les vagues sont grosses et on les voit sortir à 5-6 de chacune d'entre elles, c'est complètement fou.
    Les copains remettent le micro à l'eau, le règlent bien et enregistrent. Un dauphin met quelques coups dedans histoire de jouer un peu avec, ce qui me dissuade de me mettre à l'eau. Lorsque l'on s'écoute ça sur l'enceinte, on est tout étonné, qu'est ce qu'ils jactent, on se croirait à la cantine. Tout le monde y va de son petit mot, ça piaille comme c'est pas permis.

    Toute cette vie nous fait mettre la traîne à l'eau et même pas deux heures plus tard on chope notre deuxième dorade coryphène. Cette fois ci, plus d'excuse, c'est pratiquemment la sœur jumelle de celle de la dernière fois donc elle a pas intérêt à souffrir ou alors cest que y'a un sadique dans la bande. On la sort en ayant prévu le coup, bassine et vodka bon marché, ça la calme bien une première fois, puis petit coup de couteau entre les yeux en visant le cerveau, c'est jamais drôle mais ça va nettement plus vite. On pense avoir fait ça un peu plus dignement. En tout cas, le résultat est toujours aussi bon.

    C'est assez fou de croiser autant d'agitation dans l'eau surtout qu'on ne voit que la surface. Ça rajoute une petite dose d'adrénaline lorsqu'on met le masque pour aller à l'eau. Si il y a des dorades de 75cm qui se baladent à la surface, qu'est ce qu'on peut bien trouver à 10-20m, ou bien à 3km car c'est la profondeur au dessus duquel on navigue.
    Le sentiment d'être entouré de vie est magique, on se sent faire partie d'un tout. C'est beau et puissant sur le moment, mais un oeu triste lorsque l'on pense aux trois semaines passées dans la méditerranée, sans voir le moindre poisson. Il aura fallu (c'est français ça ?) s'eloigner des hommes pour retrouver la vie, pas vraiment contre intuitif. Autre constat pas des plus agréables, on croise plus fréquemment des déchets qui flottent en surface, surtout des petits récipients comme des grosses bouteilles ou des petits bidons, on essaye de les ramasser quand on les voit suffisamment en avance mais c'est vraiment pas simple.
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  • Day 28

    Iles Canaries

    November 27, 2023 in Spain ⋅ ⛅ 21 °C

    Le lendemain c'est repos pour tout le monde, on fait nos lessives, on se lève tard et on visite un peu les environs. J'ai reussi à avoir Fay et Nils au téléphone, un vrai régal sachant que la soirée Grabuge commence dans quelques heures à peine et qu'ils sont en plein préparatifs. Ça fait du bien d'avoir des nouvelles et de savoir que tout se passe bien, Grenoble ne m'attend pas pour continuer son rythme de fête.

    De notre côté, Paul a repéré une messe et nous propose de venir avec nous, pour l'expérience on fonce. On se retrouve donc pour la première fois dans les rues de Arrecife et ça fait du bien de sortir du centre commercial qu'est le port et de découvrir des rues un peu plus typique. L'office à déjà commencé et on se glisse doucement dans une rangée libre (on est avec Elouan et Elsa) puis on observe bien sagement le déroulé des opérations. Paul nous averti de ce qu'il va se passer puisqu'il est coutumier de ce genre de messe, les codes ont l'air similaires à la France. Alors on se lève et on s'assoit avec les locaux, malheureusement on aura pas le plaisir de chanter en Espagnol puisqu'il ne distribuent pas les paroles à l'avance. C'est un moment assez méditatif même si le prêtre braille assez fort tout du long, les pierres de l'eglise sont magnifiques, des pierres poreuses volcaniques, toutes noires, typiques de Lanzarote. La charpente est apparente et fait partie intégrante du design de l'église, chacune des poutres est magnifiquement travaillée, des ornements de bois orthogonaux s'entrecroisent en formant des paternes que j'aurais associé à des civilisations nordiques type viking plutôt qu'à des Espagnols.
    Pendant le discour du prêtre, je traduis ce que je peux à Paulo et je sens que ca lui fait plaisir, à moi ça me demande une concentration extrême pour reussir à capter le sens des phrases et pas seulement certains mots à la volée.

    En sortant, on est content de ce moment et on file arpenter la ville à la recherche d'un coin sympa où manger. On appelle Gervais et You pour savoir où ils en sont puis on se met à table aux abords d'un bar restau qui à l'air agréable. On se prend une pinte et un burger, tout ça pour 11€, pas le repas le moins cher du séjour mais c'est carrément honnête. On poursuit notre balade et on tombe sur des plages un peu mode jet set, sauf que pas grand monde est dans les rues. Des dj avec un matos de fou mettent de la house sur une des places, un geste de la main de leur part et la soirée partait en B2B2B full indus dans les rues de Arecife. Sur une autre place un peu plus loin, un orchestre joue sur une magnifique scène, eux encore ont des enceintes de fou furieux. Ça à l'air de savoir faire la fête ici, même si la saison n'est pas forcément propice.

    Le lendemain c'est journée aventure, youen et gervais partent aux aurores pour se faire un petit trek où youen dormira dans un volcan tout seul. De notre côté, on part en stop avec Elsa et Paul, direction la plage de Famara, un spot de surf assez réputé dans le coin. On embarque deux combis, le bodysurf d'elouan et des palmes et on est parti.
    On marche 20min jusqu'aux ronds points à la sortie de la ville, grands sourires, pouces tendus et y'a plus qu'à. C'est drôle comme les gens les plus souriants sont ceux qui ne peuvent pas nous prendre par manque de place. Au bout d'une petite quinzaine de minutes, un type peu locace nous avance et fait même un detour pour nous. Jason, le lad londonien par excellence, un accent brut de décoffrage, tatouages sur les bras et dans la nuque, ce mec là a dû distribuer deux trois mandales dans sa jeunesse. Paul essaye de tenir la discussion mais le type est assez froid, cependant toutes ses actions le trahissent, il a le coeur sur la main. Pas de bol pour lui, on l'a percé à jour, pas de gros dur mais un gros nounours. Il force un peu pour nous emmener dans un marché "massive" qu'il nous vend comme étant un truc à ne vraiment pas manquer. On lui dit au revoir aux pieds du marché et on s'engouffre sans attendre dedans. C'est déception sur déception, le marché vend des contrefaçons ou des babioles qu'on trouve dans tous les marchés de France. Le genre de merdouilles qu'on regarde généralement même pas quand on passe devant et qui, là, attirent des centaines de touristes. Personne ne parle espagnol autour de nous, on ne voit que des vieilles australiennes, la peau flasque des années passées au soleil. On apercoit une eglise et on se dit que ce sera sans doute le peu de typique qu'on pourra trouver ici, y'a un dj qui joue des tubes type NRJ 2010 devant l'eglise (celui là aussi a des CDJ 2000, à croire qu'elles valent une poignée d'euros sur l'île), dans l'église on entend ses vieux sons tout pourris, les touristes ne respectent pas le lieu, ça braille dans la maison de Dieu et à la sortie de l'église, des jeunes en tenue de serveurs essayent de nous vendre des cocktails hors de prix, la situation est assez lunaire.

    On se barre vite d'ici, on se remet à un rond point et après 3-4min, un type s'arrête avec son van aménagé et nous dit qu'on peut monter. On lui demande où il va et il nous répond qu'au même endroit que nous, il nous a cerné, il va aussi à la plage pour aller surfer. C'est un vénézuélien qui a son van depuis un an sur les iles Canaries, la vie d'aventure semble lui correspondre à merveille, il n'est pas surpris du tout du tour de l'Atlantique à la voile.

    Nous voilà à la plage, elle est magnifique, une grande baie où des surfeurs s'exercent surplombée par des immenses falaises avec des montagnes autour.

    On se trouve un spot tranquille dans un grand cercle de cailloux en roche volcanique (ils nous protègent des regards et du vent, c'est top).
    Une fois en maillot, on prend le body et on file à l'eau, elle est délicieuse et je retrouve les sensations de vieux Boucaux ou Vielle st Girond sur la côte Basque. Les vagues sont raisonnables et on s'amuse super bien avec paulo, il reussit à prendre ses premières vagues avec le body. Lors de la seconde session, apres avoir mangé, je me fous au body avec les palmes, je reussi à prendre 3-4 vagues dont 2 énormes qui me ramènent jusqu'à la côte. La sensation de glisse est incroyable, on prend une vitesse de dingue et je comprends le côté addictif de ce petit rush d'adrénaline.
    Elouan nous rejoint, il avait un rendez vous chez l'ostéo à midi et on passe la fin de l'aprem ensemble. Paulo et Elou se mettent en combi, Paul teste la mienne et decouvre les joies de ne pas sentir la température de l'eau. Après nos sessions, on va se boire un petit coup et on tombe sur un village de surfeur, les shops de surf se font tous concurrence, ça fume des joints sans trop de soucis devant les magasins et les bars sont bondés. On se prend une bonne bière et on se met en route pour le retour. Petit stress de tendre la main dans le noir alors qu'on est maintenant 4, mais à peine Elsa a-t-elle tendue sa main qu'une voiture s'arrête. Ça aura duré 15s. C'est une femme d'environ 45 ans qui nous prend, elle parle seulement espagnol alors je m'installe devant à ses côtés. C'est la première fois que je me sens autant à l'aise, elle me raconte qu'elle vient de Cuba et que dans sa culture, le stop est super répandu. Elle travaille sur l'île depuis 8 ans mais n'aime pas vraiment ça, selon elle les gens n'ont pas vraiment de culture ici, il y a trop de touristes et ça manque de vie socialez intéressante, les iles Canaries ont l'air d'être avant tout un lieu de passage pour elle. Je la questionne sur des endroits atypiques à visiter et elle me bombarde d'informations, alors je tente de les noter, en la faisant répéter quelquefois. Il se trouve qu'elle allait dans une ville à 6km de Arecife, notre port actuel. Mais quand je lui demande où elle me depose elle me repond "No te preocupe", autrement dit je n'ai pas à m'en soucier. En fait, elle nous deposera juste devant notre port. Elle me raconte un petit peu la culture du vin sur l'île, le fait que le type de vigne a besoin de tres peu d'eau, ce qui semble logique après n'avoir vu que des cactus et des palmiers. Elle me donne son prénom à la fin "Mavis" et nous béni pour la suite du voyage. Nous, on reste bouche bée de cette interaction et de sa gentillesse.

    Lundi 27-11 13h19
    Aujourd'hui on change de spot, la nuit au port était assez chère, alors on fait gaffe. Le matin c'est rangement du bateau, lavage de l'interieur et de l'extérieur ainsi que réparation rapide d'un poc un peu profond qu'on a créé en entrant dans la place en marche arrière la dernière fois. Gervais qui a déjà fait de la resine s'y colle, les autres, on organise le départ. Là nous sommes en navigation pour partir dans le sud de l'île, on va louer une voiture pour un jour et rejoindre Youen qui nous attend déjà sur la plage.

    Il y a une compèt de planche à voile foilée qui se prépare dans la baie, c'est un joli bordel et on a du mal à tous les esquiver mais ça le fait. On arrive au mouillage, les fonds sont pas top, il y a énormément de bateau et on doit faire gaffe où on se met. C'est léger stress mais ça passe bien, le spot est chouette. Ceci dit on est pas au bout de nos peines, on doit encore récupérer youen qui nous attend sur la plage. Gervais essaye de faire démarrer le moteur mais il le noit dans l'essence, résultat on arrive pas à démarrer. Apres 30min de tentative on se fout à la rame avec Paulo, direction la plage.

    Youen nous attendait autour d'une bière, on le chope tranquille et on rentre au bateau tandis qu'il nous raconte son périple, tout seul au milieu d'un volcan. Petite douche nécessaire pour you et pendant que tout le monde se prépare, j'essaye en boucle de faire fonctionner le moteur de l'annexe pour aller boire une bière en ville. On avait abandonné parce que trop compliqué de pagayer à 6, mais lorsque j'abandonne et Paul prend mon relais, le moteur se debloque et accepte enfin de nous porter. Tout le monde se fout dans le mini boat et cest parti, on va au bar !
    L'arrivée sur la plage est catastrophique, on se mouille et on est la risée de tous les touristes en terassses, pas grave, on a le smile et la pinte à 3€ n'est plus qu'à quelques mètres. La soirée se poursuit au burger king après le bar (definitivement pas dépaysé eheh, avec le temps d'attente on se crorait presque sur la place victor hugo).

    Le lendemain c'est réveil pas tard pour aller faire le tour de l'ile en voiture, deux teams se separent à l'arrivée sur la plage. L'une bouffe, l'autre voiture. J'suis dans l'equipe sandwichs avec you et paul.

    Finalement on part direction Fuerteventura pour surfer le lendemain.
    On arrive à un mouillage en debut d'aprem à côté de la petite île désertique de Lobos, les kiteux sont de sortie, le vent et le soleil sont au rendez vous. Pour les copains et moi, c'est baignade à répétition, on sort les masques et les palmes, on gonfle le paddle, c'est vraiment les vacances. On se sent privilégié comme jamais, le paysage est magnifique. Énorme bain de soleil avec Elsa sur le pont. On reconnaît un ou deux bateaux sur le mouillage qu'in avait croisé plus tôt dans notre periple, l'un date même du premier port Espagnol.

    Vers 16h30, on part à l'assaut de la montagne de l'ile de Lobos avec Elouan et Paul, Gervais nous depose en annexe. On marche environ une heure vingt avant d'arrivé en haut, le dénivelé est assez rude mais tres bref. Arrivé en haut, Fuerteventura semble à seulement quelques mètres et Lobos apparaît minuscule. Le petit bout de Terre abrite un phare, un quai pour les touristes en ferry et cette montagne. Le sol est arride comme je j'imagine le geand ouest americain, avec de jolis cactus et une roche presque noire, provenant des volcans de la zone.
    On avait pensé à prendre ordinateur, platines, caméra et drone et lorsque l'on arrive, on tombe sur la seule chose qu'on avait pas : un piédestal où poser tout ça pour pas etre assis. Un tumulus en pierre nous attend à la hauteur parfaite, alors on s'y met avec les copains, un petit set d'une trentaine de minutes chacun. Le mood est fabuleux, j'me marre en m'en rendant compte. On est en t shirt en haut d'une montagne des Canaries, en train de mixer de la techno et de boire une bière devant le coucher de soleil, ça en ferait marrer plus d'un.
    Après quelques belles images cest retour au bateau, on galère parce que la plage où on est arrivé est innacessible à cause des roches de la marée basse, on va sur le gros quai. Suite à ca on va se foutre au mouillage dans la baie d'un port de Fuerteventura pout être paré le lendemain.

    Le lendemain justement, on file chercher des planches de surf pour tout le monde avec l'annexe. 10€ la journée de planche et 5€ la combi pour les copains, les prix sont les mêmes qu'en France. Après avoir fait l'aller retour, on a la chance de pouvoir aller chercher notre spot en bateau. On fait le tour de l'île en essayant d'estimer les vagues et on s'arrête au large de deux plages qui ont l'air d'avoir des vagues raisonnables. Youen et Elouan vont en éclaireur pendant qu'on fait à graille afin d'évaluer les spots. Après avoir choisi, équipés nos combinaisons et bien manger, on file depuis nos planches directement sur le spot. On apprendra plus tard que les vagues sont à 800m du bateau, un bel échauffement à l'aller et un futur supplice au retour. Youen nous avait donné plein d'instructiond et chacun avec nos planches differentes on s'essaye au surf. J'ai une planche de super débutant, un paquebot, un tank, ce qui fait que je suis super stable dans les vagues. Dès la première, j'arrive à me lever et je parcours la plage en une seule vague, la sensation est incroyable mais je maitrise pas grand chose.
    Les vagues sont hautes mais pas trop puissantes, pour Youen, c'est les meilleures conditions pour nous et les grosses vagues à l'autre bout de la plage sont les plus belles de sa vie.
    Les planches passent de main en main, on sent énormément la différence entre les tailles. Parfois la houle se calme pendant de longues minutes, parfois on se prend 6-7 grosses baffes à la suite. On se marre tous mais les forces viennent à manquer à un moment. On se rassemble derrière la barre et on se rend compte que le retour va être extrêmement fatiguant, voir dangereux vu notre condition. C'est justement à ce moment que Youen qui avait la dalle y'a 45min decide de pointer le bout de son nez avec Elsa sur l'annexe. Parfait, on va tous pouvoir rentrer facilement, c'est une bénédiction. Elsa arrive en sauveuse avec eau et biscuit, encore une fois une grande maman pour nous. On donne rendez vous à youen et gerv qui se remettent une session dans le pif tandis qu'on rentre au bateau. Le mood est excellent, personne n'a froid et s'est fait de frayeur au final, seulement des grandes tranches de plaisir. Le plaisir de revenir tout fruit confit au bateau, tout mouillé et en combi me rappelle les fin de navigation à Carantec quand j'etais tout gosse, belle madeleine de Proust.
    Après ça, il a fallu sacrément se magner pour rendre les planches à temps en ville (donc tout le même trajet retour), on est dans le magasin à 19:29, il fermait à 30.

    En rentrant de la ville, on récupère Loic et Raphaël, deux surfeux et surtout copains d'elouan qui sont sur l'ile pour les vacances. Ça part en apero dinatoire sur le bateau, on est tous aux anges de pouvoir parler avec de nouvelles tetes.

    30-11
    On part direction le sud de Fuerteventura pour trouver un port pas cher et une ville avev des magasins de voile histoire de réparer les galères de Damona. Finalement on arrive un peu tard alors qu'on avait que 25 milles à faire, très peu de vent ce jour là malheureusement. On part à l'acastillage avec Gerv et les taches commencent sur le bateau. En deux jours on aura réparé les poulies de pied de mat, changé de position l'écoute de GV, acheté de quoi refaire ecoute de GV et ecoute de genois babord pour prevoir la casse, réparé le hâle bas, refait un contact électrique qui permettait pas d'avoir le feu arrière et le moteur en même temps, refixer les contacts du feu tête de mat, graissé les réas de drisse et de balancine, retapé le drisse de GV et changer des manilles mortes par ci par là.
    Si bien que le 1 au soir, on bouge pour se barrer du pire port depui le debut du voyage (houle, douche froide, pas securisant, aéroport et gros bateau de croisière, pas de wifi) et qu'on aura payé 50€ parce qu'ils ont un fonctionnement à la con.
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  • Day 25

    Fin de navigation jusqu'aux Canaries

    November 24, 2023 in Spain ⋅ ⛅ 20 °C

    Vendredi, en milieu d'après midi, on apercoit les côtes de Lanzarote, il ne nous reste plus que quelques heures avant la fin de cette première grosse traversée. Le moral revient toujours au maximum lorsque l'on sait que l'on arrive. Avec le repère visuel, on arrive beaucoup mieux à se projeter et tout paraît plus facile. On sait aussi qu'on arrive bientôt quand nos amis des Telecom Espagnols nous préviennent sur nos téléphones respectifs. C'est le branle bas de combat, tout le monde retrouve un petit peu de connexion et peut prendre des nouvelles de la famille, des amours ou des copains.
    Perso j'ai qu'une hate, voir comment les potes organisent la soirée de samedi, c'est une des choses qui me manque le plus dans ce trajet.
    C'est dans ce moment où tout le monde est un peu à prendre des nouvelles que Paul me crie qu'il pense que la traine a enfin une touche.
    Tout de suite il va voir et on a l'impression de voir une forme onduler dans l'eau au loin. Alors Paul rentre la traine petit à petit dans le bateau, sans trop sentir de de resistance cependant. Et là on aperçoit un poisson énorme se dandiner de gauche à droite dans l'eau. Il a des reflets bleu très clair, presque cyan et jaune. On se met à crier pour que tout le monde radine en vitesse.
    On est tous completement excité à l'idée de pecher notre premier poisson et chacun y va de sa conjecture pour savoir ce que c'est. Notre excitation se calme bien rapidement quand le poisson est à quelques centimètres du bateau et qu'on se demande comment faire pour le tuer. On avait lu qu'il fallait le tuer rapidement pour pas qu'il souffre et pour eviter qu'il s'échappe. Pour ça plusieurs méthodes : coup puissant derrière la nuque avec une sorte de matraque, couteau qui tape dans le cerveau, alcool fort dans les bronchies.
    On commence avec la méthode du couteau. Youen se met à la tache pendant que gervais et paul le tienne, cest cependant plus facile à ecrire qu'à faire et il y a beaucoup d'hésitation sur le moment, vraiment pas chouette d'ôter la vie d'une si belle bête. Youen met un premier coup qui vient se planter dans le teck du bateau, il nous avouera plus tard avoir fermé les yeux pour le premier coup, puis ça y est le couteau rentre, le poisson se débat tres fortement et on commence à paniquer un peu, cest la debandade sur le bateau. Elsa qui assiste a la scène en arrière plan nous supplie de le tuer rapidement et on tente tous de l'achever sans y arriver. La pauvre bête se prend des coups de marteau sur le crâne et des coups de couteau dans la tête mais rien n'y fait, elle se debat toujours (le cerveau n'etant pas situé au dessus mais plutôt à l'arrière de la tête). Deux gorgées de mirabelle plus tard, le poisson se calme, on aura donc utilisé les trois techniques pour en venir à bout.
    Personne n'est fier de l'action, le "Damona" à l'arrière du bateau est plein de sang, mais la prise est belle, bien qu'elle perde de ses couleurs avec le temps.

    Pendant ce temps de bagarre à sens unique, le bateau file tout droit vers les cailloux, je reprends la barre et on file en direction du port. Quelques heures plus tard, on est plus qu'à 40min du port quand on essaye de les appeler à la VHF, c'est l'enfer, le mec ne parle pas un mot d'anglais alors on me le passe, sa voix est hachée par les interférences et je comprends un mot sur quatre. Apres lui avoir demandé un peu trop de fois de répéter, il me place son téléphone avec un google translate approximatif dans la VHF, qu'il le fasse en anglais ou en français je ne comprends pas plus. La situation est tellement loufoque que j'éclate de rire à la VHF et je sens que le docker est lui aussi amusé. J'arrive enfin à comprendre que ça sera ponton H et qu'il nous fera des signes de lumières lorsque les interférences se calment.
    Une fois arrivé à notre place pour la nuit, il me fait faire un tour de la marina pour me presenter les toilettes et la laverie, on se met à discuter tous les deux. J'suis super content de pouvoir m'exprimer pendant ce laps de temps en espagnol, ca se passe mille fois mieux qu'à la radio, il me complimente même sur mon recit et nous félicite d'entreprendre ce genre de projet à seulement 22 ans. On se quitte en s'échangeant nos prénoms. À bientot Pablo.
    De retour sur le bateau on sort le poisson du four, deux immenses filets de dorade coryphène avec du riz et un écrasé de patate douce/carottes. Je découvre un nouveau goût et une chair tres tendre, tout le monde se régale.
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